La culture des champignons a été identifiée comme un secteur potentiel offrant divers avantages en ce qui est de la nutrition et de la sécurité alimentaire et participe à l’amélioration des moyens de subsistance par la diversification des revenus et la création de l’emplois. Au Burundi, les champignons sont encore des produits ignorés et les agriculteurs adoptent cette culture progressivement
Le projet champignon a été créé à l’Université du Burundi en 1994 avec la collaboration de l’université de Gand en Belgique pour des fins de recherche. Des recherches ont été menées sur plusieurs espèces de champignons, mais les plus répandues au Burundi appartiennent au genre Pleurotus. Vincent Nteziryayo, enseignant et chercheur à la Faculté d’Agronomie et de Bio-Ingénierie (FABI) indique que pas mal de variétés (souches) des champignons ont fait l’objet d’essais sur divers substrats locaux dans cette faculté. Il précise que la culture des champignons a été vulgarisée en milieu rural dans plusieurs provinces du pays. Mais elle s’est heurtée à certaines contraintes comme les conditions climatiques qui ne sont pas favorables à certaines souches exotiques. La solution a été de faire des essais d’adaptabilité de diverses variétés et de les diffuser compte tenu de leur réponse aux conditions éco-climatiques du pays. Il précise que la production est estimée entre 120 et 150 tonnes par hectare. Cela résulte des bonnes conditions climatiques. A côté des souches exotiques, des essais de domestication des champignons sont aussi en cours au sein de cette faculté.
Le rendement est plus théorique que pratique
Nteziryayo indique que le rendement théorique des champignons est de l’ordre de 200 tonnes par hectare. Ce rendement théorique n’est cependant pas atteint dans les conditions de terrain, car les conditions de travail des producteurs sur terrain diffèrent énormément de celles observées dans les laboratoires d’essais, confie Nteziryayo.
Vincent Nteziryayo, enseignant et chercheur à la Faculté d’Agronomie et de Bio-Ingénierie (FABI) indique que le champignon est produit à petite échelle suite aux contraintes climatiques.
Il indique également que la culture des champignons s’effectue pendant toutes les saisons, mais que la saison pluvieuse est la mieux indiquée pour des rendements élevés. Il note par exemple qu’il y a des souches qu’ils ont déjà diffusées dans certaines provinces comme Rutana, Bururi, Gitega et Muramvya, Muyinga et Cankuzo à travers les ONG comme World Vision Burundi, COPED, etc… Il précise encore que sur le terrain, la production est moins satisfaisante comparativement au rendement obtenu dans les laboratoires d’essais du fait que les producteurs de terrain n’observent pas rigoureusement les conditions de travail requises.
Quid du délaissement de la culture des champignons ?
La culture des champignons est trop exigeante. Elle demande plus d’attention pour avoir de bons rendements. Vincent Nteziryayo précise que la population cultive les champignons sur base des formations organisées en collaboration avec certaines ONG. Les premières récoltes après les formations reçues sont bonnes mais, après le départ des formateurs très peu ou pas de personnes peuvent perpétuer cette activité car il leur est difficile de cultiver les champignons en respectant les conditions exigées, notamment les règles d’hygiène. A titre d’illustration, il indique qu’après la formation d’une vingtaine de personnes sur une colline donnée, environ deux à cinq personnes peuvent perpétuer l’activité
La production reste encore à désirer
Selon Vincent Nteziryayo, les matériels qui doivent être utilisés pour fertiliser cette culture ne sont pas à la portée des cultivateurs de champignons. Si la population délaisse la culture des champignons, il y a plusieurs raisons à cela. La technique est exigeante en matériels de fertilisaton. Il est difficile par exemple à la population burundaise de s’acheter des sachets résistant à la chaleur et des fûts. Le coût d’un fût est estimé à 70000 FBu et il faut ajouter les coûts supplémentaires de déplacement jusqu’au site de production. L’hygiène doit etre très rigoureuse : moindre erreur, la récolte peut être réduite à zéro. Il suffit qu’une contamination s’introduise dans le substrat pour enregistrer des dégâts énormes. Cela rend les agriculteurs méfiants et les pousse à ne plus s’intéresser à cette culture. Un agriculteur n’aura plus le courage d’investir dans cette culture après avoir enregistré des pertes énormes au premier essai. Il décide alors d’abandonner. L’inaccessibilité aux semences est la plus importante des difficultés que rencontrent les producteurs. Vincent Nteziryayo précise qu’il n’y a que deux centres de production et d’approvisionnement en semences. Il cite la Faculté d’Agronomie et de Bio-Ingénierie (FABI) et le centre de Kibimba en commune Giheta.Cela constitue un handicap pour la vulgarisation de cette culture, car tous les agriculteurs désireux de cultiver les champignons doivent se rendre à la FABI ou au centre de Kibimba pour s’approvisionner en semences. Les résultats restent encore à désirer. Cependant, Vincent Nteziryayo reste convaincu que si la population s’intéresse à la culture des champignons en observant rigoureusement les conditions exigées, les récoltes pourront être bonnes et cela permettra de satisfaire les demandes sans cesse croissantes des champignons et d’ assurer la sécurité alimentaire et nutritionnelle de la population.