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L’automédication, ce fléau qui tue à petit feu

Ils sont nombreux les Burundais qui pratiquent l’automédication, et cela sans s’inquiéter de rien. Souvent, les médicaments sont à la portée de tous et parfois à vil prix. Les professionnels œuvrant dans le secteur de la santé s’en inquiètent sans malheureusement pouvoir arrêter ce phénomène. Beaucoup de burundais continuent à pratiquer l’automédication pourtant très dangereuse, ruineuse et qui emporte des vies par pure ignorance l’ignorance

A tort et à travers, les gens éprouvent l’envie de se soigner quand ils se sentent un peu mal à l’aise. Il suffit de soupçonner une fièvre pour prendre une dose de quinine. Il suffit de se blesser ou de sentir une irritation à la gorge pour prendre une dose d’Ibuprofène sans l’avis d’un médecin. Les pharmaciens qui veulent écouler leurs produits et gagner plus ne privilégient que leurs intérêts.  Certains de ces businessmen qui investissent dans le secteur de la santé ne nient pas l’existence de l’automédication.

«Nous ne sommes pas obligés d’exiger une ordonnance médicale», a indiqué une pharmacienne œuvrant dans la ville de Bujumbura.  Un autre employé d’une pharmacie abonde dans le même sens. Pour ce garçon qui affirme que bon nombre de ses clients sont porteurs d’une ordonnance médicale, rien ne l’empêcherait de donner des médicaments à celui qui les demande même sans ordonnance médicale.  Pour lui, le demandeur sait souvent comment se servir des médicaments qu’il cherche. Cependant, il indique que la prescription médicale est obligatoire dans certains cas. C’est notamment pour les maladies chroniques comme le diabète, l’hypertension ou d’autres maladies exigeant la prise continue des médicaments.

Prendre des médicaments non prescrits par un médecin n’est pas différent de s’auto empoisonner.

« Oui, je peux vendre un médicament à quiconque le cherche. L’ordonnance n’est pas obligatoire. Mais il s’avère parfois nécessaire de s’informer sur les symptômes du patient et de lui donner des conseils d’utilisation », a expliqué une jeune pharmacienne œuvrant dans un coin du quartier. Elle affirme qu’il y en a qui ne veulent pas écouter les conseils du pharmacien. Elle donne l’exemple des jeunes gens qui viennent demander le viagra. « Quand on tente de leur en expliquer son utilisation, ils préfèrent se rendre dans une autre pharmacie. Ils ne se contentent que de ces informations qu’ils ont recueillies du ligala », explique-t-elle sourire aux lèvres.

L’automédication détruit  la santé et emporte des vies

« L’automédication est une pratique très mauvaise », martèle Dr Sylvain Pierre Nzeyimana, président de l’ordre des médecins du Burundi. Selon ce professionnel de la santé, prendre les médicaments qui ne sont pas prescrits par un médecin n’est pas différent de s’auto empoisonner.

Pour montrer qu’il s’agit d’un réel danger, Dr Nzeyimana a choisi de donner des exemples parmi quelques médicaments les plus accessibles de la population. « Vous savez que le paracétamol est un médicament facile à trouver et qui est vendu à moins cher. Mais il s’agit d’un médicament extrêmement dangereux qui cause de nombreux décès », avertit-il. Il indique que la consommation excessive de ce médicament cause l’hépatite fulminante, une inflammation du foie assez spontanée qui emporte la vie de la personne atteinte.  Il pointe également du doigt les utilisateurs des médicaments utilisés comme antibiotiques ou antiviraux comme l’ibuprofène. « Il y a des personnes qui sont aujourd’hui obligées de faire faire la dialyse à cause de la prise de l’Ibuprofène », indique-t-il. En outre, certains médicaments, notamment les antimicrobiens perdent leur efficacité dans la lutte contre les microbes. Ce qui peut constituer un problème dans l’avenir. Cependant, même si le spécialiste rappelle aux Burundais que le médicament est un poison malgré son rôle de curatif, il affirme que certains médicaments peuvent être utilisés sans prescription médicale.

Une pratique qui se nourrit de nombreuses séquelles au niveau du secteur sanitaire

Selon Dr Sylvain Pierre Nzeyimana, l’automédication n’est pas un problème spécifique au Burundi. Il s’agit bien d’un phénomène très ancien et répandu dans le monde entier. Cependant, il existe plusieurs raisons qui sont à l’origine de l’automédication au Burundi. Dr Nzeyimana cite notamment le problème lié à la proximité avec les médecins ou à la pauvreté. « Peut-être que bon nombre de gens font recours à l’automédication à cause de l’insuffisance du personnel médical », dit-il. Pour lui, la pauvreté pourrait être une autre raison de ne pas fréquenter les structures de soins.

Le président de l’ordre des médecins du Burundi considère que blâmer les seules personnes qui pratiquent l’automédication serait injuste. Selon lui, il faut parler de façon globale. « Que chacun fasse tout ce qu’il doit faire pour essayer de changer la donne », dit-il.  

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