Le lac Tanganyika s’est fâché. Il commence à se faire justice. Au moment où les gens ne cessent d’envahir sa zone tampon en y construisant de luxueuses infrastructures et en y jetant des déchets de toute nature, ce réservoir d’eau laisse éclater sa colère. Ses eaux montent progressivement et envahissent une partie non négligeable de sa zone tampon. Des conséquences fâcheuses s’observent. Les environnementalistes demandent à la population de respecter le code d’eau. Sinon, le danger guette ceux qui passent outre cette loi, car tôt ou tard, la nature finit par reprendre ses droits
Nous sommes jeudi le 2 avril 2020. A 11 h 10 min, le reporter de Burundi Eco quitte le siège de cet hebdomadaire socio-économique situé au quartier Rohero, avenue Moso nº 23 à destination du lac Tanganyika. Suite à la pluie qui ne cesse de tomber sur la ville de Bujumbura, la réalité est que les eaux du lac Tanganyika ont monté et que les infrastructures riveraines ont été inondées. Les exemples les plus emblématiques sont à titre d’exemple les lieux de loisir comme «Lacosta Beach», Safi beach, le resto bar de l’hôtel Safari Gate, etc.
«Lacosta beach» est devenu inaccessible, car la route qui mène vers cet endroit est inondée sur pas moins de 50 m du littoral du lac Tanganyika. Ce n’est pas facile d’y arriver. Seuls les piétons y accèdent facilement, car on est obligé de patauger dans l’eau. Sinon, pour y poser les pieds, on paie de l’argent aux vigoureux garçons qu’on rencontre à cet endroit pour qu’ils te déplacent sur le dos. Pour le propriétaire de «Lacosta beach», cette situation constitue un moment de détresse. Son investissement a été englouti.
Les conséquences de l’inaccessibilité de Lacosta beach
De plus, le personnel de Lacosta beach va perdre de l’emploi une fois que ce réservoir d’eau douce ne se ressaisirait pas. Jacques Nahayo, Kelly Karekezi et Fiacre Keza, amateurs de la sainte mousse rencontrés au quartier Kinindo ne cachent pas leur sentiment d’insatisfaction. «L’inaccessibilité de «Lacoste beach» suite à la montée des eaux du lac Tanganyika constitue un moment de désastre pour nous. Le week-end, nous nous dirigions à cet endroit pour partager un verre avec nos amis chaque fois qu’on dénichait des moyens financiers. C’était devenu une habitude, car c’est une belle plage. Nous la visitions souvent dans l’objectif de nous détendre», révèlent-ils.
Les raisons de s’y rendre sont multiples, ajoutent-ils. Soit on s’asseoit à califourchon sur une chaise en contemplant les vagues du lac Tanganyika, soit sur le sable. De plus, ce réservoir d’eau douce dégage un bon vent agréable à savourer. Pour toutes ces raisons, ils éprouvent un certain dégout du fait que ce beach a été envahi par les eaux du lac Tanganyika.
Quid de la situation au Zion Beach ?
Après Lacosta beach, on a continué la visite vers «Zion beach». A quelques mètres de l’entrée de ce beach, la route est inondée. Le resto-bar dénommé Link Center doté d’une salle de réception et d’une salle de gymnastique moderne situé à gauche de «Zion beach» a été aussi affecté. Un membre du personnel de ce dernier rencontré à l’entrée de cet endroit fait savoir que les activités vont de mal en pis. S’il pleut, les eaux du lac envahissent même la partie intérieure de ce resto bar. Cette situation entrave les activités, car les clients viennent à compte-gouttes.
Le resto-bar de l’hôtel «Safari Gate» envahi par les eaux du lac Tanganyika
Le resto-bar de l’hôtel «Safari Gate» n’a pas été épargné. Lors de notre passage à cet endroit, les gens étaient assis dans les paillotes installées dans la cour de ce resto-bar en train de prendre le petit déjeuner. Il y avait des noirs et des blancs. A cet endroit, l’eau est montée de plus de 15 mètres à partir du littoral du lac Tanganyika. Toute la partie sablonneuse a été inondée par les eaux. Les toilettes de même. Les serveurs qui se sont entretenus avec Burundi Eco indiquent que cette situation de montée des eaux du lac s’observe depuis le mois de janvier 2020. Ils indiquent qu’elle a perturbé les activités de l’hôtel, car elle limite les clients quant au choix de leur emplacement. Ceux qui préféraient s’asseoir tout près du lac à l’ombre des arbres plantés à cet endroit pourront ne pas revenir.
