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Facture standardisée : Certains commerçants restent réticents à son utilisation

Trois ans après  l’initiation de la facture standardisée par  l’Office Burundais des Recettes, son utilisation par les commerçants ou les prestataires de services reste problématique. Au marché Bujumbura City Market dit «Chez Sion», pas mal de commerçants ne l’utilisent pas. Certains possèdent deux facturiers parallèles

L’Office Burundais des Recettes (OBR) a initié l’utilisation d’une facture standardisée en conformité avec la loi des finances, exercice 2018-2019. Tous les commerçants et prestataires de services, petits comme grands doivent délivrer une facture en cas de vente ou de prestation de service comme le précise l’article 81 de la loi des finances, exercice 2020-2021. Pourtant, les commerçants du marché Bujumbura City Market, dit Chez Sion restent réticents à l’utilisation d’une facture conforme au modèle initié par l’Administration Fiscale.

Ce lundi 08 fevrier 2021, un reporter de Burundi Eco a fait un tour au marché Bujumbura City Market pour s’enquérir de l’utilisation de la facture modèle initiée par l’OBR. Une commerçante qui a requis l’anonymat vend des matériels électriques et électroniques. Elle vient de vendre des plaques solaires et leurs batteries. Elle détient deux facturiers.  L’une conforme au modèle initié par l’Administration Fiscale et l’autre non conforme. Elle vient de facturer ses clients avec cette dernière. A  notre grande surprise, elle conserve tous ces facturiers avant d’affirmer qu’elle utilise celle standardisée. Après avoir découvert que nous sommes des journalistes, elle refuse de répondre. « C’est mon boss qui devrait répondre à des questions et il n’est pas disponible ».

L’OBR est à l’oeuvre pour faire face à la non-délivrance de la facture standardisée.

Certains clients n’exigent pas de la facture

A l’intérieur du marché, J. N vient de vendre des insecticides d’une valeur de 6000 FBu à un client. Elle ne lui a pas délivré une facture. A la question de savoir si elle n’utilise pas des factures standardisées, J. N répond que c’est son patron (qui est dans une autre échoppe parallèle) qui conserve les facturiers. Elle ajoute qu’elle ne délivre la facture qui si et seulement si un client l’exige.

Une autre jeune femme, la vingtaine, a une échoppe remplie de produits cosmétiques.  Elle ne délivre pas de facture. «Les factures sont délivrées par les commerçants qui vendent de grandes quantités», lâche-t-elle. Pour les marchands des fruits et légumes basés dans les hangars, on dirait que ce n’est pas leur affaire. Un bon nombre d’entre eux ne savent ni lire ni écrire. Les factures standardisées sont pour les commerçants qui ont des magasins, qui vendent de grosses quantités.

Y. M vend différents articles dans une échoppe. Il travaille pour son patron. Celui-ci possède 5 échoppes dans ce marché. Les facturiers se trouvent chez son boss. Il affirme que même les clients ne demandent pas de factures. Ils achètent, puis ils s’en vont. Y. M révèle qu’un mois peut passer sans qu’il ne délivre une facture. Selon lui, la variabilité des prix des mêmes produits fait que les commerçants ne délivrent pas des factures standardisées. Ils vendent les mêmes produits à différents prix. «Il ne serait pas possible que je délivre une facture différente de celle de mon voisin. Mais si un client me demande la facture, je l’amène chez mon patron, puis je la lui délivre ». Selon lui, ce sont des personnes travaillant pour des organisations qui demandent les factures parce qu’ils sont astreints à donner des rapports. Egalement ceux qui viennent de l’intérieur du pays. Et surtout pour la seule raison qu’ils passent sur des checks points  où il y a des policiers, explique Y. M.

Un autre vendeur, (un jeune homme) qui vend des produits vestimentaires (habits et chaussures)  affirme qu’il n’a jamais délivré des factures à ses clients après la vente de ses produits. N. G est une femme qui vend des pagnes importés. Ils sont étiquetés par l’OBR. Selon elle, la facture standardisée est délivrée aux clients qui achètent plus de 5 pagnes. Je ne peux pas délivrer une facture à un client qui achète un pagne.

L’OBR à l’œuvre pour faire face à ce défi

Stany Ngendakumana, directeur de la communication et des services au contribuable à l’OBR indique que cette institution est à l’œuvre pour solutionner cette question. Des vérifications systématiques sont faites dans différentes localités du pays. «  Après vérification par les structures habilitées, nous constatons que la facture modèle agréée par l’OBR n’est pas systématiquement utilisée par les commerçants », affirme M. Ngendakumana. Et de préciser qu’ils sont à l’œuvre pour faire respecter la délivrance (l’utilisation) par les commerçants ou les prestataires de services de la facture standardisée.  Selon lui, cette facture permet de faciliter les contrôles fiscaux et que tous les contribuables s’acquittent de leur devoir de citoyen en payant les impôts et taxes.

Au marché Bujumbura City Market, pas mal de commerçants ne délivrent pas la facture standardisée.

Plus de sensibilisations que de sanctions

Des sanctions sont prévues pour les commerçants qui ne délivrent pas la facture standardisée.  L’article 71 de la loi budgétaire, exercice 2020-2021, stipule que tout commerçant ou prestataire de services qui effectue une livraison sans délivrer une facture conforme au modèle initié par l’administration fiscale est passible d’une amende de 20% de la valeur des biens livrés.  Toutefois, Stany Ngendakumana informe que l’OBR privilégie la sensibilisation. Cela, afin que les commerçants puissent changer de mentalité. «C’est en grande partie notre priorité».

Vers une facturation électronique ?

Le Directeur de la communication au sein de l’OBR informe que bientôt les commerçants ou les prestataires de services pourront procéder à la facturation électronique. La nouvelle loi sur les procédures fiscales et non fiscales dont les textes d’application sont attendus,  exige à tous les contribuables de devoir utiliser une facturation électronique. Stany Ngendakumana est confiant que cette exigence va résoudre le problème lié à la non utilisation de la facture modèle agréée par l’OBR. Cela va s’améliorer, indique-t-il. La facturation électronique va débuter avec les grands contribuables qui doivent facturer la TVA, c’est-à-dire ceux qui ont un chiffre d’affaires de 100 millions de FBu et plus. Pour les petits contribuables, ça fera progressivement, précise M. Ngendakumana.

Des difficultés pour les commerçants qui ne savent pas lire et écrire

Certains petits commerçants évoquent des difficultés dans l’utilisation de la facture  standardisée du fait qu’ils ne sont pas capables de lire et écrire. A ces derniers, Stany Ngendakumana recommande de se faire aider par les personnes qui savent lire et écrire. Il y a des jeunes scolarisés qui sont à la recherche de l’emploi. Nous leur suggérons d’employer des comptables. Ils doivent embaucher des experts en la matière et payer leurs services.

Initiée en 2017 par l’Administration Fiscale, la facture standardisée porte des mentions d’identification à la fois de l’acheteur comme du vendeur, assujetti ou non à la TVA.

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