Deux paquebots, d’une capacité de 600 personnes chacun, sont en train d’être construits parallèlement à Kabezi, dans la province de Bujumbura, par l’entreprise Musumba Cargo. Fabriqués en aluminium, leur mise à l’eau est prévue pour août 2025. Cela malgré le défi lié l’usage du mazout au chantier naval
« Nous avons constaté un manque de paquebots pour le transport des personnes dans le lac Tanganyika. Pourtant, ces derniers peuvent contribuer à améliorer la mobilité des personnes entre notre pays et les pays voisins tels que la République Démocratique du Congo (RDC), la Tanzanie et la Zambie », explique Fabien Barigora, directeur général de Musumba Cargo, une branche de Musumba Holding. C’est la première entreprise qui est en train de construire deux paquebots (les MV Musumba 2) au chantier naval de Kabezi, dans la province de Bujumbura.
Il rappelle que la construction des paquebots MV Musumba 2 vient après la mise en service d’un bateau mixte, le MV Musumba 1, qui transporte à la fois des passagers et des marchandises. Ce dernier peut transporter 1 500 tonnes de marchandises et 100 passagers.
Des navires fabriqués en aluminium
« Les matériaux utilisés dans la construction des MV Musumba 1 et MV Musumba 2 diffèrent. Le MV Musumba 1 est fabriqué en acier, tandis que le MV Musumba 2 est construit en aluminium », précise M. Barigora.
Il ajoute que ces deux navires effectueront des traversées régulières sur le lac Tanganyika, reliant notamment Kigoma en Tanzanie, Kalemie en RDC, Mpulungu en Zambie et vice-versa.
Pour M. Barigora, les prix du transport vont baisser, car le transport lacustre est moins coûteux que le transport routier ou aérien. De plus, l’utilisation de ces paquebots permettra d’éviter les tracasseries liées au transport terrestre. « Aucun voyage ne durera une journée sur le lac Tanganyika. Par exemple, le trajet vers Mpulungu en Zambie par voie terrestre dure entre 4 et 5 jours, alors qu’en empruntant la voie lacustre, il ne prendra pas plus de 24 heures. En outre, des devises étrangères entreront dans le pays, surtout que les voyageurs étrangers bénéficieront des facilités pour entrer dans le pays », précise-t-il.
M.Barigora déplore cependant les difficultés liées à l’approvisionnement en carburant du groupe électrogène du chantier naval, et le recours à une main-d’œuvre étrangère coûteuse. « C’est un secteur inexploité qui nécessite un soutien », ajoute-t-il.
90% de la structure des navires terminés
Robert Valère Libefaude, ingénieur expert en construction navale, bâtiments industriels et machines diverses, supervise la construction des deux MV Musumba 2. Il annonce que le chantier a commencé en octobre 2023. « Aujourd’hui, 90 % de la structure des navires est terminée. Nous avons rassemblé environ 160 tonnes d’aluminium et nous prévoyons de terminer la construction en aluminium d’ici mars 2025. »
Il précise qu’il ne restera que les finitions, c’est-à-dire l’installation des moteurs, des hélices, du système électrique, de la plomberie, des doublages, de la peinture, de la climatisation, des vitrages, des sièges ainsi que des instruments de navigation et de commande des navires.
Chaque navire pourra transporter 600 passagers et naviguer à une vitesse de 60 kilomètres à l’heure. Leur longueur sera de 39 mètres avec une largeur de 11 mètres et une hauteur de 10 mètres. Ce qui en fera les navires les plus rapides de la région des Grands Lacs.
« Les services à bord de ces deux MV Musumba 2 seront similaires à ceux proposés dans les avions, d’autant plus que la durée des trajets sera très courte. Les navires disposeront de 50 places royales, 100 places VIP et 450 places standard », indique-t-il.
M.Libefaude précise que les moteurs d’origine chinoise, d’une puissance de 800 chevaux chacun, sont déjà arrivés. Toutefois, il reconnait que la construction des navires dans la région des Grands Lacs souffre de problèmes d’approvisionnement et de logistique, bien que le planning ait été bien assuré à l’avance. « Les matériaux commandés en Chine transitent au Kenya ou en Tanzanie pendant au moins 4 mois. Or, tout le matériel utilisé est importé, soit de Chine, soit de Dubaï », explique-t-il.
Une main-d’œuvre régionale
Robert Valère Libefaude souligne que la main-d’œuvre employée est régionale, composée de Kenyans, Congolais, Rwandais et Burundais. Sur 42 employés, 12 sont Burundais. « Nous combinons leurs savoir-faire et leurs techniques industrielles afin qu’à la fin du chantier, chaque travailleur ait appris des autres. L’objectif est de former des ouvriers spécialisés provenant de la région afin de leur transmettre des compétences en construction navale », explique-t-il.
Il ajoute : « Les Burundais, en œuvrant aux côtés des Kenyans, Congolais et Rwandais, apprennent à construire des bateaux. Une fois les navires achevés, ces ouvriers seront des experts en construction navale et le pays en aura besoin dans les années à venir. »
L’ingénieur assure que les navires seront construits selon les standards internationaux. Pour garantir leur fiabilité, il recommande de les exploiter dans le respect des normes de qualité une fois qu’ils seront opérationnels.