La cinquième édition du salon industriel bat son plein. Cet évènement rassemble les professionnels de l’industrie burundaise, les décideurs, les experts en développement économique pour parler des défis de l’industrialisation et dégager des pistes de solutions pour une industrie forte et compétitive. Cette édition revêt un caractère particulier. Il s’agit d’une semaine dédiée à l’industrialisation. Ainsi, l’évènement combine à la fois le Salon Industriel, la Foire Made in Burundi et le Forum National du secteur privé et de l’industrie. Certes, les participants ont eu l’occasion d’échanger leurs expériences, d’explorer les opportunités d’investissements mais au-delà des festivités et des expositions, une réflexion approfondie est menée sur l’évolution et l’avenir de l’industrie locale dans un contexte d’intégration régionale.
Benjamin Kuriyo, Directeur de publication
L’industrie locale reste confrontée à des défis multiformes. D’une part, le contexte économique ne mobile pas autant d’investissements pour développer et diversifier les industries. D’autre part, l’intégration régionale profite moins aux entreprises locales. L’accès au marché régional et international connait un défi de taille, en l’occurrence la certification. A cela s’ajoute le manque craint des infrastructures pour assurer le transport de certains produits spécifiques. Le pays est enclavé et il faudra parcourir au moins 1500 km avant d’atteindre un port qui débouche sur un océan.
Sur le plan structurel, une grande majorité des entreprises œuvrent dans le secteur agroalimentaire. Et là se pose le problème d’authentification des produits. Le fameux Bureau Burundais de Normalisation et du Contrôle de la Qualité (BBN) manque de tout. Il n’est pas bien équipé et bien outillé pour accomplir sa mission. Il ne dispose pas des Ressources Humaines suffisantes et qualifiées. Les industriels doivent passer par d’autres organes de certification de la sous-région pour pouvoir écouler leurs produits sur le marché extérieur. Cette situation constitue un grand défi pour la commercialisation des produits industriels, car ils font face à des barrières au niveau de l’exportation. Dans ces conditions, la compétitivité industrielle est remise en cause, car il devient difficile d’exporter les produits manufacturés.
L’industrie locale souffre également du manque de financements. Sur le marché financier, le secteur industriel est en concurrence directe avec les services publics. Avec la dette intérieure qui explose, la tendance des banques est de financer beaucoup plus le budget de l’Etat au détriment des opérateurs économiques. En d’autres termes, le service public dame le pion au secteur privé sans pour autant améliorer le climat des affaires. L’inflation non maîtrisée et la pénurie des devises est une épée de Damoclès qui pèse sur les entreprises locales. Le pays se transforme progressivement en un marché d’écoulement des produits des pays limitrophes. Avec la pénurie récurrente du sucre, du ciment et des fertilisants il est clair que l’industrie locale est loin de satisfaire la demande.
Le volume des exportations du pays vers les pays africains et en dehors du continent évolue en dents de scie. Pour cause, le pays exporte beaucoup plus les produits agricoles (thé et café), les minerais et quelques produits manufacturés vers l’Est de la République Démocratique du Congo. Pour équilibrer la balance commerciale, la diversification des exportations est indispensable. Sinon, le pays risque de se retrouver dans l’incapacité d’importer les produits dits stratégiques.
Tous les regards sont tournés vers la Zone de Libre Echange Continentale (ZLECAf), mais il importe d’analyser ce que le pays dispose pour écouler sur ce marché si gigantesque de 1,2 milliards d’habitants. Cette initiative vise à booster le commerce intra-africain en réduisant les barrières tarifaires et non tarifaires à son commerce avec les pays africains. Mais il ne faudra pas perdre de vue qu’il s’agit de jouer dans la cour des géants comme le Nigeria, l’Afrique du Sud, l’Angola, le Ghana. Il y a une lueur d’espoir que le secteur prive va se relever et voler de ses propres ailes avec la restauration de la confiance envers des institutions financières internationales qui souhaitent investir dans ce secteur.