Dans une visite organisée par l’IFDC en collaboration avec la société SETRACO dans les provinces de Bururi, Rutana, Makamba, Karusi et Cibitoke du 17 au 20 mars 2025, les multiplicateurs des semences de maïs hybride au niveau local demandent à l’Etat de subventionner ces semences comme il le fait pour les semences importées pour que le prix de ces dernières soit unique et abordable au niveau national. Pour ces derniers, la promotion de l’utilisation des semences locales devrait d’ailleurs être une priorité. Ces multiplicateurs des semences sont appuyés par le projet PSSD2 de l’IFDC sous l’appui financier de l’Ambassade des Pays Bas au Burundi
C’est le cas de l’Abbé Révérien Manirambona, curé de la paroisse Gatonde située dans la commune Nyabikere en province de Karusi. Il fait remarquer que la paroisse qu’il chapeaute s’est lancée dans la multiplication des semences de maïs hybride il y a de cela quelques années. Les semences ont été offertes par la société SETRACO.
Avec l’appui des techniciens dans le secteur agricole, Manirambona affirme que le rendement généré par les semences de maïs hybride est bon par rapport à celui de maïs composite. Avant l’année dernière, il indique que cette paroisse a produit plus de 3 tonnes et 4 tonnes 600 kg de maïs hybride de type V 3 l’année dernière sur un hectare et demi.
Abbé Révérien Manirambona, curé de la paroisse Gatonde située dans la commune Nyabikere en province de Karusi.
Pourtant, il déplore que toute cette quantité n’a pas été écoulée suite à la subvention des semences de maïs hybride importées par l’Etat. Cela a fait que les semences importées s’achètent à 4000 FBu le kilo quand les semences locales s’achètent à 12000 FBu le kilo. Et les agriculteurs ont vite acheté celles qui sont moins chères.
Une mévente de plus de 2 tonnes de semences de maïs hybride à la paroisse Gatonde
Selon Manirambona, cela a fait que la paroisse Gatonde enregistre une mévente de 2 tonnes 280 kg de ces semences. Malgré cette situation, il fait savoir que cette quantité a été bien conservée en attendant qu’elle soit écoulée cette année.
Il ajoute aussi que cette paroisse reste encore à l’œuvre dans la production des semences de maïs hybride pour servir les agriculteurs de ses environs. Actuellement, les superficies réservées à cette culture sont estimées à 4,5 hectares.
Il informe que ces semences ont été bien appréciées par la population et demande à l’Etat et à ses partenaires d’appuyer cette paroisse pour qu’elle parvienne à pratiquer l’irrigation et à construire un hangar qui remplit les normes.
Les semences locales de maïs hybride génèrent un bon rendement
Dr Astère Ndayizeye abonde dans le même sens. Il fait savoir que cela fait 4 ans qu’il s’est lancé dans la multiplication des semences de maïs hybride. Selon lui, ces semences génèrent de bons rendements si on respecte les bonnes pratiques agricoles par rapport à celles du maïs composite.
Sur 6 ares, on peut récolter 800 kg, argue Ndayizeye. Et de souligner qu’il a récolté plus de 12 tonnes sur 6 hectares l’année dernière. Il précise que c’est la raison pour laquelle, ces semences sont beaucoup appréciées par la population.
Quid des défis ?
Pourtant, Ndayizeye indique que les multiplicateurs de ces semences sont confrontés à moult défis. Il cite entre autres les aléas climatiques, la cherté de la main d’œuvre, le retard dans l’approvisionnement des fertilisants, l’insuffisance des surfaces agricoles, etc.
Il demande alors à l’Etat de soutenir les producteurs de ces semences au niveau local avant de penser à l’importation pour éviter qu’il y ait des pertes liées à la mévente. Selon lui, l’Etat devrait prioriser l’achat des semences produites au niveau local avant de penser à l’importation de ces dernières.
