Société

Affiliation à l’assurance-maladie de base : Le privé ne décolère pas

La Mutuelle de Santé des Entreprises du Secteur Privé (MSP), un organisme chargé d’assurer la qualité de la sécurité sociale pour les travailleurs du secteur privé souffre de la multiplicité des mutualités. Certaines parmi elles sont à caractère commercial. Ce qui constitue un défaut surtout que l’assurance-maladie de base est un régime de protection sociale. Celle-ci exige une solidarité sans faille

 

Janvière Nirutanya, directrice de Mutuelle de Santé des Entreprises du Secteur Privé (MSP) : « L’employeur doit affilier tous ses travailleurs dans les organismes qui gèrent les régimes de base »

« Je suis assurée par l’employeur de mon mari. S’il arrive que je tombe malade, je paie 10% sur les consultations, les examens et les médicaments. Toutefois, il m’est arrivée de subir une césarienne, l’assureur n’a payé pour moi qu’1 million de FBu. J’ai payé moi-même les excédents, soit 400 mille FBu », indique Fidélité Bucumi, une épouse d’un employé d’une entreprise privée.

Selon Janvière Nirutanya, directrice de la Mutuelle de Santé des Entreprises du Secteur Privé (MSP), la législation oblige l’employeur à affilizer tous ses travailleurs dans les organismes qui gèrent les régimes de base.

Qui gère les régimes de base ?

Mme Nirutanya informe que la question sur celui ou celle qui gère le régime de base, notamment au niveau de l’assurance-maladie est toujours récurrente.

« Normalement, si on tient compte des critères de gestion, des règles d’équité dans les cotisations, de l’égalité dans l’accès aux prestations et de la négociation tripartite (gouvernement, représentation des employeurs et représentation des travailleurs), de la mise en place de la MSP depuis les années 1970, de sa création en décembre 2013 et de son opérationnalisation effective le 2 mai 2014, on peut estimer que c’est la MSP qui remplit les conditions exigées pour gérer les régimes de base », fait-elle remarquer.

Et de rappeler : « La MSP gère le régime de base de l’assurance-maladie dans le secteur privé structuré, c’est-à-dire que tous les travailleurs régis par le code du travail devraient être ses assurés ».

Mme Nirutanya annonce qu’au 31 mars, presque 10 ans après, la MSP dispose 89 employeurs affiliés. La mutuelle couvre tous leurs travailleurs et les familles de leurs travailleurs, les enfants à charge et les conjoints.

Et de préciser : « L’adhésion est matérialisée par des cotisations calculées sur le salaire brut. L’employeur cotise 10% du salaire brut mensuel du travailleur. Il supporte 6% et le travailleur supporte 4% au maximum. Ce qui n’empêche pas que l’employeur supporte les 10% ».

Des cotisations plafonnées

La directrice de la MSP reconnait les différences au niveau des cotisations dans les entreprises. Ce qui a amené la MSP à plafonner les cotisations et à exiger une base.

Pour Mme Nirutanya, la cotisation minimale par mois est de 20 mille FBu tandis que la cotisation maximale est de 80 mille FBu. Cela afin de rapprocher les cotisations de façon équitable.

Elle notifie que les cotisations sont perçues par l’employeur. C’est lui-même qui les achemine au MSP.

« Le code du travail prévoit des sanctions allant jusqu’à l’emprisonnement pour l’employeur défaillant au niveau des paiements et des déclarations des cotisations », signale-t-elle.

Le code du travail de 2020 stipule en son article 2020 que quiconque, à quelque titre que ce soit, par fraude, fausse déclaration ou tout autre moyen, obtient ou tente d’obtenir, pour lui-même ou pour des tiers, des prestations qui ne sont pas dues, est passible d’un emprisonnement d’un an à trois ans et d’une amende de cent mille à un million de francs burundais (100 000 à 1 000 000 de FBu) ou de l’une de ces deux peines seulement.

L’auteur de cette infraction est dans tous les cas tenu de rembourser à l’organisme de gestion concerné les sommes indûment payées par ce dernier.

Malheureusement, affirme Mme Nirutanya, il y a un problème de régulation. L’application des pénalités ne peut pas être effective tant que le régime est soumis à une multitude d’acteurs. L’employeur peut te dire qu’il est en retard parce qu’il était ailleurs voire qu’il était allé voir une autre mutualité…

La solidarité d’abord

Mme Nirutanya affirme que la libéralisation cause un problème énorme de suivi du recouvrement des cotisations.

