Malgré une situation économique mondiale incertaine, l’Afrique n’a pas de soucis à se faire, d’après le rapport que la BAD (Banque Africaine de Développement) vient de sortir. Ses performances économiques, son secteur de l’emploi, le dynamisme de ses entreprises et l’intégration amorcée sont autant d’atouts qui feront la force du continent noir demain. Burundi Eco revient sur les grandes lignes de ce rapport
L’Afrique est bien partie. Certains indicateurs laissent présager un bon avenir pour les Africains. Malgré quelques imperfections, tous les ingrédients semblent réunis pour que l’Afrique se mette enfin sur les rails du développement. Mais encore faut-il savoir concocter le bon mélange.
L’intégration pourrait doper le marché africain. D’après les analystes de la BAD, en éliminant les droits de douane appliqués aujourd’hui, le commerce entre pays africains pourrait augmenter de 15 %
Le taux de croissance devrait passer de 4 % en 2019 à 4,1 % en 2020
Selon le rapport de la BAD, la croissance du PIB réel africain s’est ralentie à 3,5 % en 2015 et 2,1 % en 2016 en partie du fait de la forte baisse des prix du pétrole et d’autres chocs régionaux comme la sécheresse en Afrique de l’Est et en Afrique australe. Une reprise progressive s’en est suivie. La croissance a atteint jusqu’à 3,6 % en 2017 et 3,5 % en 2018. Selon les estimations des experts, elle devrait s’accélérer pour atteindre 4 % en 2019 et 4,1 % en 2020. Les projections laissent penser qu’environ 40 % des pays africains connaîtront une croissance d’au moins 5 % en 2019.
Une croissance annuelle de 6,9 % pour résoudre le problème de chômage
La croissance de 4 % reste insuffisante pour avoir un impact sur le chômage et la pauvreté. Une croissance de la population supérieure à 2 % implique que le PIB par habitant augmentera de moins de 2%. Cela fait que la trajectoire de croissance sera insuffisante pour créer des emplois pour une main d’œuvre en constante augmentation. La population en âge de travailler devrait augmenter en moyenne de 2,75 % par an entre 2016 et 2030. Une croissance économique de 6,9 % par an est donc nécessaire pour absorber les nouveaux arrivants sur le marché du travail. Le défi est donc double : augmenter l’actuelle trajectoire de croissance et accroître l’efficacité de la croissance à générer de l’emploi.
La contribution de l’investissement est passée de 14% à 48%
La consommation a toujours été la principale source de la demande en Afrique. Elle s’est maintenue à environ 80 % du PIB tandis que l’investissement qui est le deuxième moteur de la demande est resté autour de 25 % du PIB depuis le début des années 2000, d’après le rapport de la BAD. Toutefois, la part de la consommation dans le PIB a diminué depuis 2016 tandis que celle des investissements et des exportations nettes a augmenté. Par exemple, la contribution de la consommation à la croissance du PIB réel a diminué, passant de 55 % en 2015 à 48 % en 2018. La contribution de l’investissement, elle, est passée de 14 % à 48 % durant la même période.
La croissance démographique, atout ou faiblesse ?
Le rapport de la BAD constate que l’Afrique a enregistré l’une des accélérations de croissance économique les plus rapides au cours des deux dernières décennies. Mais cette croissance n’a pas été favorable à l’emploi. Une augmentation de la croissance du PIB de 1 % sur la période 2000–2014 n’a été associée qu’à une croissance de 0,41 % de l’emploi. Cela correspond à un taux de croissance annuel de l’emploi inférieur à 1,8 % ; donc bien en deçà des 3 % de croissance annuelle de la population active. Si cette tendance se maintient, le rapport indique que 100 millions de personnes rejoindront les rangs des chômeurs en Afrique d’ici 2030. Le rapport indique qu’au rythme actuel, l’Afrique devra créer 12 millions de nouveaux emplois chaque année pour contenir l’augmentation du chômage. Ce qui n’est pas une mince affaire.
L’industrialisation, la solution durable
L’accélération de la croissance économique impulsée par le secteur manufacturier a conduit à des changements structurels positifs avec des effets dynamiques potentiellement plus importants à long terme, d’après les experts. Cela laisse penser que l’industrialisation est la clé du casse-tête de l’emploi. A ce sujet, le rapport pointe peu de dynamisme des entreprises en Afrique et plus particulièrement la faible probabilité qu’ont les petites entreprises de se transformer en moyennes ou grandes entreprises. En conséquence, la prépondérance de petites entreprises abaisse la productivité globale, en particulier dans le secteur manufacturier. Elle ne permet pas aux entreprises de créer suffisamment d’emplois hautement qualifiés pour absorber la main-d’œuvre sans cesse croissante de l’Afrique. De toute évidence, il faudra inverser la tendance dans les années à venir.
L’intégration pourrait doper le marché africain
D’après les analystes de la BAD, en éliminant les droits de douane appliqués aujourd’hui, le commerce entre pays africains pourrait augmenter de 15 %. Une plus grande intégration du marché des biens, des services d’infrastructure et des principaux facteurs de production (travail et capital) est essentielle pour les petites économies fragmentées d’Afrique. Une Afrique sans frontières constitue le fondement d’un marché continental compétitif. Depuis des années, les dirigeants africains ont compris l’intérêt de travailler ensemble ; d’où la constitution des communautés économiques régionales comme l’UEMOA, la SADC, l’EAC, etc. L’intégration a atteint une autre phase avec le lancement de la ZLEC (accord sur la Zone de Libre-Echange Continentale) en mars 2018. Vivement que de telles initiatives se consolident. L’Afrique ne se portera que mieux.