L’ambassade des Pays-Bas au Burundi en collaboration avec ses partenaires a organisé une soirée inédite dédiée aux entrepreneurs mercredi le 23 janvier 2019. Les jeunes entrepreneurs ont eu l’occasion d’échanger avec les entrepreneurs confirmés sur le climat des affaires. Les participants témoignent déjà des résultats concrets de cette soirée
« Aujourd’hui, nous sommes réunis pour un but commun, à savoir: promouvoir le secteur privé au Burundi à travers l’entrepreneuriat des jeunes », a annoncé aux participants Mme Caecilia Wijgers, ambassadrice des Pays-Bas au Burundi

Mme Caecilia Wijgers, ambassadeur des Pays-Bas au Burundi : « La soirée dédiée aux entrepreneurs est une occasion donnée aux jeunes entrepreneurs d’échanger et de partager les expériences »
En organisant une soirée dédiée aux entrepreneurs, l’ambassade des Pays-Bas ambitionne la mise en place d’un réseau de jeunes entrepreneurs. « C’est un espace où les jeunes entrepreneurs peuvent se rencontrer et partager des expériences », explique Mme Wijgers. Selon elle, les entrepreneurs débutants souffrent beaucoup. Ils ne sont pas certains que leur idée va marcher. Ils ont besoin donc d’échanger avec leurs ainés sur les expériences vécues. Cette initiative permet dans un premier temps d’identifier les besoins des jeunes entrepreneurs. Et puis dans un second temps, nous allons mener des actions de suivi, indique Mme Wijgers. Pour elle, le financement est l’une des préalables, mais l’entrepreneur a plus besoin de l’expérience et les connaissances.
La persévérance, clé du succès de Mme Ruhara
Mme Ketty Ruhara, un des orateurs de la soirée décrit son parcours professionnel. Elle a commencé il y a à peu près dix ans par la vente des cartes de recharge et des cartes SIM. Deux ans après, elle a réalisé que le marché présente des brèches : les cartes étaient chères. Elle a eu l’idée d’initier l’impression de cartes de recharge à des prix abordables (crédits de 300 FBu ou 500 FBu). Il lui a fallu attendre deux ans de négociations avec les opérateurs de télécommunications. La première fois qu’elle est allée présenter son produit devant les clients potentiels, elle a été interrompue avant qu’elle ne termine sa présentation. « C’était décourageant mais, malgré tout, j’ai pu me relever et continuer différentes approches à maintes reprises sans succès », se remémore-t-elle. Pourtant, elle était convaincue que son idée était géniale. Finalement, deux ans plus tard, elle été convoquée pour une réunion afin de négocier les termes du contrat.
Le parcours entrepreneurial peut s’étendre sur de longues années avant d’arriver à terme, l’essentiel est de persévérer. « Il faut garder la foi et persévérer dans la sagesse et la patience », a précisé Mme Ruhara. Certains pensent qu’il n’est pas opportun d’entreprendre à cause de la situation économique qui prévaut. « Nous pouvons soit voir les impossibilités, soit entrainer nos esprits à saisir les opportunités et plus important encore à trouver les moyens créatifs de les exploiter malgré la situation difficile que nous vivons », lance Mme Ruhara.

