Site icon Burundi Eco

Rumonge : des mangues en mal de débouchés

Les mangues d’un champ de Burundi Agribusiness Development Association (BADEA) tendent vers la maturité. L’association se dit préoccupée par le manque de débouchés. Cela surtout même que l’usine de transformation des fruits qui a été installée à Rumonge n’a été qu’un projet mort-né

C’est depuis 2009 que l’idée d’investir dans la culture des mangues est née, explique Bernard Masumbuko, président de la BADEA. Cela à travers une association composée par des membres issus d’une même famille. L’objectif était de produire non seulement pour la consommation, mais aussi pour la commercialisation. « Sans oublier la création d’emplois », indique le sexagénaire, initiateur de l’association. M.Masumbuko dit qu’il a été inspiré par les cultivateurs des fruits tropicaux de la province Cibitoke, au Nord-Ouest du pays. « C’est là même où nous nous sommes approvisionné en premiers plants de mangue », précise-t-il avant de signaler qu’il a abandonné le métier de pêcheur.

« Celui-ci est encore rudimentaire et ne peut pas fournir une production consistance, alors que nous avons toujours rêvé d’exporter. C’est pourquoi nous avons préféré investir dans la culture de la mangue ainsi que dans d’autres cultures comme le haricot, le maïs…», fait-il remarquer.

Bernard Masumbuko, président de la BADEA : « L’idée de cultiver les mangues est née dans le but de produire non seulement pour la consommation, mais aussi pour la commercialisation. C’était aussi pour la création de l’emploi ».

Incertitude du marché d’écoulement

A quelques jours de la récolte des mangues, les branches des manguiers peinent à tenir sous le poids des fruits. M.Masumbuko a installé des tuteurs pour soulager les branches du poids extrême des fruits.

Normalement, affirme-t-il, la culture des fruits tropicaux est rentable. Il suffit de repiquer son plant et d’en faire le suivi dès ses premiers jours. «Quand les plantations commencent à donner des fruits, il ne reste qu’à faire le labour et la lutte contre les insectes ravageurs. Au niveau des mangues, le ministère de l’Environnement, de l’Agriculture et de l’Elevage nous aide en nous octroyant des pièges pour traquer les mouches blanches», informe le président de la BADEA.

Cependant, déplore-t-il, nous manquons de débouchés pour nos fruits. Une crise qui a frappé le pays en 2015 et l’actuelle vague de Covid-19 a fait que nous vendons les fruits sur le marché local.

« Avant, nous parvenions  à encaisser 10 à 12 millions de FBu par saison grâce aux mangues récoltées dans un champ de 4 hectares. Des femmes en provenance de Bujumbura et Nyanza-Lac venaient s’y approvisionner en mangues. Aujourd’hui, c’est rare qu’elles s’y approvisionnent, car elles aussi n’ont pas de clients», souligne M.Masumbuko.

Pour le moment, quelques fruits déjà mûrs sont exposés en tas sur une table pour attendre que des passagers allant de Bujumbura, à Rumonge ou dans d’autres coins du pays puissent les acheter. Le prix du tas est fixé soit à deux mille FBu, soit à 1000FBu voire à 500 FBu.  « Ce tas que je viens d’acheter à deux mille FBu chez M.Masumbuko s’achète à cinq mille FBu  à Bujumbura», témoigne Jean Berchimas Rurihafi, un chauffeur d’un véhicule de type « Jeep » habitant à Bujumbura et qui fait souvent le trajet Bujumbura-Rumonge.

M. Masumbuko déplore même qu’une usine de transformation des fruits qui constituait une lueur d’espoir pour les cultivateurs de Rumonge se soit transformée en une illusion. « Le projet n’a pas émergé », rappelle-t-il.

Conditionnement et conservation des mangues, un défi

Le président de la BADEA avoue qu’on n’a pas encore de moyens spécifiques pour conserver les mangues. « Si on ne trouve pas de clients, on laisse les fruits dans le champ et ils sont exposés à tous les maux comme les insectes ravageurs ou la détérioration », certifie-t-il.

Si on récolte les mangues, continue M.Masumbuko,  on les mets dans des paniers, seul moyen de les conserver sur de courtes durées. Quant à ceux qui achètent les mangues, ils les emballent dans des sachets biodégradables, les transportent dans les paniers ou les déposent dans les véhicules. Ceux-ci servent à la fois de moyen de transport et de moyen de conservation. Et d’insister: «Ces fruits ne peuvent pas tenir longtemps».

Des lendemains meilleurs

Consolateur Nitunga, gouverneur de la province de Rumonge reconnait une surproduction des fruits pendant certaines périodes de  récolte.

Pour que les agriculteurs ne travaillent pas à perte, il déclare que l’administration projette de construire une industrie de transformation agroalimentaire dans la province  pour transformer ces fruits. Celle-ci  sera appuyée par les communes. Les études de faisabilité sont en cours. Elles sont en train d’être réalisées par la Banque Mondiale (BM).