La montée des eaux du lac gâche les activités au Safi beach
A l’endroit dénommé «Safi beach» situé tout près du port de Bujumbura, la situation n’est pas aussi facile. Les eaux du lac ont envahi une partie non négligeable de ce fameux beach. Le calvaire ne se limite pas aux inondations. Ce lac ne cesse d’y vomir les déchets de toute nature qui proviennent des ménages à travers les affluents de ce réservoir d’eau douce. Omar, le propriétaire de ce beach n’a pas de mot pour qualifier cette hécatombe. Depuis que la situation se présente ainsi, cet investisseur est dans la désolation. Il indique qu’il dépense 50 000 FBu par jour pour la collecte de ces déchets avant d’y ajouter les frais de transport de ces derniers. S’il continue à pleuvoir abondamment, son investissement risque d’être englouti. «Safi beach» est connu comme un endroit plus fréquenté par ceux qui fondent leur foyer moyennant 30 000 FBu par couple.
Les conséquences de la montée des eaux du lac à Rumonge
A Rumonge, la situation est la même. Les eaux du lac Tanganyika ont monté de quelques dizaines de mètres ces derniers jours suite à une pluviométrie intense. Suite à cette catastrophe naturelle, Ferdinand Niyokindi, conseiller technique de l’administrateur communal de Rumonge indique qu’une vingtaine de maisons ont été détruites dans le quartier de Kanyenkoko. Des dizaines d’hectares de cultures ont été emportées. De plus, une partie du port commercial et le port de pêche ont été inondés. De surcroît, un pêcheur est mort et un autre a été blessé suite à des vents violents qui balaient le lac. Deux autres ont perdu la vie lorsqu’une maison s’est écroulée sur elles. Certaines pistes rurales sont impraticables.
Respect de la zone tampon, une solution efficace
Les administratifs demandent à la population de respecter la zone tampon de 150 m, car ceux qui sont affectés par la montée des eaux du lac sont des gens qui ont construit ou cultivé dans cette zone tampon en foulant au pied le code de l’eau. Ils précisent que l’implantation de nouveaux quartiers doit être précédée par des études de faisabilité effectuées par l’OBUHA afin de ne pas s’exposer aux risques potentiels.
Les limites du lac n’ont pas toujours été les mêmes que celles aujourd’hui. Ceux qui ont vécu à Bujumbura il y a une trentaine d’années le savent. L’histoire nous apprend que les eaux du lac Tanganyika n’ont jamais été stables. Des périodes de fortes pluies occasionnant la montée des eaux du lac ont été légion depuis belle lurette. Vers les années 1963, Albert Mbonerane, ami de la nature fait remarquer que les eaux du lac ont monté jusque là où sont érigées les infrastructures de la Radio Télévision Natonale du Burundi (RTNB).
Pour éviter le désastre aux riverains de ce lac, le gouvernement n’a pas croisé les bras. Il a mis en place le code de l’eau et d’autres textes dont l’objectif était de sauvegarder l’environnement. Le code de l’eau en son article 5 stipule qu’il est interdit de construire dans les 150 m à partir du littoral du lac Tanganyika. Pour ses affluents, il faut respecter 25 m, pour les lacs du nord 50 m et 5 m pour les rivières de l’intérieur du pays. Nonobstant, voilà que les gens ne cessent de s’accaparer de la zone tampon sur tout le littoral du lac Tanganyika pour y ériger de luxueuses villas. En juillet 2011, le parlement burundais s’était penché sur la question des constructions anarchiques érigées au bord du lac Tanganyika. Des descentes sur terrain se sont multipliées pour s’enquérir de la situation. Néanmoins, les maisons n’ont jamais cessé de pousser comme des champignons.
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