Mme Ketty Ruhara, entrepreneure et promotrice de Kibondo Porridge : « Le parcours entrepreneurial peut s’étendre sur de longues années avant d’arriver à terme, l’essentiel est de persévérer »
Les débuts difficiles d’un entrepreneur
Pour Emmanuel Ntakirutima, initiateur de l’entreprise AKEZAMUTIMA spécialisée dans la fabrication du jus de maracouja, les débuts sont toujours difficiles. On passe obligatoirement par des circonstances qui découragent les entrepreneurs débutants, indique-t-il. « L’entreprise a démarré ses activités en 2009 sous un arbre, car on n’avait pas de site de production avant la formalisation de l’entreprise. Pour emballer nos produits, on utilisait des bouteilles de Heineken collectées ici et là, raconte M. Ntakirutima. Il ajoute que l’extraction du jus se faisait à l’aide des moyens de bord. Le réseau de distribution n’était pas clairement défini.
En effet, l’entreprise a noué des partenariats avec les professionnels qui opèrent dans le même secteur pour partager les expériences. A l’heure actuelle, l’entreprise est dotée d’infrastructures et d’équipements qui permettent une production à grande échelle. Elle commence à conquérir le marché régional et international, se réjouit le patron d’AKEZAMUTIMA.
Le manque de financement handicape les petites entreprises
D’après M. Pascal Bikunde, entrepreneur œuvrant dans le secteur avicole en province Cibitoke, les jeunes entrepreneurs se heurtent au manque de financement. En outre, le manque d’emballages adaptés à chaque type de produit paralyse les activités des entreprises agroalimentaires. Souvent, les entrepreneurs font recours à des bouteilles usagées pour conserver les produits.
A ce sujet, Mme Victoire Bizindavyi, formatrice en entrepreneuriat, innovation et inclusion financière propose aux entrepreneurs de nouer des partenariats avec les producteurs des emballages. « Il faut chercher des connexions à l’interne comme à l’externe. De même, les entrepreneurs peuvent approcher les investisseurs privés pour qu’ils aident à faire des commandes d’emballage à l’étranger à un prix réduit en attendant la production locale des emballages », estime-t-elle.
A côté du problème d’empaquetage, les entrepreneurs évoquent les tracasseries administratives pour formaliser leur business. Des fois, les procédures administratives trainent pour l’obtention de certains documents.
Que faire pour rentabiliser son entreprise ?
Les entrepreneurs Burundais ont du mal à garder la tête au-dessus de l’eau. Certaines entreprises ferment étant dans la phase d’amorçage (entreprise en phase de création ou après la création mais qui n’a pas encore réalisé de chiffre d’affaires). Pour Ruhara, cela dépend de plusieurs facteurs. Elle explique que les préférences des consommateurs changent du jour au lendemain, la technologie évolue aussi. Donc en tant qu’entrepreneur, on est obligé de continuer les recherches pour s’adapter. « On ne doit pas baisser la garde. On doit chaque fois analyser les tendances du marché et prendre des décisions. Sinon on est dépassé. Bref, l’innovation devrait être la boussole de tout entrepreneur qui aspire à la réussite », conseille Mme Ruhara.

La soirée a vu la participation des incubateurs en entrepreneuriat (Burundi Business Incubator, Spark Burundi et les organisations engagées auprès des jeunes, notamment Care International Burundi, Agrofocus Burundi et Impact Hub Bujumbura.
Une soirée couronnée de succès
Les entrepreneurs qui ont participé à la soirée disent que cette dernière a été bénéfique à bien d’égards. Ils ont beaucoup apprécié les activités de la soirée et dressent un bilan largement positif. Ils affirment qu’ils ont appris beaucoup des échanges. « Cet événement nous offre une occasion de nouer des contacts, de s’encourager, de se motiver, d’échanger des idées et peut être créer des opportunités », a précisé Mme Ruhara. Ce qui a été concrétisé, car une femme entrepreneure a fait savoir qu’elle a décroché un marché d’écoulement de ses produits lors de l’évènement.
Dans les coulisses, Pascal Hakuziyaremye, initiateur d’un projet de fabrication de spaghetti, « Blessing Product » en province de Ngozi avait des difficultés de sécher ses produits. A l’issue de la soirée, Hakuziyaremye fait savoir qu’il a établi des contacts avec un partenaire qui a accepté de financer une machine de séchage automatique des spaghettis.
La soirée dédiée aux jeunes entrepreneurs sera organisée chaque mois pour leur permettre d’échanger sur les contraintes rencontrées et les stratégies d’y faire face.
Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur.
La rédaction se réserve le droit de ne pas publier les commentaires enfreignant ces règles et les règles de bonne conduite.