Sur la colline Mparambo I, dans la commune Rugombo de la province Cibitoke, l’accès à l’eau potable relève du parcours du combattant. Faute de robinets fonctionnels, les habitants n’ont d’autres choix que de puiser l’eau de la rivière Nyakagunda pourtant fortement polluée. Une situation alarmante que la population endure au quotidien, entre résignation et appels pressants aux autorités.
Cette eau est puisée pour être utilisée non seulement pour les travaux ménagers, mais aussi, pour certains, comme une eau à boire.
Jeudi 15 mai 2025, il est presque de 17h lorsque nous arrivons sur la colline Mparambo I située dans la commune Rugombo, province de Cibitoke. A cette heure, les derniers rayons du soleil caressent le paysage avec douceur comme pour adoucir un quotidien marqué par la précarité. A l’Ouest, l’astre du jour s’incline pas à pas derrière les montagnes de la République Démocratique du Congo (RDC) offrant une lumière peu chaude et dorée à cette région frontalière.
Sur cette colline de Mparambo I densément peuplée, les maisons s’entassent les unes sur les autres, affichant une image d’un bidonville en pleine expansion. La circulation est fluide : les motos pétaradent, les vélos slaloment entre les passants et la vie suit son cours. Les femmes et les enfants, portant des bidons jaunes ou des seaux, circulent sans relâche, une scène d’une banalité inouïe mais lourde de sens. Ici, la quête de l’eau rythme les journées. C’est un besoin vital qui, pourtant, demeure un luxe inaccessible pour beaucoup.
Le décor, en apparence tranquille, cache une réalité alarmante. Cette communauté souffre d’un manque criant d’eau potable. Les quelques ménages disposant de robinets sont confrontés à des coupures d’eau prolongées : plusieurs semaines voire des mois sans une goutte d’eau. Quant aux robinets publics, ils sont quasiment inexistants. Ceux qui ont les moyens achètent l’eau dans d’autres localités à des prix variant entre 1 000 et 2 000 francs burundais (BIF) le bidon. Une solution que beaucoup ne peuvent pas se permettre.
L’eau de la rivière Nyakagunda, une alternative
Face à cette pénurie permanente d’eau potable, la majorité de la population de cette localité se tourne vers la rivière Nyakagunda qui serpente dans la vallée à proximité. Ce cours d’eau, pourtant visiblement pollué, est devenu la bouée de secours des habitants. Ils y puisent l’eau pour cuisiner, se laver, faire la vaisselle… et même boire. Pourtant, l’état de cette eau inquiète au premier regard. Elle est troublée, brunâtre, charriant probablement toutes sortes d’impuretés. En amont, les enfants s’y baignent bruyamment et, à quelques mètres, des chèvres broutent sur la berge. En aval, d’autres personnes s’y activent, remplissant leurs récipients d’une eau déjà polluée.
Laver les habits avec l’eau souillée de la rivière Nyakagunda est le moindre des usages qu’en font les habitants de la colline Mparambo I.
« L’eau de Nyakagunda est sale, mais elle nous est essentielle », indique Jacqueline Ndikumana, une femme rencontrée en train de faire la lessive au bord de cette rivière. Elle explique : « On s’en sert pour tout ; par exemple la cuisine, le ménage, la vaisselle et même pour boire. Nous n’avons pas d’autre choix. » D’un ton résigné, elle ajoute : « Aujourd’hui, nous nous y sommes habitués. Nous avons cessé de craindre les maladies que cette eau peut causer. Ce qui compte, c’est de calmer notre soif. » Derrière ses mots se dessine une détresse silencieuse, une résignation face à un problème qui dure des années.
Alidacienne Munezero, une élève de l’école secondaire des environs partage son désarroi. Elle affirme que cette eau abîme ses vêtements, surtout ses uniformes scolaires. « Quand je lave mes chemises blanches avec l’eau de Nyakagunda, elles ne deviennent jamais vraiment propres. Elles restent plus ou moins jaunâtres et les porter devient gênant. »
Paradoxalement, la pluie, souvent synonyme de tracas ailleurs, est ici perçue comme une bénédiction. Dès les premières gouttes, les habitants se précipitent pour récupérer l’eau tombée du ciel sur les toits de leurs maisons. Ils la conservent précieusement pour l’utiliser pendant deux ou trois jours avant de retourner, malgré eux, puiser l’eau de la rivière Nyakagunda.
Que les autorités interviennent
Dans ce contexte, les appels à l’aide se multiplient. Les habitants de Mparambo I exhortent les autorités à intervenir. Ils réclament la construction des infrastructures d’approvisionnement en eau potable, soulignant que l’accès à cette ressource est un droit fondamental. Ils interpellent aussi les futurs élus, à l’approche des échéances électorales, espérant que leur cri sera enfin entendu. Ils souhaitent que les futurs conseillers communaux, les députés, les sénateurs,… prennent ce problème à bras-le-corps. Une solution durable est plus que nécessaire pour raffermir la santé et la dignité des citoyens.
Tous ceux qui se sont exprimés sur le micro de Burundi Eco affichent un air résilient. Ils expliquent qu’à Mparambo I, la vie continue, portée par le courage d’une population qui refuse de baisser les bras. Mais tant que l’eau potable restera un luxe, tant que les enfants devront apprendre à vivre avec des maladies évitables, tant que la rivière Nyakagunda restera son unique recours, cette population restera exposée, vulnérable, oubliée. Le défi de l’eau à Mparambo I est plus qu’un simple manque d’infrastructures : c’est une urgence sociale, sanitaire et humaine.
Nous avons essayé de contacter l’administrateur communal de Rugombo pour une éventuelle réaction, mais en vain.