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L’homme est un « loup » pour le poisson

Le poisson se raréfie sur le marché. Les intervenants dans le secteur piscicole tirent la sonnette d’alarme. Ils attribuent cette rareté à la pollution du lac Tanganyika et à la mesure de ne pas importer le poisson prise par la Tanzanie

Les stands réservés à la vente du poisson « Mukeke » ne remplissent pas normalement leur fonction

Il est 14 heures le 16 juillet 2018 à l’entrée du marché COTEBU (marché de gros pour le poisson). Quelques vendeurs étalent le poisson communément appelé « Mukeke » sur des tables. Cinq « Mukeke » de petite taille s’achetait à 10 mille FBu, soit 5, 7 USD. A l’intérieur du marché, sur les stands réservés à la vente du « Mukeke »,  un vide embrassait les clients.

Seuls quelques stands réservés à la  vente du poisson séché appelé « Ndagala » sont embellis par ce produit.   Les vendeuses de ces derniers appellent tout passant : « Venez acheter le Ndagala. Les prix ont diminué ». Les clients estiment que c’est cher. Les vendeuses répliquent : « Vous avez de la chance. Dans le passé, le Kg s’achetait à 43 mille FBu soit, 24,4 USD ».

Les prix  du « Ndagala » varient selon les qualités entre 21 mille FBu par Kg soit, 11, 9 USD et 28 mille FBu par Kg, soit 15, 9 USD.

A notre passage, les vendeurs du poisson nous ont repéré suite au badge. « C’est un  journaliste », murmurent-t-ils. Et de s’exclamer  à haute voix: « Nous savons que vous venez nous demander où sont les poissons? Personne ne cesse de le demander. A part les slogans, qui va trouver la solution à la diminution de la production du poisson, surtout même que ceux qui sont censé le protéger sont à l’origine de sa disparition ? »

Mort ou fuite du poisson suite à la pollution du Lac Tanganyika

Que ce soit les amis de la nature, les consommateurs du poisson, les vendeurs du poisson ou les fournisseurs du poisson, tous convergent sur le fait que la pollution du lac Tanganyika est la cause principale de la diminution voire de la disparition de plus de 350 espèces qui y vivent.

Un ami de la nature préoccupé

Albert Mbonerane, un ami de la nature : « Pour qu’il y ait une bonne production du poisson, les pays riverains du lac Tanganyika doivent s’engager à protéger les eaux de ce lac »

« Le lac Tanganyika contenait beaucoup d’espèces halieutiques dans le passé.  Aujourd’hui, on remarque une diminution du poisson sur le marché. Cela est lié à la pollution des eaux du Lac Tanganyika par les déchets ménagers, les déchets industriels, les déchets d’origine pétrolière…et une surexploitation de la pêche (comme c’est la source de la survie, les pêcheurs utilisent des moyens prohibés les filets maillants et les moustiquaires) », déclare Albert Mbonerane, ami de la nature.  Dans ce cas, il affirme que si les poissons ne meurent pas, ils changent de gîte. En plus de la pollution, il ajoute la sédimentation. M.Mbonerane explique que les rivières qui alimentent le lac Tanganyika en eau ne sont pas protégées en amont. « Elles amènent alors les terres qui viennent occuper l’espace de l’habitation des poissons », signale-t-il. M.Mbonerane revient sur la destruction des espaces verts. Il rappelle que ceux qui installent des plages artificielles détruisent la végétation. « Pourtant, la végétation est l’habitat conforme à la bonne santé du poisson », martèle-t-il.

Les vendeurs et les fournisseurs témoignent

Christophe Hicuburundi (à droite), vendeur de poissons au marché COTEBU : « Aujourd’hui, les moyens de pêche et de transport du poisson ne sont pas améliorés »

« Avant l’incendie du marché central de Bujumbura en 2012, le poisson était en abondance. C’étaient les Grecques qui pêchaient. Ils utilisaient des lampes Anchor qui projetaient la lumière jusqu’au niveau le plus profond du lac. Ce qui permettait d’attraper beaucoup de poissons. Ils avaient également des camions frigorifiques pour le transport et la commercialisation du poisson », témoigne Christophe Hicuburundi, vendeur de poissons au marché COTEBU. Aujourd’hui, continue-t-il, les moyens de pêche et de transport du poisson ne sont pas améliorés. Pour  Jean Claude Ndihokubwayo, fournisseur des poissons, le poisson  diffère des plantes. Ces dernières nécessitent du fumier pour leur fertilisation. Il déplore qu’à part qu’il n’est pas bien protégé, la mesure prise par la Tanzanie (pays riverain du Burundi) interdisant l’importation du poisson est venue ajouter le drame au drame. Cependant, M.Ndihokubwayo ne précise pas à quelle date et dans quelles conditions la mesure a été prise.

Les consommateurs épaulent

Noël Nkurunziza, secrétaire général et porte-parole de l’Association Burundaise des Consommateurs (ABUCO) confirme que la diminution du poisson sur le marché est liée à l’étroitesse de l’espace de sa multiplication. Celui-ci est pollué. « Bien sûr que cela ne veut pas dire que le poisson manque totalement. Le poisson burundais est produit, mais aussi il est très apprécié. Il doit donc y avoir des fuites des poissons qui sont acheminés vers d’autres pays », se demande-t-il.

M.Nkurunziza  regrette que la diminution de la production du poisson entraine la dégradation de l’alimentation et l’augmentation des prix. « La satisfaction en matière de protéines animales était dû au « Ndagala » dont le prix d’achat était relativement accessible.

Si le « Ndagala » manque, ce n’est pas tout consommateur qui pourra s’acheter la viande ou d’autres produits contenant les protéines animales. Cela suite à son faible revenu. Par ailleurs, son prix aussi augmente », fait-il-remarquer.

En 2004, était signée la convention sur la gestion des eaux du lac Tanganyika par le Burundi, la Tanzanie, la RD Congo et la Zambie. Il faut, selon M.Mbonerane, que ces pays s’engagent sur la bonne gestion de ces eaux.

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