Sur les lacs du Nord, précisément sur le lac Rweru, après la pêche, les poissons sont directement fumés. Cela pour permettre de bien les conserver. L’inexistence des caisses isothermiques et des chambres froides fait que les pêcheurs recourent à la technique de fumage des produits halieutiques capturés
Le conditionnement et la conservation du poisson sont quelques-uns des critères indispensables pour préserver la qualité du poisson. Néanmoins, ces éléments constituent un grand défi pour la pêche à Kirundo.
« Après la pêche, on procède directement au fumage des poissons », précise Emile Mvuyekure, pêcheur sur le lac Rweru depuis bientôt 10 ans. Cela suite au manque de congélateurs qui aident à la conservation des poissons. On ne dispose pas également de chambres froides, de frigos ou des congélateurs. On doit recourir à la technique de fumage. Cette dernière va aider à bien conserver les poissons pour ensuite les transporter vers les lieux de commercialisation », explique-t-il.
Au centre de Nyagisozi, les pêcheurs acheminent directement les poissons vers les ménages de leurs bosses. Des fours utilisant de bois de chauffage y sont installés. Juste avant le fumage, on enlève les coquilles (ibibarara) et on les lave à l’eau propre. On les sèche pendant quelques minutes au soleil pour que l’eau soit enlevée. Ensuite, on les met dans un four. Et on utilise le feu du bois. Il n’y a pas de foyers améliorés. Pour le fumage, précise Léonard Mirengo, pêcheur et membre de la coopérative Sangwe des pêcheurs, aucun ingrédient n’est mis sur les poissons, même pas ni le sel.
Selon les pêcheurs, le fumage du poisson nécessite beaucoup de bois de chauffage. Les statistiques montrent qu’un pêcheur utilise l’équivalent de dix stères d’arbres par semaine pour fumer le poisson.
Sur le lac Rweru, l’inexistence des caisses isothermiques et des chambres froides fait que les pêcheurs recourent à la technique de fumage des produits halieutiques capturés.
Les cartons, l’unique moyen de conservation des poissons
Contrairement à la pêche sur le lac Tanganyika où après cette activité, les poissons sont conservés dans des caisses en bois ou des seaux, à Kirundo, ils sont conservés dans des cartons. « Après le fumage, les poissons sont conservés dans des cartons. C’est l’unique moyen de conservation des poissons de leur du transport. S’ils sont fumés, ils ne se détériorent pas rapidement», fait savoir Emile Mvuyekure.
Selon M. Bwitonzi, pêcheur et commerçant à Kirundo, un carton peut contenir 150 poissons appelés Cockes (Oreochromis niloticus). Pour les poissons appelés Ikambali ou imare (Clarias gariepinus), le carton peut contenir 40 pièces. Pour les poissons appelés Inonzi, le carton peut contenir 10 unités.
Quid de la commercialisation ?
Les poissons pêchés dans le lac Rweru sont vendus au chef-lieu de la province de Kirundo et dans d’autres villes des provinces du Nord du pays (Ngozi et Muyinga). On les trouve dans les restaurants, les bars et les hôtels. Ils sont conservés dans des frigos ou dans des congélateurs. Des particuliers peuvent aussi s’en procurer à l’état frais. « Si les gens en provenance de Bujumbura ou de Kirundo viennent ici, ils emportent des poissons frais », indique notre interlocuteur.
En grande partie, les poissons du lac Rweru sont vendus dans la capitale économique Bujumbura, plus précisément dans le quartier Kamenge et au marché Bujumbura City Market, dit « Kwa Siyoni ». Selon Albert Hatungimana, gouverneur de la province de Kirundo, une partie de poissons fumés est exportée vers la RDC. Une grande quantité d’ailleurs.
Ezéchiel Bwitonze explique le processus. « Nous fournissons les poissons aux commerçants de Bujumbura. Après le fumage, nous payons la taxe communale. Pour un carton, la taxe est de 5 000 FBu. Après avoir payé la taxe communale, nous envoyons les cartons remplis de poissons aux commerçants de la capitale économique ». Selon lui, sur chaque carton est mentionné le nom du commerçant destinataire. « Après la vente, il nous envoient l’argent via les banques ou autres moyens de transferts d’argent. Les cartons sont transportés dans des voitures, surtout de marque Probox. Ce sont elles qui assurent le transport du poisson en grande partie.
Une variation constante des prix du poisson
Selon Ezéchiel Bwitonze, la variation des prix du poisson dépend de nombreux facteurs. D’abord le prix des poissons est fixé par les propriétaires des bateaux (patrons-pêcheurs). Il varie selon les différentes espèces de ces derniers. Il varie également selon les périodes. Du mois de janvier au mois de mai, les poissons sont chers parce qu’on n’enregistre pas de bons rendements suite à la pluviométrie intense qui s’observe. Les poissons vivent en profondeur suite à la chute de la température, révèle-t-il. Le prix chute avec le mois de juin jusqu’en décembre. Pour Bwitonze, les consommateurs sont en hausse alors que les poissons sont en baisse dans le lac. Un carton des « Koke » coûte entre 50 mille FBu et 60 mille FBu.
Le coût du transport influe également sur le prix des poissons. La route provenant du chef-lieu de la province Kirundo à la commune Busoni où se trouve le lac Rweru est en piteux état. « Le mauvais état de la route qui mène vers ce lac constitue un autre défi de taille. Si les routes sont en bon état, le commerce pourra s’améliorer », précise le gouverneur de la province Kirundo.