Café littéraire : Les réécritures du mythe d’Œdipe

Un café littéraire a été organisé  à l’Institut Français du Burundi (IFB) ce jeudi.  Les réécritures du mythe d’Œdipe étaient le sujet central. Pourquoi ce mythe qui date de plus de 4 millénaires a-t-il été autant réécrit ? L’orateur du jour a donné quelques éléments de réponse

Laïos, le roi de Thèbes et sa femme Jocaste eurent un enfant. Mais l’oracle de Delphes leur prédit que le fils tuerait son père et épouserait sa mère. Voulant échapper à son destin, il abandonna son fils dans la montagne sur les flancs du mont Cithéron  après lui avoir attaché les deux pieds avec une corde et lui avoir percé les chevilles avec un clou. Le bébé fut recueilli par un berger, qui l’appela Œdipe (« celui qui a les pieds enflés » en grec) et l’amena à son maître Polybos, roi de Corinthe. Sa femme Périboea désespérait justement d’avoir un enfant et l’éleva comme son propre fils. Un jour, un jeune Corinthien apprit à Œdipe qu’il n’était qu’un enfant trouvé. Celui-ci, intrigué par cette révélation, consulta la Pythie de Delphes qui lui répéta la prédiction faite à Laïos. Il décida de se rendre à Delphes. Il croisa Laïos sur son char (sans savoir que celui-ci était son père) et après une querelle avec lui, il le tua. Ainsi, s’accomplit la première partie de la prophétie.

Les participants au café littéraire de jeudi dernier

Retour d’Œdipe à Thèbes

Thèbes était sous la coupe d’un monstre sanguinaire appelé le Sphinx. Cette créature tuait  et dévorait les habitants qui ne pouvaient résoudre l’énigme qu’elle leur posait : « Quel est l’animal qui, le matin, marche sur quatre pieds, midi sur deux pieds et le soir sur trois pieds? ». Œdipe résolut l’énigme. Il répondit sans hésiter que c’était l’homme qui, au matin de sa vie, marche à quatre pattes, va sur ses deux jambes à l’âge adulte et s’aide d’une canne pour soutenir sa vieillesse. Le Sphinx, dépité, se suicida. Accueilli comme un sauveur dans la cité qu’il avait délivrée du monstre, Œdipe fut nommé roi et épousa Jocaste, ignorant alors qu’elle était sa mère. La seconde partie de la prophétie de l’oracle s’était accomplie.

L’importance du mythe d’Œdipe

Un mythe est un récit hors du temps ordinaire. Celui d’Œdipe est centré sur l’homme. Il parle de ses  tares. Le fait que l’homme soit au cœur de l’énigme est significatif. Rappelez-vous de ce monstre qui dévorait les habitants de Thèbes qui ne répondaient pas correctement à son énigme.  Cela renforce le côté mythique de ce conte. L’homme est mystérieux comme Œdipe. Comme dans l’énigme, il est à la fois enfant adulte et vieillard. Il est mystérieux. Cela démontre l’emprise que  l’homme peut avoir sur l’évolution des choses malgré une forte adversité. Il n’est pas passif ce mythe. En plus, de grands chercheurs se sont inspirés de ce mythe pour étoffer leurs travaux. Il s’agit entre autre de Sigmund Freud, a indiqué M. Sébastien Niyonzima, l’orateur du jour.

Un mythe tant  réécrit

De Sophocle à Jean Cocteau en passant par Jean Anouilh, le mythe d’Œdipe a été réécrit depuis longtemps. Toutes ces réécritures ont pour but de continuer à le faire. Il est vivant. Les différents écrivains essaient tant bien que mal de trouver le cordon qui le lie à la tradition. Et chacun essaie de focaliser l’attention du lecteur sur un coté qui lui parle beaucoup. Certains n’ont pas écrit sur Œdipe directement, mais sur un membre de sa famille. Jean Cocteau est plus original car il inverse la polarité du complexe d’Œdipe. C’est la mère qui a de l’attirance pour son fils. Tout cela  rend le mythe dynamique, a affirmé l’orateur du jour. A partir de 1920, on a au moins cinq réécritures.

Ce regain d’intérêt peut être dû  aux travaux de Freud qui a remis en lumière ce mythe  en baptisant les relations particulières qui unissent les enfants aux parents de sexe opposé complexe d’Œdipe, pense M. Niyonzima. Mais il faut des études approfondies pour connaître toutes les raisons qui poussent les auteurs à continuer à réécrire ce mythe, a-t-il précisé.

La dernière réécriture date de 2013. Elle est de Sorj Chalandon. Elle est intitulée «Le quatrième mur». Le café littéraire s’est clôturé par la présentation des nouveautés de la médiathèque.