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Gatumba et Rukaramu : Les inondations sèment la terreur

Le débordement des eaux de la rivière Rusizi remue le couteau dans la plaie des habitants de certains quartiers des zones Gatumba et Rukaramu.  Des eaux boueuses ont envahi ces quartiers. Par conséquent, pas mal d’infrastructures publiques et privées ont été détruites. Les victimes crient au secours. Les détails dans ce numéro.

Pendant la semaine du 07 janvier 2021, le débordement des eaux de la rivière Rusizi  a fait des ravages dans les zones de Gatumba et Rukaramu de la commune Mutimbuzi en province de Bujumbura. Dans une visite effectuée à Gatumba par un reporter de Burundi Eco mercredi le 27 janvier 2021, il a été constaté que les infrastructures tant publiques que privées ont été détruites. D’autres sont au bord du gouffre suite aux inondations issues du débordement des eaux de la rivière Rusizi. Ce sont notamment l’école fondamentale Mushasha I et II, l’hôpital de Gatumba et d’autres. A l’Ecole Fondamentale Mushasha I et II, des eaux boueuses stagnent dans la cour de cette école. Ce n’est pas facile d’accéder à certains locaux.  Des sacs de sable et de gravier sont rangés  les uns après les autres  pour dégager le passage.

L’Ecole Fondamentale Mushasha I et II menacée par les inondations suite au débordement des eaux de la rivière Rusizi.

Onésime Ndayishimiye, maître responsable à cette école s’inquiète du fait que ces infrastructures publiques sont menacées par le débordement de la rivière Rusizi. Selon lui, les récentes inondations viennent de remuer le couteau dans la plaie des responsables de cette école, des enseignants, des élèves et de leurs parents du fait que cette école a subi le même sort ces derniers jours.  Selon la directrice de l’ECOFO Mushasha I, cette école a été obligée de suspendre les activités  scolaires pendant plus de deux mois.  Par conséquent, l’école a eu un mauvais rendement puisqu’elle a été classée dernière dans la direction communale de l’enseignement de Mutimbuzi au test de certification et d’orientation de la 9ème année, édition 2019 -2020.

Des crocodiles et des hippopotames rôdent autour de l’école et dans les ménages

Selon toujours la directrice de cette école, des crocodiles et des hippopotames rôdent autour de l’école et dans les ménages. On  craint que ces animaux puissent emporter la vie des éduqués ou des éducateurs. Raison pour laquelle cette enseignante demande l’aménagement des digues et le curage de la rivière Rusizi afin de limiter les dégâts.

Les habitants lancent un cri d’alarme

Alexis Manirakiza habitant le quartier Mushasha I lance un cri d’alarme. Sa maison est encerclée par les eaux boueuses. Pour arriver chez lui, il doit enlever les chaussures et plier son pantalon vers le haut  pour patauger dans l’eau et accéder à sa maison. Il s’inquiète du fait que sa maison ne va pas échapper à l’effondrement. Selon lui, le futur des habitants des quartiers Mushasha I et II ainsi que Gaharawe menacés par les inondations est incertain.

Le quartier Kajaga n’est pas épargné

Le même calvaire s’observe dans le quartier Kajaga de la zone Rukaramu, commune Mutimbuzi et province Bujumbura. Si tu longes la Route Nationale nº 4 (RN4) du côté de Kajaga, tu vois de belles infrastructures. On se dit que c’est un quartier résilient, là où la vie est belle. Néanmoins, c’est tout à fait le contraire. Dernière ces maisons, à presque 30 m, la situation est déplorable. Les eaux boueuses ont assiégé les maisons construites à cet endroit. La plupart des avenues sont inaccessibles. Pour se déplacer, on est obligé de patauger dans des eaux stagnantes.

Le même calvaire s’observe dans le quartier Kajaga de la zone Rukaramu, commune Mutimbuzi en province Bujumbura.

Mme Suavis Nirera rencontrée à cet endroit lance un cri d’alarme. «Nos maisons sont menacées par les inondations suite au  débordement des eaux de la rivière Ruzizi. Nous sommes dans le désarroi. Certains habitants ont vidé les lieux suite à cette catastrophe pour aller s’installer ailleurs. D’autres sont obligés de tenir tête, car ils n’ont pas où aller suite au manque de moyens financiers», déplore Nirera.  Ils ont contracté des crédits auprès des banques et établissements financiers pour construire ces maisons. C’est un investissement englouti.

