Evariste Ndayishimiye, Président de la République du Burundi se fâche contre les enseignants qui disent qu’ils pourront entamer un mouvement de grève une fois qu’on n’aura pas suspendu la mesure de faire subir un test de niveau aux enseignants des écoles fondamentales. Il dit qu’on va les remplacer par de jeunes chômeurs. De leur côté, les enseignants s’inquiètent et précisent que le droit à la grève est reconnu par les lois nationales et internationales
Dans une prière mensuelle qui clôture le mois de janvier 2022 à l’intention des membres du parti au pouvoir, le Président de la République Evariste Ndayishimiye a fait savoir que ceux qui vont grever seront automatiquement remplacés par de jeunes chômeurs. «Je sais que parmi vous il y en a qui vont grever. Grevez, il n’y a pas de problème. Nonobstant, il éclaire. Enseigner n’est pas une obligation! Vous pouvez abandonner ce métier si vous pouvez dès aujourd’hui», annonce Ndayishimiye. Qui t’a dit qu’enseigner se force, se questionne-t-il. Et d’ajouter : «Abandonnes le métier si tu veux et pratiques l’élevage des porcins ou des volailles! Personne ne t’en voudras», fait remarquer le chef de l’Etat. Il s’interroge : «Pourquoi ils veulent grever contre leur employeur?».
Evariste Ndayishimiye, Président de la République : «Ceux qui vont grever seront automatiquement remplacés par de jeunes chômeurs».
Il a indiqué qu’il ne cesse d’enseigner que l’Etat est constitué de 12 millions d’habitants et que l’enseignant est alors l’employé de ces derniers. Selon lui, s’ils refusent d’enseigner leurs enfants, leurs salaires seront bloqués. De plus, ils seront remplacés par ceux qui sont au chômage. Il estime que la formation de ceux qui vont les remplacer sera terminée dans seulement trois mois. Il argue que les enseignants, même s’ils optent pour un duel, ils ne peuvent pas le gagner, car leur effectif est insignifiant par rapport à celui de toute la population qualifiée de leur employeur.
Les enseignants inquiets
Les enseignants qui se sont entretenus avec Burundi Eco sous couvert d’anonymat s’inquiètent des propos du Chef de l’Etat. Ils font savoir que cela montre que le dialogue qui se fera entre eux et le ministère de l’Education Nationale sous la médiation du Conseil National de Dialogue Social (CNDS) n’aboutira à rien. Pour eux, la mauvaise qualité de l’éducation n’est pas liée au faible niveau des enseignants. Selon ces derniers, depuis quelques années, le gouvernement a initié des réformes de l’enseignement de base en mettant en place les écoles fondamentales qui combinent l’école primaire et le collège. Et, depuis cette période, il s’observe pas mal d’embûches dans le secteur de l’éducation, entre autres les effectifs pléthoriques dans les salles de classes, le manque de matériel didactique, les programmes mal ficelés, etc.
Les enseignants déplorent le fait que le Président de la République s’est fâché contre le préavis de grève, car la réunion du 17 janvier 2022 entre le ministre en charge de l’éducation nationale et les syndicalistes sous la médiation du CNDS s’est bien passée. Le ministère de l’Education Nationale et de la Recherche Scientifique a accepté de suspendre l’organisation du test de niveau à l’endroit des enseignants de l’école fondamentale qui visait la détection du niveau de compétence de chaque enseignant en attendant les conclusions des négociations qui seront menées sous la médiation du CNDS. Tenant compte de cet engagement du ministère de l’Education Nationale et de la Recherche Scientifique, les syndicats des enseignants affiliés à la Coalition des Syndicats des Enseignants pour la Solidarité Nationale (COSESONA) ont accepté de surseoir à leur intention de déclencher une grève générale afin de créer un climat favorable aux négociations.
Quant aux propos du Président de la République du Burundi, le syndicaliste Jean Manuma indique que le droit à la grève est reconnu par la constitution, le code du travail et les conventions internationales qui ont été ratifiées par le Burundi
Notons que sur twitter, Parcem, une organisation militant pour les droits de l’homme et de la bonne gouvernance au Burundi a invité le gouvernement burundais à plus de prudence. Elle rappelle que le droit de grève est reconnu par la constitution du Burundi en son article 37 avant de conclure qu’en démocratie, « la force de l’argument prime sur l’argument de la force ».