Le gouvernement a dévoilé son budget pour l’exercice 2024-2025. Les prévisions des dépenses s’élèvent à plus de 4 300 milliards de FBu, soit un accroissement de 16%. Le budget intervient dans un contexte d’embrasement économique. La société civile encourage le gouvernement à prioriser les secteurs porteurs de croissance tout en modérant les dépenses liées au fonctionnement de l’apareil étatique.
Gabriel Rufyiri Président de l’Olucome : « Il est plus qu’urgent de contracter un crédit en vue d’atténuer le choc économique qui s’accentue petit à petit. Sinon, il y a risque de se retrouver dans une situation de banqueroute a l’instar de certains pays ».
Le mois dernier, le conseil des ministres a analysé et adopté le projet de loi portant fixation du budget général de l’Etat pour l’exercice 2024-2025. Le gouvernement table sur une croissance économique de 4,2% en 2024 et de 5,4% en 2025. « Une reprise de croissance consécutive aux mesures prises par le Gouvernement visant la relance de l’économie et le renforcement de la coopération au développement », fait remarquer Jérôme Niyonzima, porte-parole et secrétaire général du gouvernement.
Quant aux recettes globales, elles passent de 3 371,6 milliards de FBu à 3 941,11 milliards de FBu en 2024/2025. Parallèlement, les dépenses totales de l’Etat passent de 3 780,95 milliards de FBu à 4 397,46 milliards de FBu pour l’exercice 2024-2025, soit un accroissement de 16,3%.
Des retards dans la préparation du budget de l’Etat
L’Observatoire de Lutte contre la Corruption et les Malversations Economiques (OLUCOME) constate avec regret que ces dernières années le projet de budget général de l’Etat tarde à être déposé sur le bureau de l’Assemblée Nationale pour adoption. Ce qui fait que les projets de lois des finances de ces dernières années sont votés à la hâte par les deux chambres du parlement sans une minutieuse étude de ces dernières.
Cela étant, l’article 181 de la Constitution du Burundi stipule que « l’Assemblée Nationale est saisie du projet de loi de finances dès l’ouverture de sa session du mois d’avril. ». Au début du mois de juin 2024, le projet de loi des finances exercice 2024-2025 n’était pas encore transmis à l’Assemblée Nationale, déplore Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome.
Un budget toujours déficitaire
Le déficit global du projet de loi de finances 2024-2025 s’élève à 456,34 milliards de FBu contre 426,51 milliards de FBu pour l’exercice en cours. L’écart entre les recettes et les dépenses est imputable au budget alloué à l’investissement selon les priorités retenues par le Gouvernement pour booster l’économie nationale, à l’amélioration des infrastructures publiques et à la mise en œuvre effective d’une politique salariale équitable, apprend-on du compte rendu du conseil des ministres.
Le gouvernement compte mobiliser plus de ressources internes. Ainsi, le conseil a recommandé d’identifier dans tous les ministères les secteurs qui peuvent générer des fonds au trésor public. Il a été proposé également de plafonner les exonérations et de supprimer celles appliquées à l’importation de l’éthanol destiné à la fabrication des boissons alcoolisées. Pour l’Olucome, le gouvernement devrait commanditer un audit indépendant sur les exonérations déjà octroyées depuis 5 ans à ce jour.
La situation économique s’embrase
Au cours des deux dernières années, la situation économique du pays n’a cessé de se détériorer. La dépréciation de la monnaie atteint des niveaux records, la pénurie des devises fait parle d’elle, les produits stratégiques qui manquent sur le marché et la prime de change de plus de 100%.
L’Olucome s’inquiète de la rareté des produits sensibles tels que le carburant, les fertilisants, les médicaments et les matières premières destinées aux entreprises locales. « Il est plus qu’urgent de contracter un crédit en vue d’atténuer le choc économique qui s’accentue petit à petit. Sinon, il y a risque de se retrouver dans une situation de banqueroute à l’instar de certains pays », propose Gabriel Rufyiri, président de l’Olucome.
Des mesures de gestion prudentielles
Lors de la récente réunion du conseil des ministres, Audace Niyonzima, ministre des Finances, du Budget et de la Planification Economique a présenté la stratégie de gestion de la dette à moyen terme. Cette dernière sera annexée à la loi des finances en cours de préparation. Ladite stratégie permet d’avoir une bonne évaluation et une meilleure composition du portefeuille de dette publique. Elle servira également de référence pour la prise de décision en matière d’endettement afin de couvrir les besoins de financement au moindre coût possible.
Le gouvernement reconnait la vulnérabilité du portefeuille de la dette. Ainsi, l’option de miser sur l’augmentation du financement extérieur concessionnel tout en faisant la recomposition du financement intérieur semble la plus plausible pour guider la politique d’endettement du pays.
Un budget plutôt de consommation
L’OLUCOME constate que dans la quasi-totalité des ministères, le budget de fonctionnement est en nette augmentation. Cette organisation de la société civile constate une légère augmentation des investissements sur les ressources extérieures en dépit des prévisions budgétaires externes qui restent théoriques suite au non-respect des principes de décaissement des fonds extérieurs.
Pour Gabriel Rufyiri, le budget général de l’Etat, exercice 2024-2025 devrait être un budget qui contient des réformes de l’administration en général, la digitalisation de tous les services publics, surtout des réformes de l’administration des finances publiques et judiciaire.
Des réformes pour stimuler le développement économique
Si la tendance d’orienter plus de fonds dans les moyens de fonctionnement de l’Etat n’est pas inversée, la vision du Burundi pays émergent en 2040, pays développé en 2060 reste utopique, prévient l’Olucome. Dans le cadre de l’efficacité économique, il propose au gouvernement de recourir aux experts nationaux et internationaux en matière de mobilisation des ressources, de planification, d’exécution et de suivi-évaluation des programmes.
En outre, l’Olucome suggère au gouvernement d’élargir la gamme des produits exportables en injectant des fonds conséquents dans le secteur des exportations quitte à récolter assez de deviser pour équilibrer la balance commerciale.