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Le projet DUKURIREHAMWE : La société civile au coeur du développement socio-économique

Le projet DUKURIREHAMWE, financé par l’Union Européenne, mis en œuvre par le consortium Care International au Burundi, ActionAid au Burundi et REJA vise le  « Renforcement des capacités de la société civile burundaises pour accroître leur contribution au développement socio-économique »
Ce projet compte organiser une table ronde des organisations de la société civile burundaise en date du 7 au 8 juillet 2022 dans les enceintes de l’hôtel Royal Palace. 
Différents thèmes de Plaidoyer dans les secteurs d’intervention du projet (Education, Santé, Agriculture, Environnement, Protection sociale et de la lutte contre les VBGs, Emploi et l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes seront abordés pour plaider en faveur de l’amélioration des politiques publiques favorisant le développement socio-économique  de la population burundaise

 

Les OSC appuyées par l’UE à travers le projet DUKURIREHAMWE organisent une table ronde en date du 7 au 8 juillet 2022 dans les enceintes de l’hôtel Royal Palace.

En marge de cette table ronde des organisations de la société civile,  certains  thèmes  de plaidoyer identifiés dans les six secteurs seront débattus.

Secteur Environnement et changements climatiques

Concernant le secteur de l’environnement, Innocent Banigwaninzigo, Lead du secteur  fait savoir que  le premier thème qui sera développé est la lutte contre la déforestation au Burundi.  La raison pour laquelle on va insister  sur la lutte contre la déforestation est que le Burundi dispose de forêts qui couvrent environ 172.000 hectares représentant 7% du territoire national, dont 103.000 ha occupés par les forêts naturelles et 69.000 ha de forêts artificielles. Pourtant, le taux annuel de déforestation atteint actuellement 9%.  Les causes sont multiples.  La première est l’utilisation du bois comme principale source d’énergie. Pour cela, l’environnementaliste Banigwaninzigo fait remarquer que  l’application rigoureuse et stricte du Code forestier s’avère indispensable. Le deuxième thème  qui sera développé dans ce secteur est  l’Inclusivité dans la mise en œuvre de la CDN (Contribution Déterminée au niveau National, 2ème  génération).   Selon Banigwaninzigo Innocent, l’évaluation de la première CDN (2015-2020) du Burundi a montré que le taux de réalisation est estimé à 40%. Les analyses ont montré que l’élaboration de la CDN en 2015 s’était déroulée dans un contexte de faible inclusion (4 OSCs) des parties prenantes, notamment de la Société Civile (SC) du domaine de l’environnement et du changement climatique et des communautés locales.   Les OSC du domaine de l’environnement et du changement climatique estiment  alors qu’il est urgent de mettre en place un plan de mobilisation de toutes les parties prenantes pour l’appropriation de la CDN 2020-2025 afin d’atteindre les résultats escomptés.

Les effets du changement climatique sont déjà perceptibles. Les OSC estiment alors qu’il est urgent de mettre en place un plan de mobilisation de toutes les parties prenantes pour l’appropriation de la CDN 2020-2025.

Dans Le secteur Agriculture

Concernant le secteur agricole, le premier thème  choisi est l’ « Accès au matériel agricole ». Selon Vincent Ndizeye, l’objectif est de mettre  en place un programme de subvention du matériel agricole. Selon toujours lui, la raison du choix de ce thème est que  la population burundaise est essentiellement agricole (95%).   Malheureusement, l’agriculture reste de subsistance et de faible productivité liée au manque d’éducation et de formation. Les techniques de production utilisées sont archaïques.  Le deuxième thème est le repeuplement du petit cheptel.  Selon Ndizeye,  au Burundi le petit cheptel est constitué des animaux domestiques de petite taille : chèvres, moutons, porcs, volailles, poissons, abeilles, etc  par opposition au gros cheptel composé de bovins.  Déjà, le document d’orientation de la politique environnementale, de l’agriculture et de l’élevage met en exergue la volonté du Gouvernement d’importer et de diffuser en milieu rural  210 000 caprins, 140 000 porcins et 5 000 ovins. L’objectif vise l’augmentation annuelle d’au moins 5% du cheptel.

L’agriculture reste de subsistance et de faible productivité liée au manque d’éducation et de formation. Les techniques de production utilisées sont archaïques.

