L’énergie électrique est un catalyseur du développement industriel. Le Burundi veut accroître son offre d’électricité pour résorber son déficit énergétique qui se creuse (566 MW en 2026). En plus des centrales hydro-électriques en cours de construction, le gouvernement mise sur l’énergie nucléaire pour satisfaire la demande des industriels. Cependant, cette forme d’énergie présente plusieurs dangers sur le plan écologique
Le Conseil des Ministres a autorisé la signature du Mémorandum d’entente entre la société publique russe de l’énergie atomique « ROSATOM » et le ministère de l’Hydraulique, de l’Energie et des Mines de la République du Burundi. Ce mémorandum porte sur la coopération dans le domaine de l’utilisation pacifique de l’énergie atomique. Il permettra la poursuite du processus d’exploitation de l’énergie nucléaire.
Le Kremlin attiré par les réserves d’uranium
Les données empiriques montrent qu’avec un gramme d’uranium, on peut produire de l’énergie électrique équivalente à celle produite par une tonne de pétrole. Dans le passé, les tentatives d’exploiter l’énergie nucléaire se sont soldés par des échecs. « Il est alors impératif que le Burundi avance avec des organisations solides de renommée internationale afin d’être rassuré de la concrétisation des engagements pris vis-à-vis de ce projet », annonce Prosper Ntahorwamiye, secrétaire général et porte-parole du gouvernement dans un communiqué de presse sanctionnant le Conseil des ministres du 3 février 2021.
Pour ce faire, le gouvernement est en contact avec une société d’origine russe « ROSATOM » afin de développer une coopération dans le domaine de l’utilisation pacifique de l’énergie atomique. Concrètement il s’agit de construire une centrale nucléaire capable de résorber le déficit énergétique. La signature de ce Mémorandum d’entente permettra le début du partage des informations pertinentes entre le Burundi et ROSATOM. Ce Mémorandum d’entente permettra par la suite la négociation d’un accord intergouvernemental entre la Fédération de Russie et le Gouvernement du Burundi pour commencer les études de mise en œuvre de ce projet.
Un déficit énergétique à résorber
Les projections du Plan National de Développement 2018-2027 montrent que le Burundi aura besoin d’au moins 400 MW pour son industrialisation et 412 MW dédiés à l’exploitation des mines. Les projets énergétiques en cours de réalisation vont porter l’offre de l’électricité à 245 MW à l’horizon 2026. A la même période, le pays aura un déficit énergétique de 566 MW par rapport aux besoins. Le gouvernement Burundais mise sur certains minerais dont l’uranium pour diversifier les sources d’énergie et, partant, combler cet écart.
L’énergie nucléaire dépend d’un combustible fossile, l’uranium, dont le minerai est contenu dans le sous-sol de la Terre. Elle permet de produire de l’électricité dans les centrales nucléaires, appelées centrales électronucléaires, grâce à la chaleur dégagée par la fission d’atomes d’uranium. Une centrale nucléaire se compose de 4 parties principales : le bâtiment contenant le réacteur dans lequel a lieu la fission, la salle des machines où est produite l’électricité, les départs des lignes électriques qui évacuent et transportent l’électricité, des tours de refroidissement exclusivement installés au bord d’une rivière (voir schéma).
Des tentatives pour développer l’énergie nucléaire
En mars 2009, l’Assemblée Nationale a voté à l’unanimité le projet de loi portant adhésion par la République du Burundi au Statut de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique « AIEA ». La motivation du Burundi à adhérer au Statut de l’AIEA est basée sur l’espoir d’une éventuelle existence du métal uranium au Burundi suite aux prospections réalisées dans la province de Bubanza en commune de Musigati, a soutenu l’ex-ministre de l’Energie et des Mines, Dr. Samuel Ndayiragije.
En avril 2015, le gouvernement a signé une Convention de 3 ans avec la société Morgan Mining SURL pour effectuer des recherches afin d’établir l’existence des gisements exploitables de la Colombo-tantalite et ses éléments associées (Cassitérite et Wolframite) et l’Uranium dama le périmètre de Kibuye-Inakizuru. Ledit périmètre couvre une superficie de 321,3 km2 dans la province de Bubanza. Morgan Mining devrait effectuer des travaux d’exploration, y compris le calcul des réserves minérales conformément aux procédures internationales, lit-on dans la Convention.
D’ailleurs, une licence d’exploration a été délivrée à une entreprise étrangère. Le Burundi voulait alors rassurer les Etats membres de l’AIEA que rien n’est en train de se préparer en cachette en ce qui concerne le recours à l’armement nucléaire, a justifié le ministre Ndayiragije.
Que peut-on attendre de l’AIEA ?
