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La rétention de l’information ne profite à personne

La liberté de la presse est intimement liée  à la liberté d’expression. Quand les gens s’expriment librement sans faux fuyant sur les ondes médiatiques,  les médias recouvrent leur liberté de commenter, de décrypter et d’analyser l’actualité. Les professionnels sont à l’aise quand ils diffusent des analyses, des dossiers complets sur la gouvernance économique, etc. 

Bref, les médias deviennent libres et indépendants.

Benjamin Kuriyo, Directeur de publication

Malheureusement, la situation qui prévaut sur le terrain est toute autre. Certains officiels ont fait de la rétention de l’information leur bouclier. Ils n’hésitent pas à renvoyer les journalistes au diable. Dans le pire des cas, les autorités administratives verrouillent complètement l’accès à l’information. Et ce, malgré l’injonction du chef de l’Etat de faciliter le travail des professionnels des médias. D’autres font semblant de collaborer avec les médias mais décident à qui donner l’information et à qui ne pas la donner. Certes, il y a une certaine ouverture et un certain regain de la confiance, mais il reste du chemin à faire. Combien d’émissions ajournées ou les formats réadaptés faute de personnes ressources. Il y en a  assez en tout cas. 

Les sources officielles demeurent un casse-tête pour les médias locaux. Parfois, nous rédigeons des correspondances pour avoir l’autorisation d’interviewer tel ou tel autre cadre. Ce qui entrave le travail des journalistes qui doivent produire des informations qui s’inscrivent dans l’actualité et en même temps veiller à l’équilibre de l’information.  

A l’ère du numérique, la rétention des informations ouvre la voie aux rumeurs et à la désinformation sous toutes ses formes. En outre, d’autres défis hantent le secteur médiatique. La communauté tolère difficilement la voix discordante. Ce qui bloque complètement le débat contradictoire. Dans ces conditions, les personnes ressources s’expriment avec réserve ou sous couvert d’anonymat de peur d’être taxées d’ « ennemis du pays » ou d’être assimilées aux fauteurs de troubles. 

D’une part, le manque du matériel et d’autre part, la complaisance handicapent le métier de journaliste. Certains journalistes ignorent qu’ils sont au service de la vérité. Ils enfreignent sciemment les règles déontologiques et versent dans des commentaires inutiles. Au niveau des contenus, le divertissement et les faits divers grignotent l’espace aux informations fouillées, documentées ou expliquées. Les médias se limitent à l’information rapportée très assimilable à de la communication institutionnelle. Il importe de souligner que les dirigeants sont redevables envers les citoyens. Il faudra discerner le rôle des attachés de presse/communiquant qui défendent l’image des institutions, alors que les médias servent l’intérêt général. 

La tendance est de considérer les medias comme des oiseaux de mauvais augure. Certains experts préfèrent fermer les yeux alors que leurs opinions comptent pour alimenter un débat contradictoire.  Les medias constituent un des piliers de la démocratie dans le sens où ils prônent le principe du rendre compte, le débat citoyen, les droits de l’homme, etc. 

Le public a besoin d’être informé sur ce qui se passe dans son pays et dans le monde. Les médias sont là pour analyser l’impact des décisions prises le vécu quotidien des personnes. S’il s’agit des licenciements ou des cas de destitution, ce sont les hommes et les femmes des médias qui vont informer le public sur le sort de ces dossiers. 

Les consommateurs de l’information s’éduquent, s’informent et se divertissent à travers les médias. Dans ce cas, l’information devient un bien public. Personne n’a le droit de  priver l’accès du public à une information de qualité.   Chères autorités, le journalisme professionnel n’a jamais constitué un crime. Non plus les médias ne sont pas vos ennemis. Les professionnels des médias respectent trois principes d’or, à savoir : l’Exactitude, l’Impartialité et la Responsabilité. Nous devons dire sans nuire, dénoncer sans choquer et montrer sans choquer. 

Le journalisme est un métier basé sur la confiance et la confidentialité  entre les détenteurs de l’information et les journalistes. La validation des contenus par une tierce personne autre que les rédacteurs en chef remet en cause l’indépendance des medias. Ces derniers portent la voix des sans voix, les préoccupations des communautés du Burundi du fin fond du pays, etc. Les programmes et les politiques doivent être réalisés en collaboration avec les médias. Sinon, le slogan « jamais sans les médias » se métamorphosera en « jamais avec les médias ».

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