L’élimination des barrières non tarifaires au sein des Etats de la CAE constitue l’engagement des Etats membres pour faciliter les échanges et les opérations commerciales entre ceux-ci. Des comités nationaux ont été mis en place pour effectuer ce travail et les résultats sont visibles sur le terrain
« L’article 5 du traité portant création de l’EAC, stipule que les Etats membres s’engagent à établir entre eux et conformément aux dispositions du traité la mise en place du marché commun, de l’union douanière,de l’union monétaire et plus tard d’une fédération politique afin de renforcer et de réglementer les relation industrielles, commerciales et autres », a indiqué Emile Ndigiriye, membre de la commission nationale de suivi des mécanismes d’élimination des barrières non tarifaires. Il précise que c’est dans ce cadre que la commission dont il fait partie a été mise en place par le secrétariat général de la CAE. Selon lui, en 2006, le conseil des ministres de la CAE a procédé à l’élaboration des mécanismes d’élimination des barrières non tarifaires au sein des pays partenaires. En 2009, on a élaboré une matrice dans laquelle on va collecter toutes les barrières non tarifaires en provenance des Etats membres.
Barrières tarifaires versus barrières non tarifaires
M.Ndigiriye explique que les barrières tarifaires sont les droits de douane que les produits étrangers devront supporter à leur entrée sur le territoire national. Il y a un droit de douane qu’on doit appliquer au prix d’achat de ce produit étranger. Les barrières non tarifaires sont quant à elles, tout autre obstacles mis à l’entrée des marchandises étrangères, la fixation de produits maximum mis à l’entrée pour une période donnée. Il souligne que le protocole de l’union douanière a défini les barrières non tarifaires comme des lois et règlements, des règles administratives et techniques qui font que les droits des douanes sont imposés par un Etat partenaire avec comme effet l’entrave aux échanges commerciaux. Ainsi, avec le constat de l’existence de pareilles entraves, insiste-t-il, on a pensé aux mécanismes à mettre en place en vue de leur élimination.
Les comités nationaux mis en place ont pour mission d’identifier toutes les barrières tarifaires qui existent au Burundi et d’identifier les barrières non tarifaires que les pays partenaires imposent à nos hommes d’affaires dans le travail d’importation et d’exportation des marchandises. Il explique que le comité a la mission d’essayer d’approcher la partie imposante pour voir comment éliminer ces barrières d’une façon bilatérale. En cas d’échec, le comité est obligé de reporter le rapport au comité régional pour que cette barrière soit inscrite dans la matrice sous régionale. Ensuite le comité de la CAE organise chaque trimestre des fora où les comités nationaux se rencontrent pour échanger sur la manière d’éliminer les barrières non tarifaires déjà identifiés.
Le cadre légal de mise en place de ces comités
Il évoque l’article 75 alinéa 1 du traité portant création de la CAE sur l’élimination des barrières non tarifaires qui stipule que les barrières non tarifaires doivent être éliminées. Il fait aussi référence à l’article 13 alinéa 1 qui stipule que sous réserve des dispositions prévues ou autorisées par le présent protocole, les membres s’engagent à supprimer avec effet immédiat tous les obstacles non tarifaires à l’importation sur leurs territoires respectifs des marchandises originaires des autres pays partenaires et par la suite à ne pas imposer d’autres barrières. L’alinéa 2 de ce protocole stipule que les Etats partenaires doivent élaborer des mécanismes d’identification du suivi de la suppression de ces obstacles au commerce.
Les mécanismes techniques
Pour les mécanismes techniques dans son approche bilatérale, M.Ndigiriye précise qu’après la réception des plaintes, on fait des contacts avec les parties imposantes. S’il y a un de nos hommes d’affaires qui déclare ses marchandises en Ouganda, il approche le comité national et celle-ci entre en contact avec le comité national ougandais pour essayer de supprimer cette barrière de façon bilatérale. En cas d’échec, indique-t-il, on saisit le comité régional. Celui-ci enregistre cette barrière avec un document de preuve. Il enregistre au niveau de la CAE cette barrière qui sera discutée lors des fora.
On utilise un système web pour reporter en ligne les barrières non tarifaires. S’il y a une institution qui impose une barrière non tarifaire, il la déclare au comité national et entre en contact avec le comité régional en ligne avec des preuves à l’appui et la plainte est enregistrée.