L’AIEA aide à former les cadres des Etats membres de l’AIEA en ce qui concerne le traitement et l’évaluation de la situation de la radiation sur le territoire national afin de protéger la population.
Le Burundi attend de l’Agence des tests sur l’ampleur des matières radioactives étant donné que le pays ne dispose pas de structures appropriées pour le faire. En ce sens, l’Agence organise des contrôles dans chaque pays membre afin d’éviter des catastrophes.
Plus de prudence ….
Lors de la séance plénière pour analyser le projet d’adhésion à l’AIEIA, les parlementaires ont soulevé des inquiétudes quant au danger lié à l’exploitation nucléaire et/ou atomique. Hon. Salvator Ntahomenyereye évoquait les précautions à prendre au cas où il serait prouvé qu’à Nyaruzuru en commune Musigati, il y a un gisement d’uranium. Pour le ministre Samuel Ndayiragije la population vivant à proximité de ce site de prospection sera informée des précautions à prendre. Pour l’heure, les résultats des travaux de prospection n’ont pas encore été rendus publics.
L’Assemblée Nationale (législature 2005-2010) avait recommandé au Gouvernement de faire une évaluation complète de la situation réelle de la radioactivité dans le pays. Ainsi, des tests au niveau de l’eau, du sol, de l’air et de l’impact environnemental devraient être réalisés pour assurer la sécurité des citoyens. Les députés conseillent le gouvernement à faire plus de prudence. L’idéal serait d’établir toutes les possibilités en sources d’énergie. Il fallait plutôt choisir des sources d’énergie alternatives abordables plus adaptées à la protection de l’environnement et au développement économique, en l’occurrence l’énergie hydroélectrique.
Une forte concentration d’uranium?
L’uranium est naturellement présent dans les eaux souterraines et dépasse fréquemment les concentrations maximales admissibles. Une étude faite au Burundi en 2017 où les concentrations d’uranium sont dissoutes avec des teneurs anormalement élevées. Des échantillons d’eau ont été prélevés dans les puits d’approvisionnement en eau potable, les puits à usage domestique, le lac Cohoha et le pluviomètre installé à Kirundo.
Les quantités collectées entre mai 2012 et avril 2015 ont été analysés par le laboratoire du Federal Institute for Geosciences and Natural Ressources en Allemagne. Les résultats montrent des concentrations qui dépasseraient parfois 700 µg / L alors que le seuil acceptable par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) est de 30 µg / L.
Les chercheurs de l’l’Institut Géographique du Burundi (IGEBU), co-auteurs de cette étude réalisée au Nord du pays soulignent la nécessité de faire preuve de prudence lors du développement des systèmes d’approvisionnement en eau à proximité des zones de rejet des eaux souterraines caractérisé par une forte évapo-concentration.
Fukushima, un désastre écologique
L’accident nucléaire de Fukushima reste gravé dans les mémoires. En 2011, un tsunami a provoqué d’énormes dégâts matériels. Les réacteurs de la centrale nucléaire ont été fortement touchés, contaminant ainsi les zones environnantes. Des milliers de japonais ont été obligés de vider les lieux pour réduire le risque de contamination. A l’heure actuelle, certaines régions sont quasi désertes parce que laissées à l’abandon.
Quelques jours après la catastrophe de Fukushima, les autorités allemandes décident de sortir définitivement du nucléaire. Ainsi, le pays a développé les énergies renouvelables pour se substituer aux réacteurs nucléaires. En janvier 2018, la demande électricité a été entièrement couverte par les énergies renouvelables avec des éoliennes pour la plupart, rapporte Green Peace. D’ailleurs, l’Allemagne est passée du pays importateur d’électricité avant 2009, au pays premier exportateur d’électricité européen, devant la France.
Effets de l’uranium sur la santé
Etant donné que l’uranium est une substance radioactive, ses effets sur la santé ont été étudiés. Les scientifiques n’ont pas détecté d’effets nocifs des radiations en présence d’un niveau naturel d’uranium. Cependant, des réactions chimiques peuvent se développer après l’absorption de quantités importantes d’uranium, celles-ci pouvant provoquer des problèmes de santé tels que des problèmes rénaux.
Quand on reste exposé pendant une longue période à des radionucléides d’uranium, on risque de développer un cancer. Les risques d’avoir un cancer sont plus élevés lorsqu’on est exposé à de l’uranium enrichi, car il y a plus d’isotopes radioactifs de l’uranium. Cette forme d’uranium dégage des radiations nocives, qui peuvent provoquer le développement d’un cancer quelques années plus tard. L’uranium enrichi peut se retrouver dans l’environnement lors des accidents dans les centrales nucléaires. On ne sait pas encore si l’uranium à des effets sur la reproduction.