Dans le secteur protection sociale et de lutte contre les VBGs

Le premier thème  qui sera développé est la consommation des drogues et autres substances stupéfiantes.  Selon Mme Mélanie Nakubu, l’objectif est de mettre en place une Politique Nationale pour la prévention, la gestion et le contrôle de la consommation de l’alcool, des drogues et d’autres substances stupéfiantes.  Malgré qu’il soit difficile d’évaluer le nombre de consommateurs de drogues et de boissons prohibées, certaines études permettent de dire que  le taux de séroprévalence est de 10,2 % chez les usagers de drogues injectables comparativement au taux de séroprévalence nationale qui est inférieur à 1 %.  5,4 % des usagers de substances injectables sont atteints d’hépatite C.  

Le deuxième thème qui sera développé dans ce secteur est  l’« Employabilité des personnes vivant avec un handicap».  Selon toujours Mélanie, les OSC du secteur vont  plaider pour  la promotion de l’accès à l’emploi pour les personnes vivant avec handicap, l’égalité des chances d ’accès à l’emploi pour les personnes vivant avec handicap et la prise en compte de la dignité humaine pour les personnes en situation d’handicap. 

Le secteur de l’éducation 

Concernant le secteur de l’éducation, le premier  thème qui sera développé est le  renforcement du système éducatif, indique Cassien Gashirahamwe de l’organisation BAFASHEBIGE et lead du secteur éducation. Selon lui, les conditions d’apprentissage précaires dans l’enseignement fondamental ont un impact sur les performances scolaires.  On souhaite qu’il soit mis  en place un fonds spécifique et ponctuel pour la fourniture d’équipements scolaires et pédagogiques comme les bancs-pupitres, les tableaux, les manuels scolaires et les cahiers. Et ce thème est choisi parce qu’il répond aux préoccupations du Gouvernement qui, à travers le PND, prône le renforcement du système éducatif et l’amélioration de l’offre de formation.  

Le deuxième thème est l’amélioration de l’offre de formation pour plaider auprès du ministère de l’Education Nationale et de la Recherche Scientifique pour la mise en application effective de l’ordonnance ministérielle de 2012 qui fixe le temps scolaire de 850 à 950 heures.  L’instauration de la double vacation dans la gestion des flux est à l’origine de la réduction du temps scolaire. Initialement prévu de 850 à 950 heures par l’ordonnance ministérielle de 2012, le temps scolaire a chuté et est passé  au cours de l’année scolaire 2019-2020 autour de 600 heures pour les groupes pédagogiques à double vacation. Or, ceux-ci représentent 46% de l’ensemble.

Les conditions d’apprentissage précaires dans l’enseignement fondamental ont un impact sur les performances scolaires.

L’emploi et l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes au rendez- vous

Quant au secteur de l’emploi et l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes,  Julien Ngendakumana de l’organisation lead  indique que le premier thème  qui sera évoqué est  la coordination nationale de l’emploi et cela dans l’objectif de plaider pour la mise en place d’un cadre de coordination des interventions sur l’employabilité et l’entrepreneuriat des jeunes prévu par la Politique Nationale de l’Emploi. Le deuxième thème qui  sera abordé est le renforcement du partenariat public – privé  (PPP) existant.  L’objectif est de plaider pour le renforcement du partenariat public- privé existant pour l’insertion des jeunes diplômé(e)s sur le marché du travail. Selon lui, cette Table Ronde permettra aux différents décideurs et intervenants d’échanger et de comprendre la nécessité du renforcement et de la pertinence du Partenariat public-privé sur l’employabilité et la promotion d’un emploi décent pour la jeunesse afin de  réduire le chômage des jeunes.

La santé à l’honneur

Quant au secteur santé, Dr. Ezéchiel Bizimana de l’organisation ABCMAV et lead du secteur, il confie que le premier thème  qui sera développé est la Planification Familiale (PF) au Burundi. La raison est que le Burundi connait une forte pression démographique avec une population d’environ 12, 624,840 d’habitants sur une superficie de 27,834 km² en 2022. Avec une densité moyenne de 454 hab /km² en 2022, le Burundi se classe le 28ème  pays le plus densement peuplé au monde et occupe le 3ème rang  en Afrique, selon les données de la Banque Mondiale 2022.  

Le deuxième thème sur la santé est  la mise en application de la déclaration d’Abuja de 2001 sur la santé.  La raison est que le système de santé au Burundi est largement sous-financé et connait une grande dépendance vis-à-vis du financement extérieur. A titre illustratif, la dépense moyenne dans le domaine de la santé par habitant est de 39 749 FBU (20,19 USD) inférieur à la norme de 112 USD (OMS), soit l’équivalent de 200 000 FBU (résultats des comptes de la santé 2016-2018).

Le système de santé au Burundi est largement sous-financé et connait une grande dépendance vis-à-vis du financement extérieur. (Photo : Unicef)

Jean Nimubona, le chef du projet DUKURIREHAMWE  laisse entendre que, le projet Dukurirehamwe est bâti sur le constat que la société civile burundaise ne participe pas pleinement à la formulation, à la mise en œuvre et au suivi-évaluation des politiques publiques.

