Pour la toute première fois au Burundi, un événement réunissant différentes personnalités (experts, artistes, écrivains,…) s’est tenu le 25 janvier 2018 à l’Institut Français du Burundi: « La nuit des Idées ». Des idées étaient au rendez-vous pour débattre sur des sujets diversifiés d’une manière futuriste et utopique. Un des sujets sur l’affiche était « le rôle des entreprises ». Et si toutes les entreprises étaient privatisées ?
Et si on se réveillait dans un Burundi où toutes les entreprises sont privatisées, quels seraient la base et les impacts d’une telle situation? Chefs d’entreprises, société civile, experts qui étaient dans le panel et le public partagent les points de vue. «Quand on passe dans le secteur privé, il y a la compétition. Quand, il y a la compétition, il y a la productivité qui accroit et c’est la croissance économique. », argumente Pas-Plus Ntahombaye, secrétaire exécutif du SETIC (Secrétariat Exécutif des Technologies de l’Information et de la Communication). Quant à Faustin Ndikumana, président de PARCEM, chaque fois que le pays affichait une croissance économique, le secteur privé y a contribué énormément.
Est-il vraiment possible de tout privatiser ?
Même si dans le panel on affirmait qu’il y a de points positifs qui sont à mettre à l’actif de la dans la privatisation des entreprises publiques, les panélistes ne frappent pas à côté du fait qu’il ne faut pas ignorer qu’il y a des secteurs qui seraient difficiles voire impossibles à privatiser. C’est en l’occurrence, la santé, la sécurité nationale, l’éducation… « Il y a certains services qui doivent être sous le contrôle total de l’Etat pour assurer sa souveraineté », fait remarquer Noël Nshimirimana, directeur administratif et financier de la BBS (Burundi Backbone System Company)
« Si tout est privatisé, nous serions dans un pays privé. Là où les multinationales décideraient qui sera le président de la République », lance M Pas-Plus Ntahombaye. Et, M Gérard Muringa, conseiller à la coopération dans le domaine de la privatisation à l’ambassade des Pays-Bas ajoute : « Probablement que le président de la République serait confondu avec le président de la chambre de commerce et de l’industrie. » (tout le public éclate de rire)
Quel est le rôle de l’Etat
Tout au long du débat, on revenait toujours sur le fait qu’il faut un cadre légal, pour planifier la politique de privatisation en vue d’évaluer son effectivité et son efficacité. Et l’Etat doit apparaître dans la régulation et l’arbitrage, surtout que dans le secteur privé, la concurrence est la règle et que le moins performant risque de ne pas trouver la place.
« L’entreprise privé doit être à la base de tout développement d’un pays mais l’intervention de l’Etat est toujours là pour stimuler la performance », disait M Ndikumana. Mme Marie Muque Kigoma, ADG de Fruito ajoute : « L’Etat ne peut pas disparaître complètement. Son rôle est de donner l’espace, de protéger et d’aider les entreprises à se développer, mais en restant justement dans la légalité.»
Dans ce débat qui a duré 2h 30min (de 16h-18h 30min), il n’était pas question de tirer une quelconque conclusion. « Il s’agit de rêver pour arriver à se projeter un peu avec quelques idées fortes. » clôture Demba Diack, conseiller de coopération et d’action culturelle adjoint à l’ambassade de France et modérateur du débat. Les discussions ont été entractées par des slams du collectif JEWE Slam qui ont été écrits pendant le débat et des dessinateurs de SHAQUART ont crayonné des dessins qui ont été retransmis au public après le débat.
Faisons savoir qu’à l’ordre du jour de cet évènement figuraient deux autres débats, l’un sur la démographie : « Et si en 2037, la population du Burundi avait stagné voire régressé », l’autre sur la place de la femme : « Et si la société burundaise étaient matriarcale ». Signalons aussi que « La nuit des Idées » a été organisée par l’IFB et le collectif YAGA. Cet événement a eu lieu simultanément sur les 5 continents, dans plus de 100 villes.
Qu’est-ce que « La nuit des Idées » ?
La nuit des idées est un événement annuel qui a été créé en 2016 par le ministère français des affaires étrangères en partenariat avec l’institut français de Paris. C’est un événement qui a pour but de réunir, le temps d’une nuit, des personnalités d’horizons différents pour débattre de différents sujets autour d’un thème commun.
Le thème proposé pour cette année était « l’imagination au pouvoir ». L’idée était d’essayer d’explorer des thèmes improbables et voir ce qui en ressort pour la société d’aujourd’hui, des idées innovantes qui peuvent sortir de ces débats, a précisé Stéphanie Soleansky, la directrice déléguée de l’Institut Français du Burundi. (Source : le blogue du collectif Yaga)