D’ailleurs, réaffirme-t-elle, la multiplicité des mutualités est un défi de taille. L’assurance-maladie de base est un régime de protection sociale. Cela démontre que la protection sociale doit être solidaire et que la solidarité doit être de grands nombres.

« La mutualisation à large échelle de la maladie cause un déséquilibre. Or, la maladie est un risque fréquent, imminent. Elle n’est pas comme les autres risques qui peuvent être envisagés à long terme. Cependant, autant les assurés sont nombreux, autant la solidité de l’organisme est grande », fait-elle savoir avant d’aviser que les régimes commerciaux ont des règles qui s’adaptent selon le nombre d’assurés.

Pourtant, déplore Mme Nirutanya, on ne soumet pas les assurés à des principes commerciaux. Cela pour les protéger contre la loi de l’offre et de la demande, car la plupart de ceux qui veulent être couverts par l’assurance-maladie sont vulnérables.

Et de renchérir : « L’objectif de la protection sociale est de prévenir la vulnérabilité et de la couvrir si elle est déjà là ».

Mme Nirutanya avoue qu’il existe des mutuelles agréées comme micro-assurances, c’est-à-dire des assurances commerciales à petite dimension.

« Leurs règles de gestion sont commerciales. Malheureusement, elles se désignent comme sociale et profitent des avantages fiscaux ou autres dans l’assurance de base. Ce qui fragilise la solidarité qui devrait être dans l’assurance de base », s’inquiète-t-elle.

Et de continuer : « Il y en a qui ont des paquets différentiels de prestations. Par contre, dans la MSP, tout le monde a droit au même paquet, tout le monde a accès à la même chose au niveau des prestations. Cela même s’il y a des différences au niveau des cotisations ».

Dans le monde du travail, les négociations tripartites sont obligatoires.

Dans les assurances, explique Mme Nirutanya, il y a des catégories de paquets, à savoir : A, B, C…Ce qui ne respecte pas les règles de gestion de l’assurance de base. La maladie n’a pas de catégorie et doit être prise en charge dans son entièreté. Que ce soit le plus cotisant ou le moins cotisant au niveau du montant, tout le monde doit être couvert selon sa maladie à un niveau satisfaisant et dans les conditions légales prévues.

Du coq à l’âne

La directrice de la MSP regrette également que les coûts des médicaments et d’autres produits pharmaceutiques augmentent du jour au jour. Ce qui ne va pas de pair avec le niveau des salaires (le niveau des salaires est en moyenne petit).

C’est difficile, selon toujours elle, de prélever des cotisations sur un salaire qui n’évolue pas.  Elle certifie aussi que l’instabilité de la réglementation est perceptible dans le secteur privé.

Quant aux principes de gestion du régime de base, Mme Nirutanya notifie que les cotisations perçues doivent couvrir exclusivement les prestations et atteindre 80 % sans dépasser 85% de façon que les frais de gestion et les frais administratifs ne dépassent pas 10% des cotisations perçues.

Le reste étant affecté aux différentes réserves. Donc sur 100 millions de FBu perçus, il faut que 80 millions de FBu couvrent les prestations, 10 millions de FBu couvrent les frais administratifs et 5 à 10 % soient affectés à la constitution des réserves. A défaut de cela, on entre dans un déficit.

Négociations tripartites obligatoires, une lueur d’espoir

Pour couvrir le reste du secteur privé en assurance-maladie, Mme Nirutanya annonce que la question est sur la table des négociations.

« La révision de la politique nationale de protection sociale et sa stratégie de mise en œuvre en cours ainsi que l’élaboration de la stratégie de financement de la santé en vue d’atteindre la couverture sanitaire universelle au Burundi constituent une lueur d’espoir », rassure-t-elle avant de conclure qu’on se rend compte qu’il y a un consensus déjà atteint sur la façon dont on doit organiser l’assurance-maladie de base. Cela surtout que dans le monde du travail, les négociations tripartites sont obligatoires.

Ce qui est décidé par la représentation des employeurs, celle des travailleurs et le gouvernement ne se change qu’après d’autres négociations.

La MSP est un organisme de sécurité sociale qui a été négociée sur la gestion en tripartite et créée par les partenaires sociaux, soit la représentation des employeurs (Association des Employeurs du Burundi=AEB), celle des travailleurs (Confédération des Syndicats du Burundi=COSYBU) en consensus avec la volonté du gouvernement.

A propos de l'auteur

Mélance Maniragaba.

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