Pour atteindre son objectif, Nimubona indique que le projet a orienté ses actions autour du renforcement des capacités de la société civile et de l’amélioration de la collaboration entre les organisations de la société civile et les autorités publiques. Depuis février 2020 et après 2 ans d’action,  le projet a permis de  structurer plus de 120 organisations dans 6 espaces sectoriels primordiaux du développement au Burundi, à savoir: l’emploi et l’entrepreneuriat des jeunes et des femmes, la santé, la protection sociale et la lutte contre les violences basées sur le genre, l’environnement et le changement climatique, l’agriculture et la sécurité alimentaire et enfin l’éducation. On a aussi pu créer et mettre à disposition une plateforme virtuelle pour permettre à toutes les organisations de la société civile d’accéder aux informations. Le renforcement des capacités des organisations de la société civile et  les formations sur le cadre légal des ASBL au Burundi, la gestion des subventions, la vie associative, la communication organisationnelle et le plaidoyer, la cocréation et l’innovation et bien d’autres…ont eu lieu.  Et d’ajouter l’appui technique et financier dans la définition, la mise en œuvre et le suivi des plans de plaidoyer issus des 6 espaces sectoriels.

Et de signaler que l’une des perspectives du projet est la mise en place des cadres d’échange fonctionnels et dynamiques entre les espaces sectoriels de la société civile et les ministères sectoriels.

 

LE ROLE DE LA SOCIETE CIVILE DANS LE DEVELOPPEMENT SOCIO-ECONOMIQUE DU BURUNDI 

Par Dr Guillaume Ndayikengurutse

Au Burundi, les premières organisations de la société civile au sens contemporain du terme ont commencé à émerger au début des années 1990 avec le vent de la démocratisation du pays. Aujourd’hui, elles oscillent autour de huit mille et comptent du moins en principe contribuer à la démocratisation et au développement socio-économique du pays.

La société civile constitue un acteur incontournable dans le développement socio-économique du pays. Formée par des organisations citoyennes qui ne visent ni les intérêts matériels ni l’exercice du pouvoir, la société civile assume des fonctions importantes dans le secteur de la démocratisation et du développement socio-économique. En effet, les organisations de la société civile renforcent les capacités de la population cible du développement en tenant compte des secteurs jugés prioritaires par l’Etat. Elles contribuent également à la priorisation des besoins à résoudre lors de l’élaboration des documents-cadres tels le PND, les PCDC, etc. Aussi, les organisations de la société civile participent-elles à la mise en œuvre des politiques du Gouvernement en exécutant leurs propres plans d’actions. Ainsi, se retrouvent-elles dans une posture de la subsidiarité et de la complémentarité par rapport à l’action gouvernementale.

Cependant, dans la mise en œuvre de cette noble mission au service du développement socio-économique, les OSC burundaises se heurtent à de nombreux défis. Dans un contexte comme celui du Burundi, la recomposition des liens traditionnels (ethnies, clans, liens familiaux) dans la sphère de la société civile constitue une entrave à son efficacité. L’instrumentalisation de la société civile par les acteurs politiques peut également être rédhibitoire pour le fonctionnement normal des organisations qui en sont membres. Par ailleurs, la dépendance financière des OSC les placent dans une posture de vulnérabilité par rapport à leurs bailleurs les poussant parfois à adapter leur agenda aux exigences de ces derniers. Il en est de même de la problématique de la gouvernance interne des OSC qui les rend fragiles et les empêchent d’émerger comme acteurs prééminents dans le développement du pays. 

Face à ces défis, quelques pistes peuvent être suivies par les OSC pour être efficaces dans leurs missions. La conformité au cadre légal en vigueur dans le pays constitue une condition pour y parvenir. Les organisations de la société civile doivent également se soumettre à un exercice d’autolimitation en s’autocritiquant et en évaluant leur conformité aux normes de l’Etat de droit. Ainsi elles s’assurent de la disponibilité de l’expertise nécessaire pour porter au plus haut niveau les intérêts qu’elles défendent. 

C’est en tenant compte de tous ces enjeux que le projet DUKURIREHAMWE participe au renforcement des capacités des OSC œuvrant dans les différents secteurs de la vie du pays (Santé, Education, Protection et lutte contre les Violences Basées sur le Genre, Environnement, Agriculture, Emploi et Entrepreneuriat des jeunes et des femmes) afin de leur permettre de contribuer éefficacement à la mise en œuvre des politiques du Gouvernement en la matière.

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