La « Clinique Prince Louis Rwagasore » s’est progressivement dégradée avec le temps. Cette image d’une grande clinique accueillant les VIP imprimée dans la mémoire des Burundais d’hier s’efface peu à peu. Le look de ce bâtiment mémorable, destination des milliers de Burundais à la recherche des soins médicaux est une marque d’un devoir non accompli envers la chose publique. Reportage
Il est autour de 11 heures quand nous débarquons à l’entrée de la « Clinique Prince Louis Rwagasore ». En cette mi-journée, un léger vent souffle dans une cour poussiéreuse. La chaleur d’été semble avoir chassé le monde du dehors. A l’intérieur, juste devant l’entrée, un employé se tient debout adossé contre les lavabos construits blocs de ciment. Il nous regarde tout droit dans les yeux et pointe du doigt le robinet. Il faut se laver les mains avant d’entrer. On s’en va à l’intérieur de ce grand bâtiment aux murs peints en jaune.
En haut, au-dessus de la grande porte double battant sur laquelle sont affichés plusieurs vieux papiers poussiéreux, on peut lire en grand : « CLINIQUE PRINCE LOUIS RWAGASORE ». Mémorable n’est-ce pas pour eux qui s’y connaissent à l’histoire d’un pays qui acquis son indépendance en 1962 ? A l’intérieur, une employée assise derrière son bureau accueille les demandeurs de services médicaux qui viennent payer. Ils sont nombreux, mais les femmes dominent en termes d’effectifs. Au-dessus de nos têtes, le regard se porte sur deux grands portraits suspendus au mur : ceux du chef de l’Etat actuel et de Louis Rwagasore, héros de l’Indépendance. Le plafond est poussiéreux et couvert de toiles d’araignées.
![](https://burundi-eco.com/wp-content/uploads/2022/08/Clinique-Prince-Louis-300x225.jpg)
La Clinique Prince Louis Rwagasore aujourd’hui converti en hôpital ordinaire est menacé par le manque d’entretien.
Des chambres pour malades en état piteux
Il faut prendre du temps pour parcourir l’intérieur de ce bâtiment si vaste. Dans la partie Ouest abritant les patients, tout semble témoigner de la vieillesse de l’hôpital. Certaines portes ne sont plus munies de serrures et fermer n’est plus possible. On peut jeter un coup d’œil à l’intérieur des chambres communes en passant. Des garde-malades sont assis sur de petits vieux lits. Les murs se dépeignent et se dégradent continuellement.
Au niveau des chambres où s’offrent les services divers liés à la maternité, on fait le même constat. Une vieille porte à deux battants qui donnait sur l’extérieur a été fermée définitivement à l’aide d’un fil à ligaturer.
Nous entrons dans une des chambres communes de la maternité. «Vous pouvez entrer dans l’une des chambres à partir du numéro 6. Ce sont des chambres communes», nous répond un travailleur à qui nous demandons où se trouvent les toilettes. Nous poussons une porte hermétiquement fermée. A gauche, une douche avec toilette. Nous poussons une vieille porte dans laquelle des feuilles de papier ont servi à boucher de gros trous. La serrure n’a pas été remplacée. Ce jour-là, pas d’eau. Les robinets sont à sec. La propreté relative est maintenue dans cette pièce servant de toilette. « Non, il n’y a pas de réservoir d’eau. Heureusement que les coupures d’eau n’y sont pas fréquentes », indique une source sur place.
Au niveau de tous les blocs, on peut constater des signes de non entretien et de précarité. Des ampoules qui ne fonctionnent plus au niveau des longs corridors éclairés par une faible lumière, des vitres cassés non remplacés, des fenêtres couvertes de poussières…
Des défis liés aux finances freineraient sa réhabilitation
Selon Dr Bonith Havyarimana, médecin directeur de la Clinique Prince Louis Rwagasore, cette vétusté des locaux est compréhensible. «La Clinique Prince Louis Rwagasore date de 1945», rappelle-t-il. Dr Havyarimana évoque certains efforts mobilisés par son institution pour rendre les services un peu viables. Il parle notamment de la réhabilitation de deux blocs opératoires et du matériel d’équipement.
Cependant, il déplore l’incapacité de son hôpital à procéder aux opérations de réhabilitation à un rythme voulu. « Seulement 33 millions de FBu constituent les frais de fonctionnement que nous recevons de la part de l’Etat alors que nous devons décaisser plus de 120 millions de FBu pour les salaires par mois », explique le responsable de cette ancienne clinique métamorphosée en hôpital ordinaire. Il affirme néanmoins lancer différents chantiers dont la réhabilitation des chambres du service de maternité, la construction des toilettes pour le personnel, la construction d’un bloc de maternité avec vestiaire pour le bloc opératoire.
Pour Dr Havyarimana, la revue à la hausse des fonds versés par le gouvernement en appui de cet hôpital pourrait permettre d’économiser les moyens nécessaires à sa réhabilitation. Selon un ancien médecin directeur d’un des hôpitaux publics de la municipalité de Bujumbura interrogé sur le sujet, le principal problème est généralement lié à une mauvaise gouvernance dans ce genre d’institutions.
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