Gouvernance

Le commerce et le fonctionnariat : deux fonctions incompatibles

L’exercice du commerce par les fonctionnaires et surtout  ceux qui détiennent un quelconque pouvoir public  inquiète la population. L’attribution frauduleuse des marchés publics, le conflit entre l’activité privée et la fonction publique sont entre autres les conséquences découlant de cette pratique. Alors que cette pratique est découragée par la loi burundaise, des observateurs appellent au respect de la loi pour préserver la chose publique 

Le principe d’incompatibilité des fonctions publiques avec le commerce devrait être observé dans l’intérêt supérieur de la nation.  Selon Emery Nukuri, Dr en Droit et enseignant à l’Université du Burundi, la loi Burundaise interdit formellement à certaines personnes d’entrer dans le commerce. Cet expert rappelle que certaines catégories de la population doivent choisir entre le business et la fonction publique.

Dr Emery Nukuri, enseignant à l’Université du Burundi : « Certains fonctionnaires de l’Etat ne font que marquer leur présence à leur poste pour s’en aller ensuite vaquer à leurs propres affaires».

Qu’en disent les textes de lois ?

Au niveau de la section concernant les incompatibilités avec leurs missions, le code des magistrats est claire : « Toute occupation quelconque exercée soit par le magistrat, soit par son conjoint, soit encore par une personne agissant à sa place et qui serait de nature à nuire à l’accomplissement des devoirs de sa fonction, ou ne se concilierait pas avec celle-ci est incompatible avec les fonctions de magistrat», souligne le document en son article 13. Pour Dr Nukuri, toute activité commerciale à leur nom propre pourrait mettre en danger le libre exercice de la fonction publique. «Imaginez qu’un magistrat voit un client sur qui il compte le plus sur le banc des accusés. Sans doute il ne serait pas libre dans l’exercice de sa mission», indique cet expert qui préfère expliquer cette incompatibilité par des exemples.

Tout de même, les officiers, militaires et policiers confondus ne devraient pas exercer le commerce. En ce sens, « ils doivent veiller à ce que leurs conjoints, leurs descendants ou toute autre personne agissant à leur place n’exercent pas une activité qui serait de nature à nuire à l’accomplissement des devoirs liés à leurs fonctions ou qui ne se concilieraient pas avec celles-ci », peut-on lire dans la loi No1/15 du 29/04/2006 portant statut des officiers de la force de défense nationale du Burundi. Pour Nukuri, la loi a voulu que l’armée nationale soit libre dans la défense du pays. « Au cas où la ville qui abrite son magasin serait attaquée, le militaire qui a amassé des fortunes risquerait de défendre son magasin au lieu de  défendre la ville », justifie-t-il.  Cependant, l’expert fait la part des choses dans son observation. Il rappelle qu’au cas où ces personnes voudraient entrer dans le commerce, elles peuvent le faire, mais en se regroupant dans des sociétés en participation. « Je ne dis pas qu’ils ne peuvent pas exercer le commerce, mais ils doivent se regrouper en coopératives ou dans des sociétés privées et non travailler à leur propre nom », précise Nukuri.

Des conséquences lourdes pour la gestion de la chose publique

Pour le Dr Nukuri, certains fonctionnaires exagèrent et n’ont même plus honte de le montrer en public. Ce qui montre que la tendance est d’ignorer volontairement la loi. « Nous avons pris l’habitude d’outrepasser la loi sans le savoir », regrette-t-il. Cet expert montre que ce phénomène peut être dangereux pour l’intérêt public et handicaper l’action de l’Etat surtout dans sa nouvelle volonté de réglementer les prix. « L’Etat doit être vigilant à l’égard de ces fonctionnaires en mal de cupidité, car ils pourraient mettre à mal la politique entreprise par l’Etat de règlementer les prix des denrées alimentaires sensibles», avertit cet expert.

Dans ses observations, il montre qu’il est difficile, dans certains cas, de rappeler à l’ordre  les personnes gens investies des pouvoirs publics qui enfreignent la loi. « Supposons qu’on devrait arrêter une personne qui n’a pas respecter les prix fixés par l’Etat et qu’on trouve qu’il s’agit d’une grande personnalité comme un ministre, un commissaire de police ou un procureur. Pourra-t-on l’arrêter ? », s’interroge-t-il. En plus de cela, ces cadres de l’Etat qui exercent le commerce ne se concentrent pas sur la tâche leur confiée par le pays. « Ils ne font que marquer leur présence à leur poste pour s’en aller ensuite vaquer à leurs propres affaires », commente-t-il.

Selon la loi en vigueur au Burundi, certaines personnes n’ont pas le droit d’exercer le commerce. Les magistrats, les policiers, les militaires, les avocats ou les fonctionnaires doivent opérer un choix entre le commerce et la fonction publique.

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A propos de l'auteur

Jonathan Ndikumana.

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