Lieutenant-colonel Francine Ndayisaba, multiplicatrice des semences de maïs hybride.
La multiplicatrice des semences de maïs hybride Lieutenant-colonel Francine Ndayisaba se réjouit du rendement généré par ces dernières depuis qu’elle s’est lancée dans ce secteur. Elle exploite 7 hectares dont 2,5 hectares sur la colline Kirinzi de la commune Mugamba dans la province de Bururi et 4,5 hectares sur la colline Rugenge de la commune Mpanda dans la province de Bubanza.
Des semences locales pour faciliter l’approvisionnement
Mme Ndayisaba indique que son implication dans la production des semences de maïs hybride est venue pour aider la population à s’en approvisionner facilement. Elle remercie la société SETRACO qui lui fournit les semences de base.
Paterne Iteriteka, agronome rencontré sur la colline Rusovu de la commune Kayogoro dans la province de Makamba informe la population que les semences de maïs hybride produites au niveau local sont de bonne qualité. Elles génèrent de bons rendements estimés à deux fois ou trois fois par rapport à celui des semences de maïs composite. Si on sème 25 kg, on peut récolter 3 tonnes.
Paterne Iteriteka, agronome.
Pourtant, il précise que la production de ces semences n’est pas chose facile. Elle demande des moyens colossaux.
Lors du semis, la première ligne est constituée exclusivement de maïs mâle. Les trois lignes qui suivent sont constituées exclusivement de maïs femelles et on continue dans ce sens jusqu’ au bout du semis. Du reste, il argue que la récolte est attendue après seulement trois mois.
La population ne produit que des vivres consommables
Il demande à la population de ne pas conserver elle-même les semences. Ce qu’elle produit est destinée à la consommation.
Plutôt, il l’informe que les semences sont disponibles chez les multiplicateurs qui collaborent avec SETRACO. Ce sont des semences de bonne qualité. «Elles sont plus productives par rapport à celles du maïs composite. Elles résistent aussi aux maladies », renchérit-il.
Et de préciser que cela permettra à la population d’avoir de quoi manger et de l’argent comme le souhaite le Chef de l’Etat. Iteriteka d emande alors à l’Etat de promouvoir l’utilisation des semences du maïs hybride produites localement au lieu de celles de maïs hybride importées dans l’objectif de motiver les multiplicateurs des semences au niveau local.
SETRACO collabore avec 30 multiplicateurs des semences
Yvonne Nimbona, cadre à la société SETRACO informe la population que cette société est à l’œuvre pour promouvoir l’utilisation des semences du maïs hybride au niveau local. «Nous collaborons avec des multiplicateurs des semences qui ont les compétences requises et des espaces cultivables libres. Actuellement, nous collaborons avec 30 multiplicateurs dans les provinces de Bururi, Rutana, Makamba, Gitega, Karusi, Mwaro, Ngozi, Gitega, Cibitoke, Muyinga et Bubanza. Nous disposons seulement de 204 hectares dans toutes ces provinces », laisse entendre Nimbona.
Yvonne Nimbona, cadre à la société SETRACO.
Les besoins en termes de semences de maïs hybride sont énormes
Elle s’inquiète que les superficies réservées à la production de ces semences ne sont pas suffisantes et demandent à l’Etat de contribuer à la disponibilisation des terres cultivables suffisantes pour pouvoir produire des semences suffisantes, car les études montrent que le Burundi a besoin de 2500 à 3000 tonnes de semences de maïs hybride par an.
Elle remercie l’IFDC de ses appuis multiformes dans la promotion de l’utilisation des semences hybrides et lui demande de continuer dans ce sens jusqu’ à ce qu’on parvienne à satisfaire le marché local en termes de semences de maïs hybride.
Astère Bararyenya, chercheur et améliorateur des plantes à la société SETRACO demande à l’Etat de prioriser l’utilisation des semences produites localement. Selon lui, cela permettra d’éviter les pertes enregistrées par les multiplicateurs des semences depuis que l’Etat a commencé à subventionner les semences importées.
