Depuis quelques jours, la valeur des devises chute sur le marché parallèle. Cependant, les causes restent méconnues. Les observateurs rapportent que cette chute serait due à la baisse de leur demande. D’autres parlent des injections de devises dans l’économie nationale.
Vers la fin de l’année 2017 et le début de l’année 2018, il s’est observé une carence des devises. Cependant, à partir du mois de mars, les taux de change de ces devises ont commencé à chuté. Dr Jean Isaac Bizimana, doyen de la Faculté des Sciences Economiques et de Gestion à l’Université du Burundi indique qu’il y a une tendance à la réapparition des devises alors qu’il n’en est rien. Il précise cependant que cette baisse du taux de change des devises serait liée aux revenus tirés de la vente des terres rares. Il ajoute que cette chute est l’une des conséquences de la crise qu’a connue le Burundi depuis l’année 2015.
Des situations conjoncturelles génératrices de devises
D’après Dr Bizimana, suite à une directive de la Banque centrale de 2017 qui exigeait que tous les comptes en devises soient canalisés au niveau de cette banque, les devises sont donc accessibles à partir du Rwanda. « Il y a eu une directive de la Banque centrale qui imposait aux organismes internationaux de déposer leurs devises dans un compte à la BRB. Cependant, ce que la BRB escomptait ne s’est pas passé comme il le voulait. Tous ces organismes, au lieu de déposer leurs devises sur un compte à la BRB, les ont transférés à l’extérieur principalement au Rwanda si bien que la masse espérée n’est pas celle qui est arrivée. D’où une diminution des devises », indique Dr Bizimana.
Il ajoute que les jeux du Cecafa, les gens qui viennent au pays pour des vacances, les militaires qui reviennent des missions de maintien de la paix qui rapportent quelques devises dans le pays, tout cela pourrait justifier la baisse de la valeur des monnaies étrangères. De plus, renchérit-il, au niveau de la BRB il a été instauré une gestion prudentielle des réserves en devises. Il précise que si une personne a un compte en devises à la BRB, elle ne pourra pas retirer ses devises. Celles-ci sont réservées aux domaines prioritaires, à savoir : l’achat des médicaments, l’achat du carburant et l’achat des engrais.
Cependant, Dr Bizimana reste pessimiste. Il s’inquiète qu’après cette chute il y aura une hausse de la valeur de ces devises car, se demande-t-il, est-ce que les jeux du Cecafa vont continuer ?, les injections des devises à partir de l’exportation des minerais spécialement les terres rares pourraient-elles compenser leur pénurie et à quel niveau ?
Les observateurs donnent une autre explication
Un changeur de rue rencontré au centre-ville indique que la chute de la valeur des devises est due au fait qu’il n’y a plus assez de clients pour acheter les devises. D’après lui, la majorité des grands commerçants qui s’approvisionnent pour la plupart au marché noir ont cessé d’importer ces derniers jours en attendant l’issue du vote référendaire. Il affirme que les commerçants vivent une période d’incertitude. De surcroît, ils ne peuvent pas se permettre d’importer.
Un des importateurs rencontré dans son magasin au centre-ville certifie que la chute de la valeur des devises constitue une aubaine pour lui « Quand le dollar chute, cela me permet d’en disposer assez et facilement .Ce qui constitue un atout pour moi et pour mes clients. Quand j’achète un article à bas prix, je le vends à bas prix également », indique-t-il.
Conséquences sur l’économie Nationale
D’après Dr Bizimana, si le taux de change diminue c’est bénéfique pour les importateurs et pour les industries parce que, explique-t-il, il y a des industries qui ne fonctionnent pas à cause de la pénurie de devises qui leur facilitent l’approvisionnement en matières premières. Bref, l’économie nationale se relève.
Malgré toutes ces fluctuations, les prix des denrées alimentaires sur les marchés ne changent pas mais, au contraire, continuent à augmenter, rapportent certains consommateurs rencontrés sur les points de vente de certains produits.
Evolution du taux de change des devises depuis décembre 2017 sur le marché parallèle
Mois |
Acheteur |
Vendeur |
|
27 décembre 2017 |
Dollar |
2625 |
2640 |
Euro |
3040 |
3060 |
|
29 janvier 2018 |
Dollar |
2780 |
2795 |
Euro |
3350 |
3370 |
|
27 février 2018 |
Dollar |
2670 |
2690 |
Euro |
3260 |
3280 |
|
12 mars 2018 |
Dollar |
2600 |
2615 |
Euro |
3150 |
3170 |
|
27 avril 2018 |
Dollar |
2470 |
2490 |
euro |
2930 |
2960 |
|
15 mai 2018 |
Dollar |
2520 |
2550 |
euro |
2950 |
3000 |
Rappelons que le taux de change à l’achat des devises par les changeurs du centre-ville le 9 mai 2018 dans la soirée était 1 euro à 2700 FBu et 1 dollar américain à 2310 FBu. Il Faut signaler que la veille, le cours fluctuait de minute en minute et qu’il fallait négocier avec plusieurs changeurs pour trouver un taux satisfaisant. A un certain moment, 1 dollar américain s’achetait à 3000 FBu et 1 euro à 3500 FBu.