Médias

Journée mondiale de la liberté de la presse : Célébrée sous le signe de l’inquiétude et du recul

Le Burundi a célébré la Journée mondiale de la liberté de la presse dans un climat marqué par l’inquiétude et le recul. La dégradation de note la médiatique, illustrée par une chute notable dans le classement de Reporters Sans Frontières, alarme les professionnels des médias. Entre agressions, opacité institutionnelle et bouleversements liés à l’intelligence artificielle, les journalistes appellent à des garanties concrètes pour exercer leur mission en toute liberté.

Différents participants à la Journée mondiale de la liberté de la presse se montrent optimistes quant à l’inévitabilité de l’IA dans le monde actuel, tout en estimant qu’elle doit être utilisée avec précaution dans le métier de journaliste.

 

Ce samedi 3 mai 2025, comme partout ailleurs dans le monde, le Burundi a célébré la Journée internationale de la liberté de la presse. L’événement, organisé à la Maison de la Presse du Burundi, a réuni des journalistes, des responsables de médias, des représentants des organisations professionnelles et quelques autorités pour faire le point sur l’état des lieux de la liberté d’informer dans le pays. Un bilan qui, loin d’être rassurant, suscite au contraire une vive inquiétude dans les rangs des professionnels.

Le dernier classement de Reporters Sans Frontières (RSF) de 2025 est venu assombrir la situation : le Burundi a reculé de 17 places en un an, glissant de la 108e à la 125e position sur 180 pays analysés. Un déclin que beaucoup interprètent comme le reflet d’un climat de plus en plus contraignant pour les médias. Le score global du pays passe ainsi de 51,78 à 45,44 signe d’un environnement où les libertés fondamentales, notamment celle d’informer et d’être informé, semblent se réduire.

Pour les journalistes présents à cet évènement, ce recul n’est pas une surprise. Il vient simplement confirmer un malaise déjà palpable. Et pour cause, cette année a été marquée par plusieurs incidents, dont l’agression du journaliste de la radio Bonesha FM Willy Kwizera dans les enceintes de l’Université du Burundi le 28 avril 2025. Un événement qui a choqué la profession et illustré les risques bien réels que courent les professionnels des médias.

Le droit d’accès à l’information mis à mal

Mais les menaces ne sont pas toujours physiques. La rétention de l’information est un autre obstacle qui pèse sur le travail quotidien des journalistes. Elle est matérialisée par l’accès limité, voire refusé, à l’information publique. Plusieurs témoignages recueillis lors de la cérémonie évoquent la difficulté persistante à obtenir des réponses de la part des institutions. Des demandes d’interview ignorées, des questions laissées sans réponse, une opacité administrative qui entrave gravement le travail de vérification et d’investigation.

Face à cette problématique, Thierry Kitamoya, assistant du ministre en charge de la communication, a tenté de rassurer. Il a annoncé que le gouvernement travaille actuellement à un nouveau cadre juridique destiné à garantir le droit d’accès à l’information. Une initiative saluée avec prudence par les professionnels des médias présents qui attendent de voir comment ce projet se traduira concrètement.

L’intelligence artificielle : entre opportunités et dérives

Cette édition 2025 a également été l’occasion de réfléchir à un sujet d’actualité mondiale : l’impact grandissant de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse. Sous le thème  « Informer dans un monde complexe : l’impact de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse et les médias », les débats ont exploré les implications de cette révolution technologique qui bouleverse les pratiques journalistiques.

Concernant l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) dans les médias, Fiacre Muhimpundu, journaliste et enseignant à l’université, a souligné que le Burundi a encore beaucoup de chemin à parcourir pour s’adapter à l’évolution technologique. Il a déclaré : « Il reste encore de nombreux efforts à fournir en matière d’infrastructures, de réseaux, d’accès à Internet et de réduction du retard dans l’utilisation et le contrôle de cette technologie. » Pour lui, l’IA doit être utilisée de manière à ne pas compromettre le travail de l’homme, car le journalisme doit rester une affaire d’êtres humains, et non de machines.

Le constat est partagé par d’autres intervenants. Si l’IA peut être un allié du journalisme, elle ne saurait remplacer le regard critique, le discernement et la sensibilité d’un professionnel de l’information. « L’intelligence artificielle doit rester un outil, pas un rédacteur », a martelé Espérance Ndayizeye, présidente du Conseil National de la Communication (CNC), appelant à une formation accrue des journalistes aux nouvelles technologies.

Malgré tout, l’IA peut offre l’automatisation des tâches techniques, la transcription, la traduction, le montage, l’analyse de données. Donc elle dispose des outils puissants, capables de faire gagner un temps précieux dans les rédactions. Mais différents intervenants ont aussi mis en garde contre les dérives possibles : biais algorithmiques, contenu généré sans vérification humaine, propagation de fausses nouvelles, etc.

Préserver le rôle irremplaçable du journaliste

Malgré les inquiétudes, la Journée mondiale de la liberté de la presse a aussi permis de rappeler l’essentiel : dans un monde saturé de contenus, le rôle du journaliste demeure central. Le public, qu’il soit lecteur, auditeur ou internaute, attend toujours des informations fiables, contextualisées, utiles à la compréhension du réel.

Mais cela ne peut être garanti que si les conditions d’exercice du métier sont réunies. Liberté, sécurité, accès à l’information, moyens techniques : autant de piliers sans lesquels le journalisme s’effondre. Et autant de combats à mener au quotidien, dans un contexte technologique et politique en constante évolution.

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A propos de l'auteur

Gilbert Nkurunziza.

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