Dans une visite de 3 jours effectuée au Burundi depuis le 21 mai 2022, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, Président de la République Démocratique du Congo (RDC) a déclaré venir s’enquérir de ce qui se fait en agriculture au Burundi. Les Burundais ont exporté la houe en RDC dès le début du 19ème siècle de peur de payer l’impôt de capitation, profitant des liens de parenté ou à la recherche de l’emploi
Les domaines agricoles visités par Félix-Antoine Tshisekedi, président de la RDC sont la ferme de Bugendana dans la province de Gitega, la ferme de Buringa dans la province de Bubanza et l’Institut de Recherche Agronomique et Zootechnique (IRAZ). En dormance, ce dernier a été initié comme une institution spécialisée de la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL), une organisation sous-régionale regroupant le Burundi, la RDC et le Rwanda.
Les relations entre le Burundi et la RDC dans le secteur agricole, surtout officieusement, datent de longtemps. Selon nos confrères Congolais, certains Burundais qui pratiquent l’agriculture de l’autre côté de la Ruzizi ont des parentés dans cette plaine habitée par différentes tribus, dont ceux des Burundais.
Ils soulignent que les habitants de la province Cibitoke à l’Ouest du Burundi ont des troupeaux dans une chefferie de l’Est de la RDC dirigée par un roi qui a des racines au Burundi.
Servir comme main d’œuvre
Nos sources font remarquer que les Burundais traversent la Ruzizi pour la RDC et servent comme main-d’œuvre dans les champs des Congolais. Ils estiment les conditions de vie disproportionnées avec celles qu’ils mènent au Burundi, un accès facile au travail, notamment dans les champs et dans l’artisanat (maçonnerie)… dont le rendement financier est plus élevé que celui du pays d’origine (paiement en dollars).
Pour leur hospitalité, ces populations s’intègrent facilement en se mariant avec des filles locales. Des raisons liées à l’élevage, aux pâturages ou à la transhumance pourraient suivre.
Selon Tharcisse Nsabimana dans le « Contrôle de la main-d’œuvre au Burundi (fin du XIXème siècle) », pendant la colonisation allemande, avec le programme de lutte contre la maladie du sommeil, une importante main-d’œuvre était recherchée pour débroussailler les plaines du lac Tanganyika et la vallée de la Ruzizi.
« L’impôt de capitation devint rapidement un autre moyen de mobiliser une main-d’œuvre nombreuse pour des activités autres que la production vivrière », précise M.Nsabimana.
Et de poursuivre : « Avec la colonisation belge, la mobilisation et le recrutement de la main-d’œuvre devint un élément important de la politique économique. Entre 1920 et 1930, la main-d’œuvre du Ruanda-Urundi était recrutée pour les compagnies exploitant les mines du Katanga, ainsi que pour les plantations et les mines de l’Est du Congo belge ».
Ruzizi, la plaine qui attire par ses terres
D’après irenees.net, les rivalités économiques et foncières entre les Bafulero (RDC) et les Burundais dans la plaine de la Ruzizi remontent à l’époque coloniale.
Lorsque les Burundais se sont installés dans la plaine, ils servaient uniquement de réserve de classe pour les Bafulero et étaient largement délaissés du fait de la présence endémique de la malaria. « Les Bafulero considèrent toujours les premiers Burundais comme des voleurs de bétail qui avaient traversé la rivière Ruzizi pour échapper au Roi Ntare Rugamba du Burundi », lit-on dans irenees.net.
Ce conflit sur les droits de pâturages et d’occupation des terres s’est étendu aux autres ressources de la plaine de la Ruzizi au fur et à mesure de son développement. Dans cette région comme ailleurs en Afrique, la terre est un marqueur clé de l’identité collective mais aussi une source de revenus essentielle.
Notons que des Burundais continuent à partir de Gihanga, de Cibitoke ou de Rumonge vers la RDC pour travailler, soit comme ouvriers agricoles pour les Congolais ou comme locataires de terrains des Congolais. Cependant, ces derniers vendent la récolte en RDC ou l’amènent partiellement au Burundi.