La conjugaison des efforts par de multiples partenaires et les bonnes pratiques agricoles et de transformation sont les conditions sine qua non dans la chaîne de production du café. Le Consortium de 39 coopératives (COCOCA-Horamama Coffee Dry Mill) basée sur la colline Ntarambo, commune Kayanza dans la province Kayanza, les caféiculteurs et l’administration de Ngozi font découvrir le café de la pépinière au produit d’exportation
Mélance Hakizimana, président du conseil d’administration du Consortium des Coopératives des Caféiculteurs (COCOCA-Horamama Coffee Dry Mill) : « Au cours du développement du caféier, son entretien s’avère nécessaire. Il faut lui appliquer les engrais et les insecticides, le pailler, le tailler, l’étêter ou le courber… »
Les rendez-vous étaient fixés à l’avance pour le lundi 6 août. Pour mieux s’y préparer, le départ de Bujumbura vers les provinces de Ngozi et de Kayanza à plus de 100 km a eu lieu le dimanche 5 août.
Très tôt le matin du 6 août, nous nous retrouvons devant les bureaux du gouverneur de la province Ngozi. Celui-ci n’était pas là. Occupé par ses fonctions, les contacts téléphoniques et physiques n’ont cessé de s’établir.
Finalement l’entretien avec le gouverneur de Ngozi a eu lieu depuis 15 heures en faisant une longue marche de 4 heures sur à peu près 15 kilomètres en partant de Maridadi (commune Busiga) vers le centre-ville de Ngozi.
Cet entretien avec le gouverneur de Ngozi a eu lieu une heure après celui du président du conseil d’administration du COCOCA-Horamama Coffee Dry Mill. Celui-ci est venu de Kibimba, en commune Giheta dans la province Gitega à plus de 150 km pour venir nous accorder l’interview.
L’amélioration de la qualité du café, un circuit connu
Albert Nduwimana, gouverneur de la province Ngozi : « Pour un kg de café cerise vendu, chaque commune bénéficie de 11 FBu »
Près de 600 mille familles sont des caféiculteurs et cette culture fournit jusqu’à 80% des recettes d’exportation en devises pour le pays. « Pour la bonne maîtrise de la chaîne de production du café, l’administration surveille d’abord les prix du café cerise que les associations et les coopératives donnent aux caféiculteurs. Ensuite, nous intervenons dans la sensibilisation sur l’entretien de cette culture», déclare Albert Nduwimana, gouverneur de la province Ngozi.
Pour lui, l’administration a intérêt à s’impliquer davantage dans la chaîne de production du café. « Si la population devient riche parce qu’elle est rémunérée via le café, elle participera au développement du pays en payant les impôts et les taxes. Par ailleurs, pour un kg de café cerise vendu, chaque commune bénéficie de 11 FBu », renchérit-il.
Contradiction dans les rôles
Après le triage manuel, le café est stocké. De cette façon, le café « parche » est obtenu
« Je cultive le café depuis cinq ans. Je me suis approvisionné en plants de café dans les associations des caféiculteurs », indique Clément Bihumeri, caféiculteur habitant la colline Kavumu, zone Mubuga dans la commune et province Ngozi.
Normalement, fait remarquer un acteur dans le secteur, la chaîne de production du café devrait commencer par le caféiculteur, ensuite l’administration (représentée par l’Autorité de Régulation de la Filière Café (ARFIC), la Confédération Nationale des Associations des Caféiculteurs (CNAC) et les stations ou usines de lavage-dépulpage ainsi que les usines de déparchage.
Ce qui est remarquable est que le plus souvent, martèle cet acteur, les dépulpeurs et les déparcheurs jouent le rôle de la CNAC (faire le plaidoyer des caféiculteurs du Burundi) en distribuant les plants et en encadrant les caféiculteurs.
De la pépinière au déparchage
« Celles-ci les donnent à la CNAC qui, à son tour, les dispatche aux fédérations des caféiculteurs », précise-t-il. Ce sont ces fédérations, selon toujours M.Hakizimana, qui mettent ces graines dans les germoirs et font les pépinières (lieux où l’on fait pousser des plantules pour les replanter ensuite).
Tout commence par la pépinière et c’est là où il faut concentrer beaucoup d’efforts comme le signale M.Hakizimana. Et de faire remarquer : « Les encadreurs de la CNAC et des Directions Provinciales de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage (DPEAEs) supervisent ce travail ».
M. Hakizimana témoigne que la production de plants implique de nombreuses opérations, notamment le mélange de terres en pépinière, le traitement de la terre, le remplissage et les dimensions des germoirs, le prétraitement des semences…
Il rappelle que la plantation des graines dans les pépinières se fait au mois d’octobre et le repiquage des plants au mois de novembre ou décembre, soit une période de deux mois. C’est avec le repiquage des plants qu’on aboutit au verger de café.
