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Municipalité de Bujumbura : La gestion des déchets ménagers demeure un casse-tête

La mauvaise gestion des déchets ménagers constitue un enjeu majeur dans les différents quartiers de la ville de Bujumbura. Ces déchets constituent une menace non seulement pour la santé publique, mais aussi pour la qualité de l’environnement. Burundi Eco a effectué un reportage dans les quartiers et les marchés de la capitale économique. La situation y est préoccupante

Il y a trois ans, la mairie de Bujumbura avait autorisé les coopératives et les associations à épauler les Services Techniques Municipaux (SETEMU) dans  la collecte des déchets ménagers moyennant le payement d’une somme de 10.000 FBu par mois et par ménage. Cependant, depuis la mise en place de ces coopératives, les immondices sont toujours légion. Certaines associations et coopératives chargées de collecter les déchets ménagers n’arrivent pas à la hauteur de leur engagement. La quantité de déchets produits par la population de la capitale dépasse de loin la capacité d’accueil des dépotoirs existants

Que ce soit dans les quartiers ou dans les marchés, l’insalubrité prend le devant

Dans différents marchés de la municipalité de Bujumbura, les poubelles ont débordé. Un simple passage permet de constater une certaine défaillance au niveau de l’organisation des travaux en rapport avec la propreté de la ville. Ces infrastructures nouvellement construites et équipées de manière moderne sont menacées par l’insalubrité. Parfois, les  milieux environnements regorgent d’immondices.

A côté de la rivière Nyabagere sur l’Avenue Misugi séparant le zone de Ngagara de celle de Cibitoke, une montagne d’immondices à ciel ouvert se fait remarquer.

Le marché de Cotebu qui n’est pas équipé de poubelles fait face à une insalubrité criante. A l’Est dudit marché, on observe des cubes construits en tôles métalliques qui étaient destinées à servir de poubelles. Malheureusement, ce matériel n’a pas été utilisé et est resté à l’écart, constituant à son tour des déchets comme tant d’autres. Les marchés des quartiers Ngagara, Bwiza et Musaga font face au même problème d’insalubrité grandissante. Selon les informations reçues sur place, les services d’évacuation des déchets tardent à intervenir. Dans les endroits proches des poubelles, une odeur nauséabonde oblige les passants à fuir les lieux. Au marché de Musaga, les vendeurs qui exposaient leurs marchandises dans des espaces proches des poubelles ont dû déménager.

Le même phénomène s’observe à l’intérieur de certains quartiers. A Bwiza, les résidents en mal de gérer leurs déchets ménagers les versent consciemment  dans les rues dont la construction a sûrement coûté énormément cher aux caisses publiques. Visiblement, ces déchets de toutes sortes versés dans les rues les détériorent et constituent un signe éloquent que les citadins de Bujumbura sont dans l’impasse quant à la gestion des déchets.

Les déchets envahissent les ménages

En traversant certains des quartiers de la capitale économique du Burundi, l’observateur est frappé par la vue des sacs plaqués contre les murs ou disposés pêle-mêle  devant les ménages. De même, les déchets provenant des caniveaux longeant les rues constituent des immondices où sable, sachets en plastique et déchets ménagers issus de la cuisine sont réunis. Ce qui gêne particulièrement les habitants des quartiers en général et les passants en particulier. Sous la pression de la puanteur envahissante, certaines familles font appel à de simples ramasseurs de déchets pour s’en défaire. Ceci ne va pas sans conséquences. Ces ramasseurs de déchets seraient les convoyeurs des immondices improvisés constatés dans des milieux environnants des quartiers ou tout au long des avenues. Ces conséquences, du moins négatives, liées à la non évacuation des déchets peuvent revêtir plusieurs formes, y compris la pollution du lac Tanganyika avec toutes les dommages environnementaux que cela entraine.

Sans décharge publique connue, les dépotoirs clandestins s’observent

En faisant un tour là où se trouvait la décharge publique de Buterere, nous avons constaté que divers types de déchets sont entassés en désordre. Plus d’un pourraient se demander s’il y aurait une réglementation dans le déchargement des déchets, car que ce soient les déchets plastiques ou les restes des ordures provenant des ménages, tout se retrouve entassé ensemble. Arrivé sur le site, aucune voie d’accès  n’est actuellement praticable. Les pistes qui servaient de passage pour les camions ont été envahies par les déchets car, selon les habitants de la périphérie de ce site, des camions viennent souvent clandestinement pour décharger les déchets n’importe où et n’importe comment.

