Société

A la fois élève et rabatteur, deux métiers parfois conciliables

Le métier de rabatteur devient de plus en plus prisé aux yeux de jeunes citadins qui sont dans l’incapacité de continuer leurs études ou ceux qui veulent y trouver un gagne-pain. Certains le font par profession quand d’autres s’y retrouventoccasionnellement. Parmi ces derniers, des élèves qui viennent gonfler l’effectif surtout après-midi à la sortie de l’école. L’un d’eux s’est confié à Burundi Eco et relate ses débuts et surtout l’origine de sa double casquette

D’une apparence juvénile et réservée, Franck Nsabimana (nom d’emprunt) est un élève de la 10ème année à un des lycées du quartier Kamenge. Âgé de 18 ans, il essaie tant bien que mal de mener une vie estudiantine en complémentarité avec le métier de rabatteur qu’il exerce sur un des bus reliant le centre-ville aux autres quartiers du nord de la capitale. Orphelin de père depuis son jeune âge et cadet d’une fratrie de 3 enfants, ce jeune a pris son destin à bras le corps : « Ma mère arrivait à peine à trouver de quoi nourrir notre famille, me payer le minerval devenait quasiment impossible. Donc j’ai pris la décision de trouver à tout prix comment gagner ma vie et aider ma mère à trouver de l’argent pour alimenter sa famille », confie ce jeune élève. L’idée de chercher du travail en combinaison avec les études est une chose, trouver ce travail sans perturber l’horaire des cours en est une autre. « Ça m’a pris des jours et des jours pour trouver une alternative et une idée m’est venue en tête, m’essayer au métier de rabatteur comme d’autres jeunes de mon quartier », narre-t-il.

Actuellement, Franck s’est créé des amis. Il parvient à concilier l’ école et le métier de rabatteur. Il peut continuer ses études pour un lendemain meilleur et, grâce à lui, sa famille trouve de quoi mettre sous la dent

Un début émaillé de difficultés

Le métier de rabatteur étant souvent effectué par des jeunes qui n’ont pas pu continuer leurs études, Franck a eu des difficultés à s’intégrer et surtout à se faire accepter. Il raconte que chaque fois qu’il demandait au chauffeur ou à un rabatteur de le laisser s’essayer, il recevait toujours la même réponse : « Tu es encore jeune pour embrasser ce métier », se rappelle-t-il. Persévérance oblige ! Presque tous les après-midi, Franck passait le gros de son temps sur l’arrêt bus   de son quartier pour voir si quelqu’un pourrait lui faire un « piquet » (jargon utilisé dans le transport en commun pour désigner celui à qui on donne le poste pour un petit moment, ndlr) afin de gagner au moins une modeste somme d’argent pour la ration du soir. « Un jour, un jeune voisin rabatteur m’a trouvé sur place et je lui ai demandé de me déposer au centre-ville », nous relate Franck. Il a profité de ce déplacement pour lui confier ses problèmes familiaux et surtout son désespoir de ne pas continuer les études faute de minerval. Compatissant, son ami rabatteur accepte de lui céder un jour un tour pour s’exercer. « Ce jour-là, c’était comme si je venais de toucher le ciel », affirme-t-il avec un petit sourire.

« C’est en forgeant qu’on devient forgeron »

Franck se souvient de son premier jour dans le métier, de son malaise et de sa maladresse. « Je ne pouvais pas regarder les gens dans les yeux. Je n’avais pas la vivacité de racoler la clientèle comme les autres rabatteurs. Heureusement que mon ami était là pour m’épauler et surtout me dire quoi faire et comment le faire », indique-t-il. Les jours suivants, Franck s’est créé des amitiés.  Ce qui lui a permis de gagner quotidiennement un peu d’argent pour lui et sa famille. « Je n’ai pas eu des ennuis avec les autres rabatteurs, car ils ne connaissaient pas qui je suis. Je faisais tout pour ne pas alimenter des soupçons quant à ma vie estudiantine », révèle-t-il avant d’ajouter qu’il peut gagner entre 2.000 FBu et 3.000 FBu suivant l’affluence des clients. Franck doit épargner sur chaque gain pour se payer le minerval car, dit-il, il y a parfois des journées sans piquet.

Le temps de réviser les cours est devenu très court

Une demi-journée à l’école et une autre à la gare routière, Franck a vu son temps de révision des cours s’amoindrir. « Quand je trouve un piquet, je peux rentrer vers 22h. Avec la fatigue, je ne peux pas me hasarder à ouvrir le cahier. Donc je dois me réveiller tôt le matin pour feuilleter les notes », fait-il savoir. Selon lui, une révision de 2 heures suffit pour passer en revue les cours et affirme que malgré tout ce qu’il doit quotidiennement endurer, sa note à l’école est satisfaisante.

Contrairement à ceux qui croient que les rabatteurs sont parfois des voyous ou des gens impolis, Franck trouve ce métier noble et bénéfique. Il peut continuer ses études pour un lendemain meilleur et, grâce à lui, sa famille trouve de quoi mettre sous la dent.

A propos de l'auteur

Bonaparte Sengabo.

Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur.
La rédaction se réserve le droit de ne pas publier les commentaires enfreignant ces règles et les règles de bonne conduite.



éditorial

Sans transparence, pas de confiance

Sans transparence, pas de confiance

Dans une interview accordée au journal Burundi Eco, Albert G. Zeufack, directeur des opérations de la Banque Mondiale pour quatre pays africains, à savoir : la République Démocratique du Congo (RDC), l’Angola, le Burundi et São Tomé-et-Príncipe, en visite au Burundi à la mi-avril 2025, est revenu à plusieurs reprises sur un mot-clé : transparence. « Sans transparence, il ne peut pas y avoir de confiance », a-t-il affirmé. Selon lui, la transparence est essentielle à la mise en œuvre des visions claires formulées par le gouvernement pour conduire le pays vers un développement durable. Il rappelle d’ailleurs :« La transparence des données est fondamentale. »

    Abonnez-vous à notre bulletin

    Journal n° 657

    Dossiers Pédagogiques

    Facebook


  • éditorial

    Sans transparence, pas de confiance

    Sans transparence, pas de confiance

    Dans une interview accordée au journal Burundi Eco, Albert G. Zeufack, directeur des opérations de la Banque Mondiale pour quatre pays africains, à savoir : la République Démocratique du Congo (RDC), l’Angola, le Burundi et São Tomé-et-Príncipe, en visite au Burundi à la mi-avril 2025, est revenu à plusieurs reprises sur un mot-clé : transparence. « Sans transparence, il ne peut pas y avoir de confiance », a-t-il affirmé. Selon lui, la transparence est essentielle à la mise en œuvre des visions claires formulées par le gouvernement pour conduire le pays vers un développement durable. Il rappelle d’ailleurs :« La transparence des données est fondamentale. »
  • Journal n° 657

  • Dossiers Pédagogiques