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Augmentation du prix du sucre de 3 300 à 8 000 FBu le kilo : Des explications peu convaincantes

La Société Sucrière du Moso (SOSUMO) a récemment pris la décision d’augmenter le prix du sucre, le faisant passer de 3 300 FBu à 8 000 FBu le kilo. Les responsables de la société ont justifié cette hausse par l’augmentation des coûts de production, des prix des matières premières, etc. Ces explications ne sont pas convaincantes. L’ABUCO appelle à une révision à la baisse de ce prix

 Le prix officiel du sucre a été fixé à 8 000 FBu le kilo, soit une augmentation de 4 700 FBu. Il est passé de 3 300 à 8 000 FBu.

Depuis le 14 septembre 2024, le prix officiel du sucre a été fixé à 8 000 FBu le kilo, marquant une hausse significative par rapport à l’ancien tarif de 3 300 FBu. Au cours d’une année, le coût du sucre a ainsi augmenté de près de 5 000 FBu par kilo. Avant le 27 juillet 2023, le prix de cette denrée alimentaire était à 2 500 FBu le kilo. Aloys Ndayikengurukiye, Administrateur Directeur Général de la SOSUMO a expliqué que cette augmentation est due à la hausse des coûts de production et à l’augmentation des prix des matières premières. Il a également fait valoir que l’entreprise souhaite s’aligner sur les prix pratiqués par les importateurs privés, qui varient entre 8 000 et 12 000 FBu le kilo, afin d’éviter toute spéculation.

Cependant, ces explications ne semblent pas convaincre Evariste Ndayishimiye, président de la République du Burundi. Il remet en question la véracité des justifications de l’ADG de la SOSUMO, affirmant : « Je ne sais pas si le ministre en charge du commerce a déjà réalisé une enquête là-dessus. On nous a menti en prétendant qu’un sac de 50 kg coûte 400 000 FBu alors que je constate qu’il est à 243 000 FBu pour ceux qui l’importent d’Ouganda. Ce prix est pratiqué par ceux qui parviennent à se procurer des devises sur le marché noir. »

Le président s’interroge donc sur les raisons qui poussent une entreprise disposant de devises au Bureau de Change de la Banque de la République du Burundi (BRB) à augmenter ses prix de la sorte. Selon lui, la solution au problème de la commercialisation du sucre réside dans la libéralisation du marché. Il insiste sur le fait que toute autorité administrative doit œuvrer pour l’intérêt des citoyens.

Révision à la baisse du prix du sucre, une nécessité

L’Association Burundaise des Consommateurs (ABUCO) a exprimé son indignation face à la récente décision d’augmenter le prix du sucre. Noël Nkurunziza, secrétaire général et porte-parole de l’ABUCO indique que cette hausse ne contribue en rien à améliorer le quotidien des consommateurs d’autant plus qu’elle survient en période de rentrée scolaire, où les enfants ont besoin de thé, de pain ou de beignet. Il appelle à une révision à la baisse du prix du sucre pour alléger la situation des ménages.

« Jamais nous n’avons connu une augmentation du plus du sucre de plus de 150 % comme celle que nous observons aujourd’hui. Cette hausse ne reflète pas la réalité des conditions économiques des consommateurs », précise Nkurunziza. Il rappelle que selon les justifications fournies par l’ADG de la SOSUMO, cette mesure a été prise pour éviter la spéculation en se conformant aux tarifs appliqués par les opérateurs privés, mais cela n’est pas significatif. Toutefois, il insiste sur le fait que les missions de l’Etat et celles des commerçants ne sont pas identiques. Le gouvernement a la responsabilité de protéger les consommateurs et doit déployer des efforts pour éviter une hausse des prix sans justification valable, ajoute-t-il.

Instabilité dans la commercialisation du sucre

Le gouvernement a récemment pris des mesures pour détaxer le sucre afin de faciliter sa commercialisation et son importation. Audace Niyonzima, ministre en charge des finances a annoncé lors de la séance plénière du 13 juin 2024 que cela impliquerait des exonérations, dont la suppression de la taxe sur la consommation, de la TVA ainsi que des droits de douane, qui allaient être réduits de 100 % à 25 % dans la région.

Cependant, au cours du mois dernier, le ministre en charge du commerce en collaboration avec son homologue des finances a décidé de libéraliser le commerce du sucre. Cette nouvelle décision avait pour effet d’annuler toutes les exonérations précédemment accordées aux importateurs de sucre. Cette libéralisation permet désormais à tout commerçant d’importer le sucre et de fixer librement son prix en fonction des coûts de production ou d’importation.

Cette évolution a suscité des soubresauts, notamment l’augmentation du prix du sucre, une décision déjà prise par l’ADG de la SOSUMO qui l’a justifiée par la nécessité de s’aligner aux tarifs des opérateurs privés.

La fragilité de la production sucrière

Depuis la création de la Société Sucrière du Moso en 1988, cette société a du mal à satisfaire sa clientèle. A cette époque, la production s’élevait à 4 658 tonnes alors que la population burundaise était d’environ 4 millions d’habitants. Aujourd’hui, avec une population qui a presque triplé pour atteindre 13 millions d’habitants, la production du sucre ne dépasse pas une vingtaine de tonnes. Cela ne parvient pas également à satisfaire les besoins de la population qui utilise le sucre tant pour sa consommation domestique que dans les secteurs agroalimentaires et de fabrication des boissons.

Malgré une production en berne, la demande en sucre continue à croître portée par l’émergence incessante de nouvelles entreprises agroalimentaires et de producteurs de boissons. En conséquence, l’importation du sucre ne cesse d’accroître, dépassant de plus du double la production intérieure. Selon les statistiques de la Banque de la République du Burundi (BRB), les importations du sucre ont atteint 45 022 tonnes en 2022, puis 28 723,9 tonnes en 2023 et jusqu’à 28 779,8 tonnes entre le début de l’année et juin 2024.

Il convient de rappeler qu’un partenariat a été établi entre le gouvernement burundais et le groupe ougandais Sarrai Group, visant à soutenir la SOSUMO dans l’amélioration de sa production. Bien que les travaux aient été prévus pour commencer en janvier de cette année, ceux-ci n’ont pas encore été entamés.

 

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