La Mairie de Bujumbura a, depuis le 7 octobre 2019, pris la mesure de suspendre toute activité au bord de la RN1 (à l’endroit communément appelé Gare du Nord) pour question de sécurité. Une décision qui a été mal accueillie par les occupants et les commerçants exerçant près de cette route. Une dizaine de jours après la mesure, Burundi Eco a fait un tour à cet endroit pour constater sa mise en œuvre
Nous sommes mardi le 15 octobre 2019. Il est midi sur la RN 1 au niveau de la place appelée communément Gare du Nord. Un endroit habituellement grouillant de monde. Des vendeurs de cartes de recharge sous un parapluie, des vendeurs de chaussures ou de petits kiosques à pain….tout cela semble ne plus exister. Depuis que le maire de la ville a annoncé que les activités au bord de cette route qui mène aux nouveaux bureaux de la présidence sont suspendues la peur et l’inquiétude se mêlent dans les yeux des anciens occupants des abords de cette route.
A la 13ème avenue du quartier Mirango I, là où se trouvait un petit marché de fruit
Jean Marie est un vendeur de cartes de recharge et de cartes SIM qui avait son parapluie devant le bar appelé « Kumutwenzi ».Il était là depuis plus de deux ans. Un commerce qui, selon ses dires, lui permet de vivre, mais aussi faire vivre sa petite famille. Depuis la mesure de suspension des activités le long de la RN1, ce trentenaire est devenu un commerçant ambulant ambulant. « La police traque tout individu exerçant le commerce sur cette route. Je ne peux plus exercer mon métier tranquillement. Avec mon capital, je ne peux pas non plus louer un kiosque pour continuer mon travail », confie-t-il avec désolation. A côté de ce bar, un restaurant qui est fonctionnel depuis plus de cinq ans. Là, les clients ont l’habitude de se restaurer à l’extérieur de la maison car « exigu et trop chaud à l’intérieur ». La propriétaire avait même acheté des parapluies et bien aménager la devanture de son restaurant pour le bien de sa clientèle surtout les heures de la mi-journée. A notre arrivée, trois clients étaient assis dehors. « Je suis un habitué d’ici, et j’exerce mon métier de l’autre côté de la route. Je n’ai jamais supporté la chaleur de l’intérieur », indique Patrick Ndayisenga, un mécanicien de la localité. Sur la question de la mesure prise par de la Mairie, Ndayisenga rétorque d’un air souriant qu’il ne compte pas abandonner son emploi pour aller ailleurs qu’à la Gare du Nord. « Cette route est mon gagne-pain. Si je quitte ici je suis foutu et il y a ma famille qui sera aussi victime. D’habitude quand il y a un dignitaire qui veut passer, on nous oblige de quitter la router et de fermer. Cela n’a jamais causé aucun souci », indique-t-il.
Les kiosques installés le long de la RN 1, mission démolition
De la 1ère à la 6ème avenue de la zone Kamenge, les petites maisonnettes qui servaient de point de vente de divers articles ne sont plus. Quelques-unes qui restent ne sont pas opérationnelles. Goreth est une des rares vendeuses de fruits au bord de la route près du pont de la rivière Nyabagere, qui est encore là. « Je n’ai pas le choix que de rester puisque je n’ai pas où aller », nous lance-t-elle furieuse. Selon elle, son commerce n’a jamais entravé le passage des dignitaires et, chaque fois qu’elle rentre, elle laisse toujours la place propre.
A une dizaine de mètres de là, deux jeunes hommes sont en train de démolir un petit kiosque. Ils y vendaient des chaussures et des habits. Ils affirment que leur activité commençait à prospérer. «Ce kiosque était notre seule adresse. Nos clients savaient où nous trouver, mais depuis quelques jours nous n’avons presque personne pour acheter nos produits puisque la police et la commune nous ont interdit d’ouvrir. La seule option qui nous restait c’est de démolir et récupérer quelques matériaux même si on ne voit pas où nous trouver une autre place pour relancer le commerce», fait savoir un d’eux.
A la 13ème avenue, même scénario. Un petit espace qui servait à la fois de petit marché de fruits et de restaurant a été complètement rasé. Un cordonnier trouvé à quelques mètres de là raconte que les propriétaires des étagères n’ont pas eu assez de temps pour déménager en douceur. « J’ai vu quelqu’un probablement de la Mairie qui est venu et leur a intimé l’ordre de tout dégager. Sinon qu’il allait les embarquer », nous dit-il.
Ceux qui exercent leurs activités à la Gare du Nord demandent que la mesure soit révisée ou au moins qu’on leur donne un temps suffisant pour dégager en bonne et due forme. Du côté de la Mairie, Freddy Mbonimpa a indiqué, pendant la réunion que les décisions administratives sont indiscutables.