Longtemps considéré comme un « monstre », assimilé à la sorcellerie… les mythes et les stéréotypes autour du Sida tombent. Les témoignages confirment que le Sida est une maladie comme tant d’autres. La médecine moderne a réduit la virulence du VIH
Les campagnes de sensibilisation et les séances de formation portent des fruits. Le changement de comportement est perceptible auprès de la population. La rédaction de Burundi Eco a rencontré différents groupes de personnes pour connaître leurs perceptions vis-à-vis du Sida. Abraham Nimbona travaille dans un hôtel à Ngozi. Il fait savoir qu’il y a des avancées significatives en matière de lutte contre le Sida. « Dans le passé, les gens craignaient le Sida. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Le Sida est perçu comme une infection comme tant d’autres », précise Nimbona. Le Sida n’a rien de comparable avec le paludisme, le cancer ou encore le diabète qui emportent de nombreuses vies humaines.

Abraham Nimbona « Dans le passé, les gens craignaient le Sida. Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui »
D’après lui, les séropositifs ne sont plus stigmatisés. Ils vivent assez longtemps comme les autres et vaquent aux activités. Même son de cloche chez Japhet Miburo, taximan depuis 5 ans. Pour lui, la stigmatisation envers les séropositifs n’est pas prononcée. Cela est le fruit des campagnes de sensibilisation sur cette pandémie. Toutefois en milieu rural, les préjugés autour du Sida persistent et les séropositifs sont taxés de déviants sociaux.
Le danger reste imminent
La pandémie du Sida fait toujours parler d’elle dans la province de Kirundo. Les habitants de cette province du nord du pays déplorent le manque de sensibilisation au dépistage volontaire. Le dépistage est plutôt obligatoire pour les femmes enceintes afin de protéger la santé du fœtus Pascal Nsengiyumva habitant la colline Rutabo en commune Busoni reconnait que le Sida est dangereux puisque, indique-t-il, beaucoup de gens meurent de cette maladie.
Selon lui, le peu d’informations dont il dispose sur le Sida (prévention, contamination, traitement), il le doit aux émissions radiophoniques et à ses amis. Il reconnait que la communauté Batwa n’est pas du tout sensibilisée sur ce fléau et invite l’administration publique en général et l’administration sanitaire en particulier à se mobiliser pour sensibiliser la population sur le Sida et ses conséquences.
Les jeunes pris au piège
A moins qu’on ne change pas de comportement, le Sida va persister chez les jeunes. Les jeunes plongent dans les rapports sexuels dès le jeune âge (généralement avant 15 ans). Evelyne Nahayo rencontrée dans l’un des hôtels de la ville de Kirundo informe que la plupart des jeunes n’ont pas tellement peur du Sida. Ils font des rapports sexuels non protégés. Malgré la disponibilité des condoms dans certains hôtels, les clients négligent l’utilisation du préservatif, déplore Mlle Nahayo. En conséquence, beaucoup de jeunes filles sont actuellement déscolarisées parce que victimes des grossesses non désirées.
La fréquentation des bordels par les jeunes filles prend de l’ampleur en province Kirundo. « Avec l’évolution des technologies de l’information et de la communication, les smartphones font rage. La pédophilie est devenue monnaie courante. Les hommes mariés sortent avec des jeunes filles et séjournent dans des hôtels. Quand la fille a pris de l’alcool, elle ne se soucie de rien, et fait les rapports sexuels non protégés », déplore -t-elle. Nahayo est au courant de beaucoup de jeunes filles et garçons vivant avec le VIH qui continuent à contaminer les autres.
Un jeune garçon serveur dans un autre hôtel abonde dans le même sens. Il remet en cause l’attitude accuse des célibataires géographiques, surtout les employés des ONGs. Ces derniers sont réputés bien rémunérés. Par conséquent, les jeunes filles ne tardent pas à sortir avec eux. « Comment un élève sans autres ressources que celles lui octroyées par ses parents, frères et sœurs peut s’acheter un smartphone », s’inquiète le serveur.
La protection, une priorité pour les uns
Dans le milieu universitaire, les étudiants n’ont pas peur de la pandémie du Sida. L’évolution de la médecine les rassure. Deux étudiants rencontrés à l’université du Burundi (campus Mutanga) témoignent qu’en milieu universitaire, la stigmatisation des séropositifs n’a pas de place. L’un d’eux s’inquiète du sort des étudiants séropositifs. Il pense que face au chômage chronique, ils ne peuvent pas investir dans des activités qui nécessitent de la force physique.
Pourtant les étudiants craignent la propagation du virus dans les homes universitaires. Ils arguent que les séminaires et les clubs stop Sida se raréfient de plus en plus. L’autre raison est que les ONG qui œuvrent dans la prévention du VIH ont cessé la distribution gratuite des condoms dans les campus.
L’abstinence, le moyen le plus sûr
En ce qui concerne la prévention du VIH, certains privilégient l’abstinence plutôt que d’autres méthodes. Une étudiante qui a requis l’anonymat explique que l’université regroupe des personnes adultes. Donc, elle ne comprend pas comment une personne peut s’aventurer dans des rapports sexuels à risques. Pour elle, le condom n’est pas sécurisant à 100%. « On ne sait même pas les composantes des préservatifs. Pourquoi l’utiliser ? », s’interroge-t-elle. Elle conseille plutôt de s’abstenir des rapports sexuels au regard des conséquences que cela pourrait engendrer. Pour ceux qui entretiennent des relations amoureuses sérieuses (qui ont un projet de mariage), il serait mieux de faire le dépistage pour connaître leur état sérologique, fait remarquer l’étudiante.
La décentralisation des centres de dépistage comme SWAA-Burundi et ABUBEF facilite les patients à se procurer les ARV. A cet effet, les décès dus au Sida ont chuté considérablement. Le nombre de personnes décédées du Sida a chuté de 8700 à 2900 décès entre 2005 et 2016. La lutte contre la pandémie du Sida est gagnée, mais pas la guerre. D’où la nécessité de ne pas baisser la garde. Sinon les victimes de cette pandémie pourront augmenter.
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