Il y a aussi le système de reportage basé sur les SMS. Le comité régional a proposé qu’il y ait création de points focaux pour qu’il y ait des groupes whatsapp afin qu’on échange sur les barrières non tarifaires que les Etats membres imposent aux pays partenaires. Il rassure qu’on a déjà supprimé beaucoup de barrières non tarifaires le biais de ces groupes.
Mécanismes politiques
Au niveau politique, en cas d’échec dans la suppression des barrières non tarifaires, c’est le comité sectoriel qui est saisi. Selon Ndigiriye, le secrétariat général de l’EAC recommande au comité sectoriel de résoudre les barrières non tarifaires persistantes. Les secrétaires permanents aux ministères des Relations Extérieures, des affaires de l’EAC ou au ministère ayant le commerce dans ses attributions se rencontrent pour résoudre ces barrières. En cas d’échec, ils transmettent le rapport au conseil sectoriel au ministres ayant le commerce, l’industrie, les finances et l’investissement dans leurs attributions. En cas d’échec, c’est le conseil des ministres ayant le commerce dans ses attributions qui est saisi. En cas de non compromis, c’est le sommet des chefs d’Etat qui tranche.
Pour la mise en place des comités nationaux burundais, notre comité a été mis en place par l’arrêté No.0016 du 17 octobre 2017 portant mise en place, mission, composition et fonctionnement du comité national de suivi des mécanismes d’élimination des barrières non tarifaires en remplacement de l’arrêté No.29 du 16 décembre 2011. Le comité national comprend 19 membres dont 11 proviennent du secteur public et 8 du secteur privé. Le comité est présidé par un membre cadre de la 2ème vice-présidence. Il est co-présidé par un membre du secteur privé qui est l’actuel vice-président de l’AIB. Il informe que ce comité a essayé d’y intégrer toutes les associations des hommes d’affaires pour que le secteur privé soit largement représenté.
Etat des lieux de l’élimination des barrières non tarifaires
Depuis 2009 lorsque les comités nationaux ont commencé à travailler, explique Ndigiriye, on a déjà sur la matrice de la CAE 134 barrières non tarifaires éliminées. Les barrières qui ne sont pas encore éliminées sont au nombre de 14. Parmi ceux-ci, il y a deux qui affectent le Burundi dont l’introduction de la TVA au port de Dar-Es-Salaam sur toutes les marchandises qui y passent plus d’un mois en transit.
Barrières non tarifaires nationales déjà éliminées
Les taxes communales imposées sur les marchandises en transit venant de la Tanzanie dans les communes de Mabanda et Nyanza-lac ont été supprimées. Il évoque aussi la surtaxation des denrées alimentaires dans les communes de Mugamba et Mabanda. Ceci pour les denrées alimentaires en provenance de Makamba et de la Tanzanie en transit vers les communes de Matana et Mugamba. Selon lui, on impose 4 FBu par kg dans le déchargement de ces marchandises, mais ces deux communes imposaient 6 à 7 FBu par kg. Cette barrière a été supprimée. En 2014 et en 2015, il y avait des barrières non tarifaires à Gatumba, mais actuellement ils ont été réduits. Il en est de même sur l’axe Muyinga-Kobero. D’autres barrières non tarifaires en cours de résolution sont la longue procédure de certification des produits chez BBN, et l’existence de plusieurs barrières policières sur différents axes.
Défis à relever
Il reste des obstacles non tarifaires qui restent importants et exigent des textes de conformité avant l’accès au marché. Il y a aussi la multiplicité des autorités de régulation et la duplication des activités d’évaluation de conformité et les faits associés. Ici, M. Ndigiriye parle d’un produit national qui passe sur un territoire tanzanien ou rwandais et exige d’autres tests allant dans le sens de ne pas reconnaître les institutions nationales qui ont déjà certifié ce produit. Il précise qu’il y a une résistance des barrières non tarifaires dans la matrice de la communauté (14 matrices qui restent).
Perspectives d’avenir
Pour la non reconnaissance mutuelle des normes, M.Ndigiriye explique que les groupes techniques des normes sont déjà mis en place par le secrétariat général de la CAE pour proposer des voies de sortie. Au mois de mars 2019, il y a eu une consultation nationale par les Etats partenaires pour recueillir les recommandations de la population. Pour les barrières qui persistent dans la matrice depuis longtemps, il y a la loi de 2017 de la CAE sur l’élimination des barrières non tarifaires qui vient d’être révisée. Cette loi propose des sanctions pour les pays qui détiendront ou retarderont la suppression des barrières non tarifaires.