« Une fois approuvée par le gouvernement, le projet va directement démarrer. Même le lieu d’exécution du projet est déjà repéré. En attendant, nous prévoyons chercher les débouchés  dans les autres provinces. Comme nos fruits sont appréciés en RDC, nous allons les y acheminer tout en les accompagnant », tranquillise le gouverneur.

A toute chose, une solution

La culture de la mangue ne se pratique pas seulement au Burundi. Même ailleurs elle se pratique et enregistre également des pertes au moment de la récolte. Au Kenya par exemple, l’Institut de recherche agricole  démontre que les producteurs de mangues perdent souvent 40 à 45% de leur récolte. Cela malgré l’explosion de la demande locale et sur les marchés régionaux. Les causes principales de ces pertes sont les mauvaises techniques de récolte et de conditionnement  en plus des ravageurs et des maladies.

Les mangues récoltées dans un champ de 4 hectares sont étalés sur la RN3 sous un parapluie. Cela pour attendre que les voyageurs puissent les acheter.

Cependant, des machines multi-aliments y ont été introduites pour la transformation des fruits. Ce type de machine peut transformer 7,8 tonnes de mangues toutes les six heures et peut également servir dans la transformation des autres fruits.

Selon Selina Wamucii (plateforme qui aide les entreprises dans le monde à acheter et importer facilement des produits alimentaires et agricoles de n’importe quel pays africain), en Tanzanie, les mangues sont les fruits les plus communs que les habitants cultivent.

La plateforme certifie que la Tanzanie est le 17ème pays  exportateur mondial de fruits du monde, avec une marge de production d’un demi-million de tonnes en 2011.

« Presque toutes les mangues de Tanzanie sont grâcieusement fournies par des agriculteurs pauvres dans les zones rurales. Les producteurs commerciaux sont principalement à moyenne et grande échelle », stipule la plateforme.

Ce qui est encourageant, c’est que les variétés commerciales greffées sont arrivées dans le comté dès le début des années 2000. Elles sont encore peu produites, car ils ne représentent que 1% de la production totale et sont réservées aux grandes plantations.

Pour cette plateforme, les principaux marchés des mangues de Tanzanie sont le Kenya  et les USA.

La plupart des producteurs familiaux qui cultivent les variétés traditionnelles le font sur de petites parcelles ne dépassant pas deux ares. Ceux qui cultivent le Kent et d’autres variétés commerciales le font sur des parcelles de deux ares et demi et plus. Ils s’abstiennent d’utiliser des pesticides et fertilisent leurs arbres fruitiers avec du fumier de ferme au lieu des engrais chimiques.

La récolte des mangues se fait à des étapes différentes. La raison est que  tous les fruits d’un arbre ne mûrissent pas en même temps. Les indicateurs prioritaire pour la cueillette sont notamment l’éclat du rouge sur le vert, la fermeté et la grosseur du fruit maintenu légèrement parfumé.

Au moment de la récolte, tous les ouvriers agricoles portent des gants et sont entièrement vêtus d’EPI pendant la récolte tôt le matin. Ils coupent les tiges avec un couteau bien aiguisé avec environ 1 à 5 centimètres de tige attachée au fruit.

Pour les fruits haut placés, les ouvriers utilisent de longs bâtons de bambou avec des paniers et couverts pour les atteindre. Ils retirent chaque sac en plastique contenant la récolte dans une nuance prête pour sa livraison à l’entrepôt.

Et puis  les mangues sont amenées à la chaîne de lavage. Celle-ci les trie automatiquement en groupes pour le lavage. Après rinçage et séchage, les fruits sont préparés pour la zone d’emballage. Tous les morceaux mûrs, infectés ou débordant de sève entrent dans une usine de transformation où ils peuvent être transformés en jus.

Les mangues sont par après emballées dans des cartons de 1,6 kilogrammes avec un format d’emballage monocouche. Il existe également un emballage plus petit de 6 kilogrammes, également disponible dans un format monocouche.

Il existe aussi un emballage alternatif. C’est une boîte en panneaux de fibres d’une capacité de 4,5 kilogrammes. Celle-ci est remplie en nombre plutôt qu’en poids. Les fruits sont enveloppés à l’intérieur du carton ou de la boîte avec du papier doux. Les emballages contiennent le nom de la variété, la date d’emballage, le nombre de pièces  et le poids net.

Les mangues sont ensuite conservées dans un environnement frais et sec dans une chambre froide à une température de 5 à 7 degrés Celsius. La température est maintenue même pendant le transport de la ferme à l’entrepôt puis à l’aéroport par les camions frigorifiques. Les produits sont certifiés.

Selina Wamucii rappelle que la mangue est un fruit nutritif riche en vitamine C à 60% des besoins quotidiens. La teneur en vitamine A de la chair aux couleurs vives pour une bonne vue est de 21%. La proportion de fibres alimentaires pour une bonne digestion est de 6% de la valeur quotidienne. La vitamine B-6 représente 5% de la valeur quotidienne. Les minéraux comprennent le magnésium à 2% et le calcium à 1%, tous deux importants pour la solidité des os et des dents.

Quitter la version mobile