Plus de soin dans la transformation
« Le café est comparable au lait. Sa transformation exige de la propreté. Ce sont les cerises de café qui sont à la base du processus de transformation », explique Eric Muheto, responsable qualité et transformation du café au sein de COCOCA-Horamama Coffee Dry Mill.
Pour amener les cerises dans les stations de lavage, fait savoir M.Muheto, les caféiculteurs doivent récolter les bonnes cerises et éliminer les mauvaises par triage et flottaison. Le triage des cerises par les caféiculteurs permet d’éliminer les cerises vertes et endommagées avant de les apporter à la station de lavage. Ce tri doit s’effectuer six heures au plus tard après la cueillette. Cela pour éviter la pré-fermentation. M. Muheto souligne que le bon produit de ce tri s’appelle cerise A et les rejets s’appellent cerises B.
Il notifie également que les cerises de café doivent être transportés dans des camions propres.
Et de marteler : « Les cerises de café peuvent être traitées selon deux méthodes : la voie sèche et la voie humide. Ce qui amène au café washed ou au café fully washed.
Avec la voie sèche, les cerises de café sont étendues au soleil pendant trois à quatre semaines dans l’objectif de dessécher la pulpe. La voie humide s’étend sur plusieurs étapes, à savoir : le dépulpage, la fermentation, le gradage, le lavage et le séchage ».
Le dépulpage s’effectue par des dépulpeurs mécaniques. Cette opération consiste à enlever la majeure partie de la pulpe et du mucilage.
M. Muheto informe qu’après le dépulpage on procède à la fermentation (ou démucilagination). Cette opération se fait sur les grades supérieurs FWA1 (Fully Washed A1). M. Muheto apprend qu’il existe deux sortes de fermentation : la fermentation simple (qui dure de 6 heures à 18 heures) et la fermentation double (qui dure 36 heures). La première se fait sous-eau et la deuxième est sous le soleil.
La fermentation permet d’éliminer le reste de la pulpe et du mucilage. Les grains de café ainsi obtenus sont alors lavés à l’eau et puis séchés.
« En lavant, on grade », dit M.Muheto. C’est cette étape qui donne, selon lui, le grade supérieur FWA1, les semi lourds FWA3B (bon) et FWA3V (vanné), FWA4 (flottants) et le dernier grade (Coque).
Et de continuer : « La transformation continue sur le café FWA1. Celui-ci subit le trempage, le pré-séchage (tribune, hangar, séchage sous ombre) et enfin le séchage sur table. C’est là où on va mesurer l’humidité. Celle-ci varie entre 10, 11 et 12 ». Après le triage manuel, le café est stocké. De cette façon, le café « parche » est obtenu.
Travail de laboratoire
« A partir du café parche stocké, les échantillons sont prélevés. Ceux-ci sont envoyés au laboratoire pour analyse », apprend M.Muheto.
Il avise qu’au laboratoire, on analyse l’humidité, le pourcentage des défauts, des grades, le rendement…Et de renchérir : « Après l’analyse physique, on procède d’abord à la dégustation, ensuite au classement par lots par score et enfin on trouve la décision des mélanges ».
M. Muheto annonce qu’après cela, le laboratoire donne un feedback aux stations de lavage. Après la correction des défauts, il avise que les stations de lavage font une nouvelle codification.
« On débute alors la phase de déparchage », communique-t-il. M.Muheto révèle qu’à la station de lavage, le gradage se fait par l’eau. Ce qui n’est pas le cas pour la phase de déparchage où cela se fait par tamis. « Le grade supérieur obtenu est le café Fully Washed FW15 avec le maximum de défauts de 6 %, le café Fully Washed TT avec le maximum de défauts de 35 %, le café Fully Washed T avec le maximum de défauts de 40 % et le Fully Washed stock lot (rejets) », relate-t-il.
Après les analyses au laboratoire, articule M. Muheto, les échantillons sont amenés à l’ARFIC pour confirmation de grades. C’est celle qui octroie le bulletin de taxation et le café pourra être commercialisé. Même lorsqu’il existe un contrat entre un acheteur et un vendeur, un certificat de qualité officiel est délivré par l’ARFIC.
Le café vert n’est pas conservable. Les grains de café passent le déparchage qui se fait dans un laps temps. Ils sont libérés de leur enveloppe pour produire le café vert. C’est celui-ci qui peut être commercialisé.
Le café vert est finalement calibré et trié selon la taille de ses grains, les grains les plus denses ayant une meilleure qualité. En fonction de la voie de transformation choisie, on parlera de café vert nature (washed) ou de café vert lavé (fully washed).