 Un aménagement du territoire déficitaire

Selon les propos relayés par le journal en ligne Ejoheza news, Jean Marie Sabushimike, professeur d’université et expert environnementaliste rappelle que ces inondations sont répétitives depuis 2016. Pour lui, ces dernières sont dues au changement climatique qui en est un facteur déclenchant mais, il ajoute un facteur aggravant qui est un aménagement du territoire déficitaire auquel il ajoute la faiblesse du cadre  institutionnel et légal, l’absence de la culture du risque et la pauvreté qui hante la communauté vivant dans cette localité. Il déplore que les canaux construits à l’époque belge et qui régulaient les inondations de la rivière Rusizi aient été détruits par les habitations construites au dessus d’eux. « Le mauvais aménagement du territoire vient aggraver les choses », fait-il remarquer.

 Un plan d’urgence s’impose comme piste de solution 

Selon Sabushimike, la solution la plus urgente serait de faire relocaliser les personnes fortement exposées aux inondations car, explique-t-il, ce n’est pas la destruction des infrastructures publiques et privées seulement, c’est aussi la santé de la population qui est menacée. Et d’inviter les décideurs à oser prendre cette mesure s’il veut protéger la population. D’après lui, le curage de la rivière Rusizi risque d’aggraver la situation si on le fait comme on l’a fait ailleurs. L’urgence serait de remettre en état les anciens canaux de régulation des eaux de la rivière Rusizi. Selon lui, le gouvernement devrait penser à un plan d’urgence qui serait un outil efficace pour la prévention et la gestion des catastrophes en cas de crise. Cette dernière éviterait les improvisations et la panique chaque fois qu’il y a des cas de catastrophes pareilles.

Les quartiers Mushasha I et II inondés.

Des actions urgentes à mener

Face à cette situation, CP Anicet Nibaruta, directeur général adjoint de la protection civile et secrétaire général de la plateforme nationale de réduction et de gestion des catastrophes  rappelle qu’on compte délocaliser les victimes habitant le site temporaire de Kigaramango vers le site de Maramvya SOBEL. « Aussi, à travers le ministère des Relations Extérieures et de la Coopération au Développement, nous comptons rencontrer les autorités congolaises afin de discuter de la réouverture de la Rusizi I et qui, jadis servait à l’irrigation des palmiers à l’huile se trouvant à Kiriba Hondes et qui, pour le moment, est fermé et dont les eaux retournent au Burundi ». Pour le curage de la rivière Rusizi II et l’aménagement des digues sur cette dernière, CP Nibaruta indique que ce sont des actions qui demandent des moyens énormes et dont la mise en œuvre nécessite une étude approfondie. Cependant, les experts environnementalistes et géographes conseillent l’élaboration d’un plan d’urgence et la délocalisation de la population des zones jugées à haut risque vers des zones sûres et habitables.

Notons que c’est la deuxième fois que la zone Gatumba est assiégée par les inondations causées par le débordement des eaux de la rivière Rusizi associé à la montée des eaux du lac Tanganyika. Il rappelle que pendant les derniers mois de l’année 2020, la population de la zone Gatumba a été victime des inondations liées au débordement des eaux de la rivière Rusizi associée à la montée des eaux du lac Tanganyika.  Les victimes ont été  rapidement délocalisées. Elles ont été installées dans quatre sites. Le 1er site est  Maramvya Sobel où étaient installés 572 ménages avec une population de 2850 personnes dont 1309 de sexe masculin et 1581 de sexe féminin. Le 2ème site est Kinyinya II qui comptait 2525 ménages avec une population de 13 635 personnes dont 6409 de sexe masculin et 7226 de sexe féminin. Le 3ème site est Kigaramango où étaient installés 1314 ménages avec une population de 6766 personnes dont 2921 de sexe masculin et 3845 de sexe féminin. Le 4ème site est Maramvya Kigwati-Mafubo où étaient installés seulement 133 ménages avec une population de 746 personnes dont 362 hommes et 384 femmes.  Au total, on a dénombré 4544 ménages sinistrés avec une population de 24 034 personnes dont 11 001 de sexe masculin et 13 036 de sexe féminin victimes des inondations de Gatumba.

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