Trouver où décharger les déchets, une autre manœuvre

La décharge de Buterere étant déjà saturée, les dépotoirs sauvages sont légion. Mais des camions pleins de déchets se dirigent quotidiennement vers ce fameux site momentanément fermé, car aucune alternative n’est envisagée pour trouver de l’espace où  déposer les déchets. Des montagnes de déchets sont à moins d’une dizaine de mètres des habitations, de quoi s’inquiéter pour la santé de la population. Un peu plus loin, un camion s’arrête et cherche où décharger les ordures en bordure de la route. De là, mères et enfants se bousculent pour chercher soit des restes de nourritures, soit des habits ou autres objets pouvant leur servir d’ustensiles. Plus de cinq camions sont en attente d’être déchargées à quelques mètres de l’école de la Mission de Sagesse de Mubone. La décharge soi-disant fermée est abandonnée parce que les pistes qui servaient de voies d’accès ont été envahies par les déchets. « On décharge n’importe comment ici. Il suffit de se frayer un petit chemin et on éparpille les déchets même  dans les parcelles des habitants qui n’ont même pas le droit de réclamer justice », se lamente une des femmes qui habitent dans une parcelle située à moins de cinq mètres de là.

A Mubone, le dépotoir d’immondices est en passe d’envahir les habitations.

La gestion de ces déchets demeure un casse-tête que ce soit du côté des habitants de Mubone,  mais aussi des camions clandestins qui viennent des différents quartiers de la ville de Bujumbura pour y déposer différentes sortes de déchets. A première vue, le dépotoir de Mubone ne respecte aucune règle, car exploité d’une manière anarchique. Les habitants de la localité nous témoignent que les enfants y souffrent toujours des maladies liées aux mains sales. Même les adultes ne sont pas épargnés. « Les plus âgés ont des problèmes respiratoires. Les odeurs désagréables arrivent même dans nos maisons. Les autorités locales assistent impuissamment aux camions qui viennent déverser ces ordures ici », se désole un habitant de la localité.

La situation est telle alors que les Services Techniques Municipaux (SETEMU) ont, depuis plus de deux ans, déclaré que la décharge publique de Mubone n’est plus exploitable tant par le SETEMU eux-mêmes, que par les associations de collecte de déchets ménagers dans les différentes communes urbaines de Bujumbura. M. Mbonimpa avait aussi promis à ces associations qu’une autre décharge était en cours d’aménagement du côté de Kanyosha, mais jusqu’ici elle n’est pas fonctionnelle faute de moyens.

En attendant qu’il y ait un autre endroit aménagé à cet effet, les habitants de Mubone continuent à vivre au quotidien le calvaire des odeurs nauséabondes, subissant par là même l’inaction de l’administration pour stopper l’arrivée de nouvelles ordures.

Pourtant, des pistes de solutions existent pour relever le défi

Au Burundi, la problématique de la gestion des déchets est loin d’être maîtrisée. Pourtant, il reste possible de mettre en œuvre des programmes ambitieux de valorisation des déchets. Les déchets jadis considérés comme une malédiction, peuvent devenir une opportunité de développement. Le tri sélectif reste une étape importante dans la gestion des déchets. Cette opération consiste en une organisation de la collecte des déchets depuis les ménages jusqu’aux centres de tri et de recyclage. Pour réussir cette opération, les experts écologistes indiquent que chaque ménage doit disposer de 3 à 4 poubelles différentes. Les déchets dangereux tels que les médicaments périmés, les piles sèches et autres équipements électroniques, doivent être acheminés vers les déchetteries pour un traitement spécifique. Il existe des poubelles destinées aux plastiques, aux papiers, aux produits en verre et aux métaux.

Dans un pays où la quantité d’énergie produite reste insuffisante, les déchets biodégradables peuvent servir à produire de l’électricité, des briquettes combustibles ou du gaz. Dans son étude sur les perspectives pour une gestion durable des déchets, Lucien Citeretse a pu démontrer que le Burundi regorge de pas mal d’opportunités. Selon ce chercheur, les ordures non recyclables produisent d’excellentes briquettes combustibles. Ces dernières peuvent se substituer au charbon et au bois de chauffage utilisés dans la cuisson des aliments,… Certaines sociétés se sont lancées depuis sous peu dans la fabrication des briquettes à partir des ordures ménagères. Mais, il reste encore du chemin à faire pour valoriser les déchets dont la gêne se fait sentir dans la capitale économique.

L’utilisation des déchets biodégradables dans l’agriculture constitue aussi un autre moyen de les rentabiliser. Le compost est un excellent produit d’amendement organique des sols. Ce volet pourrait permettre de booster le rendement des cultures dans les zones périurbaines. Dans les villes, le compostage contribue à la promotion d’une agriculture urbaine écologique et des produits horticoles. 

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