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Vers la maîtrise des exonérations ?

Le montant des exonérations accordées ne cesse d’augmenter. Pourtant, le budget de l’Etat prévoyait le même montant au cours des cinq dernières années, soit 18 milliards de FBu.  La récente sortie médiatique du chef de l’Etat sur la mobilisation des recettes internes alimente le débat.

En marge de la célébration de la journée nationale du contribuable, le Chef de l’Etat a instruit au ministère ayant les finances dans ses attributions de mettre en place une commission chargée d’inspecter les procédures d’exonérations, leur utilité, leur rentabilité et leur équité. Le but est de déterminer si les mesures d’exonérations apportent un réel surplus au pays et s’il convient de les maintenir ou de les suspendre.

Benjamin Kuriyo, Directeur de publication

Lors de l’analyse de la loi budgétaire en cours, certains députés ont proposé la suppression des exonérations arguant que ces dernières exercent un poids sur le petit contribuable toujours pauvre. « …, les exonérations sont accordées aux grands opérateurs économiques ». Le ministre du Bugdet, des Finances et de la Planification Economique, Dr Domitien Ndihokubwayo a rétorqué que les exonérations sont accordées aux investisseurs et pas à des magnats comme certains le croient. « Si vous n’avez pas investi dans un secteur visant le développement du pays, vous n’êtes pas éligible aux exonérations ».

Pour le ministre Ndihokubwayo, les exonérations sont assimilables aux subventions de l’Etat pour faciliter investissements. La suppression des exonérations risque de repousser les investisseurs étrangers. Logiquement, on accorde des exonérations en fonction des retombées positives à moyen terme sur l’assiette fiscale et, partant, sur l’économie nationale, a-t-il justifié.

Chaque année, le ministère des Finances prend des mesures visant à maîtriser les exonérations, mais en vain. La question relative aux exonérations a été également soulevée lors des récentes assises sur le développement économique du pays qui se sont déroulés en novembre dernier. Dans son expose sur la dette publique, Dr Ephrem Niyongabo a souligné l’impact des exonérations sur l’économie. Il affirme que les exonérations fiscales constituent un instrument de politique économique pour stimuler la croissance économique. Cependant, dans le contexte économique actuel caractérisé par une dette publique élevée et un déficit budgétaire qui reste important, on doit maîtriser les exonérations fiscales.

La gestion des exonérations pose problèmes compte tenu de l’écart entre les prévisions et les réalisations au niveau de la loi budgétaire et l’absence d’un mécanisme de contrôle à priori. Les incitations fiscales sont justifiées par l’hypothèse selon laquelle elles stimuleraient le développement du secteur privé. Cependant, le coût des exonérations n’est pas bien suivi et leurs avantages économiques ne sont pas systématiquement évalués, déplore-t-il.

Dans sa présentation, Libérât Mfumukeko, économiste et ex-secrétaire général de l’East African Community (EAC) n’y pas allé par quatre chemins. «Les incitations fiscales ne sont pas la raison principale pour laquelle les entreprises viennent s’établir dans un pays. Cela étant, elles sont quand même indispensables». Il déplore le fait que les exonérations soient accordées aux importateurs des produits finis ou semi-finis destinés à la revente. Les droits de douane et la taxe à l’importation cumulées atteignent plus de 224 milliards de FBU pour l’exercice 2020-2021. Par contre la part des investisseurs c’est-à-dire les exonérations octroyées aux opérateurs économiques dans le cadre du code des investissements s’élèvent à 52,8 milliards de FBu. Au Burundi, il y a plusieurs mécanismes d’exonérations pour les investisseurs. Généralement, les exonérations accordées à travers la commission de remise des droits concernent les produits finis ou semi-finis destinés à la revente, mais qui entrent au pays comme des matières premières. Cela fausse complètement le jeu de la concurrence. Il a recommandé de faire un audit sur les exonérations afin de distinguer les vrais investisseurs des faux investisseurs. Cette étude va distinguer ceux obtiennent les exonérations parce qu’ils occupent les fonctions politiques de ceux qui bénéficient des exonérations pour investir dans une activité commerciale.

L’Office Burundais des Recettes (OBR) classe les bénéficiaires des exonérations en six catégories. Ce sont notamment les investisseurs pour la première catégorie, les financements extérieurs de l’Etat pour la deuxième catégorie, la troisième catégorie comporte les ambassades et les organisations internationales. La quatrième catégorie est constituée par les associations sans but lucratif, les églises et les coopératives. L’avant dernière catégorie rassemblent les dignitaires du pays, c’est-à-dire les Députés et les Sénateurs et enfin les hauts gradés de l’armée et de la police ainsi que les membres du gouvernement

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