Des voix s’élèvent pour dénoncer les irrégularités notoires dans le système d’octroi des bourses d’études. Les sénateurs trouvent que les critères de sélection ne sont pas du tout objectifs. Ils recommandent au ministère chargé de l’Éducation de privilégier l’excellence pour envoyer les meilleurs lauréats poursuivre leurs études à l’etranger. Cela dans le but d’avoir de bons profils sur le marché du travail
Chaque année, le gouvernement du Burundi reçoit des bourses d’études de la part de ses pays amis et partenaires par l’intermédiaire du ministère des affaires étrangères et du ministère de l’Education Nationale et de la Recherche Scientifique. Lors d’une séance de questions orales de ce 21 janvier 2025 adressées au ministre de l’Education et de la Recherche scientifique, la question du processus d’octroi des bourses a alimenté les débats. Pas mal de sénateurs émettent des doutes sur l’opacité autour de la sélection des boursiers. Ils dénoncent l’attitude de favoritisme de l’une ou l’autre catégorie d’étudiants sous prétexte de respecter les quotas au lieu de privilégier les élèves mieux classés dans l’examen d’Etat.
A ce sujet, Emmanuel Sinzohagera, président du Sénat a vivement critiqué les agissements du ministère de l’Education. « Nous n’avons pas besoin de lauréats médiocres dans ce pays. Envoyez des étudiants intelligents qui vont contribuer réellement au développement du pays. Il faut mettre de côté le favoritisme lors de l’attribution des bourses mais plutôt se baser sur les résultats pour choisir les meilleurs parmi les meilleurs». Pour lui, le statut socio-économique du lauréat importe peu si réellement on veut promouvoir la qualité de l’éducation. Il encourage le ministre de l’Éducation à revisiter les critères de sélection des étudiants boursiers pour que chaque enfant burundais, peu importe sa provenance ait la même chance d’étudier a l’etrannger pourvu qu’il mérite.
Privilégier l’excellence dans le choix des candidats
« Si nous voulons un Burundi émergent et développé, il est crucial de faire des choix basés sur les compétences et non sur des critères subjectifs. Logiquement, les élèves ayant de bonnes notes restent prioritaires pour poursuivre leurs études à l’étranger indépendamment d’autres considérations. Par contre, ceux qui n’ont pas de bonnes notes n’ont qu’à s’ inscrire dans les universités locales. », a précisé M. Sinzohagera. Selon lui, il est impératif de privilégier la méritocratie et non les considérations sociales ou géographiques dans le processus de sélection.
De son côté, le ministre François Havyarimana a souligné l’importance d’un équilibre sur le plan spatial. Il argue que toutes les provinces doivent être représentées compte tenu de la note d’excellence. Cela pour garantir que les élèves envoyés ne soient pas sous-performants et ne viennent pas compliquer la situation. « Nous envoyons des lauréats capables et non pas des élèves peu préparés », rétorque-t-il.
Les lauréats n’évoluent pas dans les mêmes conditions
« Si nous nous considérons uniquement les notes obtenues, scientifiquement parlant cela reste valable.. Cependant, le problème est que le gouvernement n’est pas en mesure d’associer les meilleures conditions d’apprentissage pour tous les élèves. », a souligné M. Havyarimana.
Selon le ministre, les élèves n’évoluent pas dans les mêmes conditions. Pour étayer ces propos, il évoque un cas des élèves citadins et de la campagne ayant un potentiel et des connaissances similaires, mais dont les conditions d’apprentissage ne sont pas les mêmes. « Il arrive qu’un élève de l’intérieur du pays obtienne un score faible et un autre qui obtient un bon score. Si vous les placez dans les mêmes conditions, vous pourriez être surpris de constater que celui qui semblait avoir obtenu un résultat moins bon réussit mieux », a-t-il expliqué.
Pour lui, un élève du lycée de Cendajuru en province de Cankuzo qui obtient 70 % est plus performant qu’un autre lauréat d’une école mieux équipée mais qui obtient 75 %. Le premier mérite quand même une reconnaissance, car s’il étudiait dans un établissement mieux équipé, ses résultats pourraient dépasser ceux de l’élève ayant 80 % dans de meilleures conditions.
Chômage des boursiers de retour au Burundi
Le président du Sénat a exprimé sa préoccupation face à la situation de certains boursiers qui ont du mal à décrocher un emploi de retour au pays. Il a notamment cité le cas des médecins ou d’autres lauréats des instituts sanitaires formés a l’etranger qui n’arrivent pas à percer sur le marché du travail.
En réponse, le ministre a expliqué que son ministère envoie des étudiants à l’étranger en tenant compte des besoins spécifiques des départements les plus cruciaux. « Au retour, nous ne sommes pas les seuls à pouvoir leur offrir un emploi, car nous avons la responsabilité de former des professionnels destinés à travailler dans divers ministères et secteurs qu’ils soient publics ou privés », a-t-il précisé.
En outre, le ministre Havyarimana a souligné que la question du chômage des diplômés est complexe et multifactorielle. « Ce problème ne se limite pas uniquement au secteur de l’éducation, il touche également d’autres domaines et dépend de la situation économique du pays.
Cependant, nous ne pouvons pas arrêter de former les lauréats, car leurs compétences sont indispensables au développement du pays », a-t-il conclu.