Gouvernance

La rétention de l’information : un frein à la transparence institutionnelle

La transparence est un pilier essentiel de toute démocratie. Pourtant, la rétention d’information demeure une pratique encore trop répandue dans certaines institutions. Ce phénomène soulève de nombreuses interrogations quant à la communication entre les organes de l’Etat, les médias et les citoyens. Abbé Dieudonné Nibizi donne plus de détails dans cet article.

Selon Abbé Dieudonné Nibizi, la rétention de l’information conduit à la prolifération des rumeurs et laisse la place à la désinformation.

 

La rétention de l’information peut résulter de nombreux facteurs notamment la méconnaissance du rôle des médias, peur de la critique ou des scandales, une bureaucratie paralysante, l’opacité volontaire ou encore la volonté de contrôler l’opinion publique. Parfois, la mission du porte-parole est floue ou ignorée par les responsables. Ce qui nuit à l’efficacité du message institutionnel. Cela a été dit par Abbé Dieudonné Nibizi, expert en communication lors d’un forum d’échange entre les médias et les institutions publiques pour la promotion de l’accès à l’information organisé par le Centre d’Alerte et de Prévention des Conflits (CENAP) en collaboration avec le ministère de la Communication, des Technologies de l’Information et des Médias le 04 avril 2025 à Bujumbura.

« Avec la rétention de l’information, les journalistes ne nous informent pas comme il faut. Ils ne traitent pas les dossiers les plus importants. Alors la nature va remplir le vide. Ainsi, les médias ne sont plus crédibles, parce qu’ils ne donnent pas ce qu’on attend d’eux », souligne Abbé Nibizi. Pour lui, les conséquences de la rétention de l’information sont multiples.

Pour les médias, cela se traduit par une perte de qualité dans le traitement de l’information, une baisse de crédibilité, la prolifération des rumeurs et une fracture entre les organes de presse, certains d’entre eux étant favorisés, d’autres marginalisés. Les citoyens, de leur côté, se tournent vers des sources alternatives peu fiables, comme les réseaux sociaux. Ce qui alimente la désinformation et affaiblit le droit à l’information.

Les institutions ne sont pas épargnées par cette dynamique. En refusant de communiquer de manière transparente, elles s’exposent à une perte de confiance, à un manque de visibilité et à une dégradation de leurs relations avec les médias. « La population se méfiera de l’institution parce qu’elle aura soif de savoir ce qui s’y trame et elle va inventer la solution et laisser la place aux rumeurs. Malgré tout, le citoyen a droit à l’information sur les affaires publics », indique Abbé Nibizi

Que les journalistes restent professionnels

Face à la rétention de l’information, les journalistes doivent réagir avec professionnalisme. L’ouverture, la collaboration entre les rédactions, le journalisme d’investigation, l’usage de sources alternatives et le respect des lois sur l’accès à l’information sont des réponses efficaces. Dans les situations de manque d’informations, il est essentiel d’être honnête avec le public, sans inventer les réponses ni dénigrer l’institution qui a refusé de s’exprimer.

Les institutions, quant à elles, doivent libérer la parole. Il est nécessaire de redonner aux porte-parole la place qui leur revient. Ils doivent disposer du temps, des moyens et de la légitimité nécessaire pour exercer leur fonction. Leur rôle doit être clairement défini, leurs capacités renforcées et leur parole respectée. Il est également crucial de garantir l’accès à l’information et de promouvoir une culture démocratique fondée sur le droit des citoyens à être informés.

Le rôle du porte-parole dans tout cela

Pour Abbé Nibizi, une institution est définie par ce qu’elle est, par ce qu’elle dit être, et par l’image que le public a d’elle. Or, ces trois dimensions ne coïncident pas toujours. Une communication institutionnelle efficace vise à harmoniser ces aspects, afin de construire une image cohérente, crédible et digne de confiance.

Il ne suffit pas de diffuser des messages par le biais d’un service de communication formel. La communication institutionnelle englobe également les interactions informelles, les attitudes, les gestes, les silences. Elle repose sur la capacité de gérer l’ensemble des échanges entre l’institution, ses membres et les divers publics internes et externes.

Le porte-parole joue ici un rôle central. Il représente l’institution, transmet l’information officielle, assure la cohérence du discours et entretient des relations avec les médias. Il est aussi en charge de protéger la réputation de l’institution, d’anticiper les questions, de préparer les réponses et de relayer les préoccupations du public auprès des décideurs. Pour assumer pleinement cette mission, il doit être écouté, formé et soutenu.

Le porte-parole est la voix officielle de l’institution. Il connait son dirigeant, maîtrise les enjeux internes et comprend les attentes du public. Il est donc un acteur clé de la redevabilité, qui oblige les institutions à rendre compte à ceux qu’elles servent. En période de paix comme en temps de crise, il entretient des relations fondamentales avec les médias. Ces derniers, de leur côté, doivent traiter l’information avec rigueur, sans chercher à piéger l’interlocuteur.

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A propos de l'auteur

Gilbert Nkurunziza.

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