Astère Bararyenya, chercheur et améliorateur des plantes à la société SETRACO.
Nous enregistrons une mévente de plus de 70 tonnes de semences de maïs hybride au niveau national, déplore-t-il. Selon lui, les semences du maïs hybride produites localement sont très rentables. Les vivres qui proviennent d’elles sont de bonne qualité et sont très appréciées par les consommateurs.
Les semences locales moins chères
De plus, elles sont moins chères (12000 FBu par kg), car les semences importées s’achètent à 25 000 FBu par kg quand elles ne sont pas subventionnées. Selon lui, toutes ces raisons prouvent que l’Etat va en tirer profit. Les devises qu’il utilise dans ce domaine peuvent être orientées dans d’autres secteurs tels que la santé, le transport, etc, renchérit-il.
Du reste, il informe la population que les variétés qu’on propose à la population ont des performances différentes selon l’écologie et les besoins dans ce domaine.
La variété Burakeye, plus performante
Il explique que la variété Burakeye est plus performante dans les régions de basse, moyenne et haute altitude. Elle a montré des performances assez extraordinaires lors des essais réalisés l’année dernière par le ministère en charge de l’agriculture en collaboration avec l’ISABU. Elle a été la première variété la plus rentable dans différentes régions du pays.
Burakeye est non seulement précoce, mais aussi appréciée en termes de qualité organoleptique. Elle a des graines de grand calibre.
Concernant la variété V3, elle est plus appréciée en moyenne altitude comme à Karusi et à Muyinga.
Et la variété Makobwa est plus appréciée en basse altitude et résiste beaucoup plus à la maladie MLN qui est une maladie dévastatrice comme on l’a observé dans les pays de la sous-région tels que le Kenya, la Zambie et l’Ouganda d’où provient une grande partie des semences importées.
Attention à l’importation des semences !
Il signale alors que plus on importe les semences, plus on aggrave le risque de l’apparition des maladies.
Gilbert Buhanza, coordonnateur du projet PSSD 2 à l’IFDC indique que cette organisation reste prête à promouvoir l’utilisation des semences de maïs hybride produites au niveau local. Il fait savoir que ce projet de l’IFDC travaille sur trois cultures, entres autres les maïs hybride et composite, le haricot et la pomme de terre.
Gilbert Buhanza, coordonnateur du projet PSSD 2 à l’IFDC.
C’est un projet qui est venu après d’autres projets de l’IFDC tels que l’ISSD et PSSD 1. L’ISSD a commencé ses activités en 2014 et les a clôturées en 2018. PSSD 1 les a débutées en 2019 pour les clôturer en 2024.
Pour le moment, Buhanza précise que le PSSD 2 s’intéresse aussi à ces cultures plus les légumes pour s’assurer que les aspects alimentaires et nutritionnels sont respectés. Nous avons introduit les semences de maïs hybride en 2019 en collaboration avec la société SETRACO, explique-t-il.
4 variétés déjà en phase de multiplication et de vente dans les ménages
Après deux ans de collaboration, on a fait homologuer 9 variétés de maïs hybride à l’ONCCS. Sur ces dernières, 4 variétés, entre autres Burakeye, long 7 H, Makobwa et V3 sont en phase de production, de multiplication et de vente au niveau des ménages.
En termes d’accessibilité physique, Buhanza indique qu’on a essayé de mettre des points de vente dans différents endroits en collaboration avec les autres partenaires privés. Ils sont dispersés dans différentes localités du pays pour permettre aux ménages vivant dans les endroits les plus reculés de s’en approvisionner. Malgré ces avancées, il affirme que la quantité de ces semences n’est pas encore suffisante.
Buhanza conclut qu’on est en train de chercher d’autres partenaires privés pour essayer de satisfaire la demande locale.