On dit que le football est un sport-roi. Pour preuve, il est pratiqué dans tous les coins et recoins du pays. La Fédération du Football du Burundi a pris beaucoup d’initiatives pour développer ce sport. Depuis 2017, il est prévu que chaque équipe évoluant en 1ère division reçoit une enveloppe de 15 millions de Francs Burundais (FBu) de la FFB. Des infrastructures sont construites depuis une quinzaine d’années. En dépit de ces efforts louables, les résultats se font encore attendre. Qu’est-ce qui explique les défaites récurrentes des équipes Burundaises ?
La mauvaise gestion des équipes, le manque de matériels et de fonds pour financer les clubs, tels sont les grands défis auxquels fait face le football burundais. Aussi, la politique s’est-elle progressivement invitée dans l’organisation des équipes. « Nous voyons aujourd’hui qu’il y a des postes qui ne devraient pas exister dans le staff de l’équipe, en plus d’y amener des personnes sans aucune notion de football.
Pour un match tendu, le coach et le staff doivent surmotiver les joueurs. Impossible chez les clubs tant que certains membres du staff n’ont aucune notion dans le football », s’indigne Pierre Claver Rurakamvye connu sous le nom de Abega, à la fois ancien joueur, ancien directeur technique à la FFB et président fondateur du club «Les Elites».
« Il n’y aura jamais de bons joueurs tant qu’il n’y a pas d’académies »
Constantin Mutima, Team Manager de l’équipe nationale n’y va pas par quatre chemins. Le football burundais est un des rares sports qui n’a pas de pépinières pour détecter les nouveaux talents. «Nous savons que dans les quartiers, beaucoup de jeunes s’intéressent au football. Pleins de célébrités qu’a connu le pays évoluaient dans ces quartiers», fait-il savoir. Du côté technique, certains clubs ont vraiment de bons équipements. Mais ceux-ci sont largement insuffisants. Dans certains petits clubs, ils sont carrément inexistants. Imaginez un club de 1ère division qui s’entraine avec moins de 5 ballons. Les présidents des clubs se démènent pour trouver des chaussures, mais elles sont extrêmement chères. Une paire coûte plus de 100 mille FBu. Quand même, les joueurs de la 1ère division ont tous au moins une paire de chaussures.
Le problème financier handicape les clubs locaux
Comme le souligne Abega, les équipes qui jouent dans le championnat national souffrent de manque de subsides pour encadrer et faire évoluer les joueurs locaux. De plus, il n’y a plus de motivation. «Ils sont presque laissés pour compte, car les clubs ne les paient pas comme il faut. Et comme on aime le dire, on ne récolte ce qu’on a semé», précise-t-il.
Théodore Ntunga, ancien journaliste sportif à la Radiotélévision Nationale du Burundi (RTNB) estime les défis sont nombreux pour espérer avoir de bons joueurs dans le championnat national. Lui qui a vu l’évolution du football burundais déplore que la situation soit loin d’être positive puisque les clubs manquent cruellement de moyens pour bien prendre en charge leurs joueurs. Pour rivaliser avec les grands clubs du continent, il nous faut un staff approprié. Ici tous les entraineurs de la 1ère division sont qualifiés, mais ils sont encore jeunes. Ils n’ont pas encore acquis l’expérience. Cela viendra avec le temps. Les clubs ont des médecins. C’est bien, mais il n’y a pas de préparateurs physiques par exemple. Or ces derniers sont indispensables pour mettre les joueurs dans de bonnes conditions. L’encadrement doit être strict pour inculquer à nos jeunes les règles du football moderne. Encore une fois cela exige des moyens. On ne va pas imposer beaucoup de règles à un joueur qu’on ne paie pas ou qu’on paie très mal.
Le sponsoring des entreprises locales, une des solutions
Il faut que la loi relative au sponsoring que le gouvernement a promulgué soit suivie d’effets. Selon toujours Abega, le gouvernement devrait inciter les entreprises locales à sponsoriser au moins une équipe chacune. Dans les années 1990, les joueurs de Vital’o et d’Inter FC recevaient un salaire de la Brarudi. D’ailleurs, même les noms de ces clubs provenaient des noms des produits Brarudi. «Cette période est considérée comme l’âge d’or du football Burundais. Vilat’o était allé jusqu’en finale de la coupe des clubs champions. Les entreprises doivent s’impliquer beaucoup plus dans le sport. C’est comme ça que ça marche ailleurs», conseille-t-il.
Nos jeunes joueurs ont besoin d’être encouragés. Les résultats doivent refléter les efforts qu’ils fournissent. Doit-on passer par des réformes dans le domaine du sport? Doit-on y injecter des moyens? Si les autres pays le font, le Burundi doit aussi pouvoir le faire pour espérer s’imposer dans les grandes compétitions régionales, continentales et mondiales.