Depuis bientôt trois mois, les activités d’extraction minières sont complètement à l’arrêt. Dans un premier temps, la société Rainbow Mining Burundi (RMB) qui exploite le site de Gakara était dans le viseur. Le gouvernement reprochait à cette dernière de faire des sous-déclarations sur les teneurs en terres rares et sur les prix de vente réels des produits exportés. Finalement, la mesure de suspension des activités d’exploitation des mines s’est généralisée vers l’ensemble des sociétés extractives opérant sur le territoire national, paralysant ainsi tout le secteur. Le gouvernement souhaite conclure des contrats gagnants-gagnants en tant que propriétaire du sous-sol. D’ailleurs, une commission interministérielle est à pied d’œuvre pour réviser le code minier actuel.
Benjamin Kuriyo, Directeur de publication
L’impact socio-économique de cette mesure est incommensurable. C’est un manque à gagner énorme pour l’économie nationale, car les minerais constituent la principale source de devises. Pour le moment, des milliers d’ouvriers sont contraints d’observer un chômage technique. En attendant l’aboutissement du processus d’inscription à l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE), la société civile encourage le gouvernement de faire recours aux experts internationaux pour renégocier les conventions minières avec les multinationales rodées en la matière. Comme ça, on pourra espérer des contrats dont toutes les parties tireront profit.
Dans l’entretemps, Rainbow Rare Earths vient de lever plus de 6 millions de livres sterling, soit 8,7 millions USD sur la bourse de Londres. Ces fonds serviront en partie à financer les activités de maintenance et d’entretien de la mine de terres rares Gakara jusqu’en décembre 2022, rapporte l’Agence Ecofin.
Le gouvernement a des responsabilités dans la facilitation l’exploitation de son sous-sol. D’après le Plan National de Développement 2018-2027, le Burundi aura besoin d’au moins 400 MW pour son industrialisation et 412 MW pour le secteur des mines. Avec les projets énergétiques en cours, on aura atteint une production de 245 MW d’ici 2026. A la même période, le déficit énergétique sera évalué à 566 MW compte tenu des besoins. Ce n’est pas d’un simple coup de baguette magique que le pays va se tirer d’affaires. On a du pain sur la planche.
Le secteur minier est énergétivore. L’offre électrique oscille autour de 90 MW toutes les sources d’énergie réunies. Actuellement, la plupart des sites miniers pour ne pas dire la quasi-totalité d’entre elles ne sont pas connectées au réseau national d’électricité. Les unités extractives font recours à des énergies de secours, notamment les groupes électrogènes pour tourner. Ce qui accroit considérablement les coûts de production en plus des difficultés inhérentes au transport des minerais jusqu’au marché d’écoulement. Il ne faut pas perdre de vue que l’or sert à jauger le niveau économique d’un pays ou à consolider la monnaie locale. Economiquement parlant, les réserves d’or officiellement détenues par les banques centrales renseignent sur les capacités d’un pays d’effectuer des échanges de toutes natures entre les nations, y compris les transferts de capitaux.
Le Burundi devrait profiter de la hausse des prix des matières premières et de l’assouplissement des mesures de confinement pour écouler ses produits miniers et redresser l’économie nationale asphyxiée. Le café et le thé, les deux principaux produits d’exportation ne peuvent pas couvrir les besoins en importation. A titre illustratif, en 2019, les recettes du secteur minier ont dépassé 74 millions USD. L’économie plonge dans le rouge avec la pression accrue sur le marché de change.
Les devises se raréfient au point que le dollar s’échange à 3570 FBu contre 4070 FBu l’euro. Le prix du billet vert augmente exponentiellement. Un dollar qui s’échangeait à 2 800 FBu en février 2020 s’échangeait à 3300 en décembre de la même année. Les importateurs tirent la sonnette d’alarme. La pénurie criante des devises plombe l’activité commerciale alors que la demande augmente en flèche.