Société

Le langage chosifiant, un frein à la construction d’une société bâtie autour des valeurs

Le langage chosifiant est l’un des caractéristiques d’une société qui se dégringole. Dans la chronique sur les messages de la haine de cette semaine, Burundi-Eco revient sur la chosification des membres des différents groupes ou d’opinions, ses causes et les conséquences qui en découlent, mais surtout sur comment déconstruire ce genre de langage    

La chosification de l’autre est un comportement fréquent dans les sociétés conflictuelles. Il consiste à la présentation de l’autre comme ne lui étant pas semblable, mais plutôt comme une autre créature méprisable à qui on peut refuser tous les droits au nom de la différence. C’est une différence inculquée qui n’est pas une différence réelle. Quand bien même la différence il y en aurait, il n’y a pas une différence qui puisse inspirer la chosification.

Comme l’explique Evariste Ngayimpenda, professeur d’université, chosifier l’autre c’est le présenter négativement différent et, à ce titre, il mérite tous les traitements qu’on peut être tenté de lui infliger par exemple lui refuser ses droits. La chosification parvient à en faire un citoyen de seconde zone parce que les gens le considèrent comme une espèce d’exécutoire populaire, un bouc émissaire de toutes les mauvaises situations qu’une société serait en train de vivre.

Evariste Ngayimpenda, professeur d’université : « L’homme est naturellement porté vers le vice. Pour lui épargner le vice, il faut mettre des garde-fous ».

 

La sortie de crises, un terrain favorable aux messages chosifiants

L’universitaire explique que les contextes qui favorisent le langage chosifiant sont généralement des contextes de marasme politique ou de marasme économique. Et ce sont généralement des contextes de sorties de crises. Les régimes politiques révolutionnaires restent pendant longtemps prisonnières de leur histoire. Il fait savoir que pour se légitimer ou de se faire accepter, elles font recours à l’intimidation ou à la manipulation. Et ce mécanisme est généralement dirigé contre celui qui est différent de soi. Celui qui est différent de soi, c’est l’opposant politique, un membre d’une organisation qui serait tentée d’empreinte une voie différente qui ne s’inscrit pas dans la dynamique de sortie de crises.

Les conséquences sont loin d’être positives

Cependant, les conséquences de la chosification sur la société sont loin d’être positives. Le professeur Ngayimpenda explique que quand on fait sauter les valeurs, il y a toujours des conséquences parce que toutes les sociétés du monde sont bâties autour des valeurs. « Quand vous refusez les valeurs, vous refusez tous les repères. Et une société sans repères est une société qui est vouée à l’échec », fait-il savoir. 

Quand on prend le risque de marginaliser les repères, il sera par après difficile de les reconstituer et de les imposer. Plus encore, une société sans repères se donne de faux repères. Et dans ce genre de situation, la parole est donnée à des gens qui n’ont rien à perdre en imposant les mauvais repères. « Il y a toujours des groupes marginaux qui sont prêts à exploiter ce créneau pour leur propre intérêt », dit-il. Et, le professeur Ngayimpenda ajoute encore une fois que cela arrive dans les sociétés post-conflictuelles.

La stratégie pour lutter contre ce genre de langage chosifiant, c’est prôner des valeurs positives. Pour Pr Ngayimpenda, cela prend du temps à s’installer et à s’implanter. Il ajoute qu’une société a toujours besoin de vrais repères. Si on ne l’éduque pas dans cette optique, on risque de créer une situation incontrôlable. «L’homme est naturellement porté vers le vice. Pour lui épargner le vice, il faut mettre des garde-fous». Et d’ajouter que les garde-fous sont moraux, mais aussi juridiques. « Les sociétés qui ont réussi sur le terrain de la valorisation des repères sont celles qui ont pu mettre à contribution les ressources offertes par ces derniers », lance-t-il.

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A propos de l'auteur

Dona Fabiola Ruzagiriza.

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