Santé

« Une bonne planification familiale réduit les cas d’avortement clandestin »

L’organisation « Solidarité des Femmes Burundaises pour le Bien-être Social et le Progrès au Burundi» (SFBSP-Burundi) a organisé vendredi le 27 juillet 2018 une séance de sensibilisation à l’endroit des leaders religieux. Les échanges ont porté sur l’utilisation des produits contraceptifs et les conséquences de l’avortement clandestin. Les participantes perçoivent la planification familiale comme une alternative pour réduire les cas d’avortement non médicalisé et leurs conséquences

Mme Gentillesse Irakoze expliquant aux participantes l’utilisation des méthodes contraceptives

Dans le but de briser les tabous et les mythes qui entourent la contraception, la SFBSP a réuni les leaders religieux, particulièrement les « mamans pasteurs » au Centre Ombre de la Femme (COFEM) sis à Kamenge. « Les mamans pasteurs côtoient beaucoup de personnes dans leurs églises respectives. Nous espérons que ces dernières vont sensibiliser leurs fidèles sur la santé sexuelle et reproductive », a justifié Mme Justine Niyokwizera, assistante sociale chargée de la promotion des droits à la santé sexuelle et reproductive à la SFBSP. L’organisation de cette campagne de sensibilisation a été motivée par les résultats d’une enquête réalisée sur l’ampleur de l’avortement dans notre pays. Il ressort de cette enquête que l’avortement est bel et bien un phénomène réel au sein de la société burundaise. D’où la nécessité d’impliquer toutes les parties prenantes pour réduire les cas d’avortement, explique Mme Niyokwizera.

Des témoignages accablants

Après les travaux en sous-groupes autour de la problématique de l’avortement et de l’utilisation des méthodes contraceptives, les participantes ont donné leur avis sur l’avortement clandestin. Ainsi, les femmes et les filles enceintes font appel aux féticheurs qui utilisent des objets souillés ou d’autres produits pour interrompre leurs grossesses.

Parmi les participantes, il y a celles qui ont confirmé avoir vécu des cas d’avortement dans leur voisinage. « J’ai assisté une élève du secondaire qui a avorté. Je l’ai rencontré là où elle couchait dans un bain de sang. Elle avait perdu connaissance après avoir pris une overdose de comprimés. J’ai alerté les services d’urgence et on a essayé d’arrêter l’hémorragie avec des pagnes. Et on l’a référé à l’hôpital. Heureusement qu’elle est guérie », lâche une femme sous couvert d’anonymat dans la salle. Une autre se lève et témoigne qu’une fille de son voisin a été violée. Après avoir mis au monde, elle lui a laissé l’enfant et elle s’est volatilisé dans la nature. Elle n’est jamais retournée pour récupérer son enfant. Ce dernier est devenu un enfant de la rue. Il pille tout sur son passage. Il n’est pas parvenu à s’intégrer dans la famille, regrette-t-elle.

Il est donc urgent d’arrêter des stratégies pour réduire les cas d’avortement clandestin. Car disent-elles, on ne peut pas prétendre développer durablement un pays en laissant derrière une catégorie importante de la population : les femmes. En ce qui concerne l’avortement, les participantes trouvent qu’il faut légaliser certains cas. Il s’agit des filles victimes d’incestes, de viols ou des femmes qui connaissent des complications au cours de la grossesse.

« Entre deux maux, il faut choisir le moindre »

Les points de vue divergent quant à l’utilisation des méthodes contraceptives. La plupart des religions protestantes considèrent ces dernières comme contraires à la foi. Elles les assimilent à l’avortement. Or, ce dernier est un crime sanctionné par la loi. Les participantes estiment qu’il faut peut-être balancer le bien et le mal de faire recours aux méthodes contraceptives. L’on devrait avant tout songer au bien-être de la famille, si réellement on veut satisfaire les besoins de la famille avant de mettre au monde. Les enfants ont besoin d’être scolarisés, d’être soignés. Compte tenu des moyens de chaque foyer, il convient de limiter les naissances au lieu de mettre au monde des enfants de la rue,  des prostituées, des bandits. Pour elles, le principe selon lequel il faut se multiplier et remplir la terre comme le sable au bord de la mer est à prendre avec circonspection.

La contraception pourrait réduire les cas d’avortement

Les mamans pasteurs ont été intéressées par le programme de planification familiale et elles se sont engagées à relayer les bons messages reçues sur les méthodes contraceptives. « Cela va booster le taux de la prévalence contraceptive au Burundi, car si bon nombre de femmes pratiquent la contraception, cela implique qu’il y a peu de grossesses, peu de naissances. Et, par conséquent, les cas d’avortement clandestin et leurs conséquences baisseront », précise Mme Niyokwizera

Quid des méthodes contraceptives ?

Mme Gentille Irakoze a partagé avec l’auditoire les différentes techniques utilisées pour espacer et/ou limiter les naissances. Ces dernières comprennent les méthodes mécaniques (stérilet, préservatif), les méthodes chimiques (injections hormonales, les pilules), les méthodes naturelles (la méthode des calendriers, le coït interrompu, l’allaitement maternel) et l’intervention chirurgicale (l’implant sous cutané, la ligature des trompes, la vasectomie). Les méthodes contraceptives présentent des effets secondaires (les saignements, les céphalées, gain de poids, etc).

Pour Mme Irakoze, chaque méthode devrait être indiquée par un professionnel de la santé qui a la compétence requise pour apprécier une méthode adaptée à chaque cas. Elle souligne que certaines méthodes sont trop exigeantes par rapport à d’autres. Les participantes ont estimé que la méthode dite des calendriers est à pratiquer en concertation avec le partenaire car elle pourrait aggraver le phénomène des relations extraconjugales. Mme Irakoze évoque la possibilité de combiner deux méthodes pour plus d’efficacité.

Une satisfaction totale des organisateurs

Les organisateurs de la séance de sensibilisation se disent satisfaits au-delà de leurs attentes. « On n’avait d’assurance que les mamans pasteurs allaient s’exprimer librement sur un sujet aussi sensible que la sexualité », fait savoir Mme Niyokwizera. Curieusement, indique-t-elle, elles ont débattu, à bâton rompu, à propos des conséquences de l’avortement clandestin. La présentatrice Irakoze abonde dans le même sens en affirmant qu’elle a été  surprise par les interventions des participantes durant la séance de sensibilisation. Cela démontre qu’il y a une certaine progression, car la plupart des mamans pasteurs comprennent qu’il faut sensibiliser les couples à donner naissance à des enfants qu’ils sont capables de prendre en charge.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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