Les travaux de stabilisation des berges arrêtés, les alluvions sédimentaires, les ravins qui se créent, les berges des rivières qui cèdent, les glissements, l’effondrement et l’éboulement de terrain sur les rivières qui traversent la capitale Bujumbura constituent une menace sérieuse pour cette dernière. Les infrastructures environnantes sont menacées. C’est un constat fait ce mardi 29 octobre 2019 lors d’une visite de terrain
Sur terrain, la situation fait peur. A Musaga, commune Muha, au Sud de la capitale, une avenue en mauvais état menace tout un quartier. C’est l’avenue Gasekebuye communément appelée « Kukivu » se trouvant dans le quartier Gasekebuye près du camp militaire dit Camp Muha. La petite avenue en terre sépare le nouveau quartier de Gasekebuye de la zone de Musaga. Cette avenue qui s’est transformée en ravin menace le camp et la route principale qui relie la RN7 à la Mairie de Bujumbura. Cette avenue continue à s’effronder à cause de l’épais ravin. Les berges latérales de ce dernier continuent de s’affaisser suite à la forte pression des eaux de pluie. Par conséquent, ces eaux menacent les maisons environnements. « Comme les caniveaux sont bouchés, les eaux ont déjà envahi certaines maisons ». En cas de pluie, indique un habitant de cette avenue, la circulation est quasi paralysée. « Nous craignons pour la sécurité de nos enfants qui doivent traverser cette avenue pour se rendre à l’école ».
Dans cette même zone, un autre endroit court ce type de danger. C’est le quartier Kamesa exposé à l’écroulement des berges de la rivière Kamesa qui traverse les quartiers Kamesa 1 et Kamesa 2 et la zone Musaga de part et d’autres. Il y a quelques temps, à cause de l’écroulement des berges de cette rivière, le pont en bois érigé au-dessus de cette rivière s’est déjà cassé. Malgré la reconstruction de ce pont, le ravin s’étire de plus en plus suite aux fissures causées par les pluies.
A quelques kilomètres de là, au boulevard Mutaga II du quartier Kinanira II, tout près du petit séminaire de Kanyosha, la situation est tout autre. Le mal est déjà là. Le ravin s’est déjà effondré emportant avec lui une partie de cette route goudronnée et les maisons riveraines. Certains des propriétaires des maisons les ont volontairement détruits pour conserver les matériaux de construction. En plus des maisons effondrées, des infrastructures publiques sont aussi affectées. Aucune trace de l’église Bethany Holy Church. Une partie de l’école secondaire Lycée de Kanyosha aussi appelé « Kwa Vyisi » s’est déjà effondrée et une position policière a été détruite.
Le lit des rivières ne cesse de s’élargir
Malheureusement, les travaux entrepris pour arrêter la progression du ravin qui a occasionné plusieurs dégâts dans les quartiers Kinanira et Ceceni de la zone Musaga ont été suspendus. Sur le chantier, pas d’activités. Les bulldozers, les camions,…ont déjà été retirés. Actuellement, cette route est bloquée jusqu’au petit séminaire de Kanyosha. Seuls les piétons peuvent passer. Et avec l’arrêt des travaux de stabilisation, le ravin s’agrandit jour après jour. Les habitants du quartier restés sur place désespèrent. « Depuis l’arrêt des travaux, nous sommes désemparés. Surtout en cette saison de pluie, la nuit, nous sommes en alerte permanente craignant une catastrophe ».
Et de nous résumer l’histoire de ce ravin. Selon eux, au début, il ne s’agissait que d’un petit caniveau charriant les eaux de ruissellement. Avec le temps, il s’est élargi jusqu’à devenir un grand ravin. « On a demandé de l’aide pour la rénovation de ce caniveau, sans succès ».

Au boulevard Mutaga II du quartier Kinanira II, tout près du petit séminaire de Kanyosha, le ravin s’est déjà effondré emportant avec lui une partie de la route goudronnée et les maisons riveraines
Non loin de là, de la 12ème avenue du quartier Kinanira jusqu’au quartier Busoro, à quelques mètres du pont séparant la zone Musaga et la zone Kanyosha, la situation est catastrophique. Le lit de la rivière Kanyosha ne cesse de s’élargir. Un grand ravin s’est formé le long de cette rivière. Les berges s’effondrent du jour au jour. Le pont Kanyosha reliant Kinanira à Kanyosha n’est pas épargné. Les crues de la rivière le fragilisent. Deux maisons se sont déjà effondrées, d’autres sont sur le point de céder. Quelques riverains ont déjà déménagé. D’autres assistent impuissamment à cette situation. Les riverains font savoir que les murs de soutènement commencent à tomber l’un après l’autre. Ils essaient de se protéger en aménageant des digues avec des sacs remplis de sable et des branches d’arbres.
Une école en danger, les enseignants et les parents crient au secours
Même constat au niveau de l’Ecole Fondamentale de Musaga III. Cette école primaire située sur la 2ème avenue de la zone Musaga est menacée par les crues de la rivière Mpimba. Quelques classes sont déjà fissurées et risquent de s’effondrer. Les enseignants et les parents s’inquiètent. Ils précisent que si rien n’est fait dans l’immédiat, les murs de ces classes vont s’affaisser.
Pas mal d’infrastructures érigées le long de la rivière Mpimba au niveau de la zone Musaga sont menacées par les glissements de terrain, l’éboulement et l’effondrement. Les bords s’affaissent dans les eaux de cette dernière. Les maisons riveraines sont menacées. Les habitants indiquent que quelques maisons se sont déjà écroulées suite à ces catastrophes. Ainsi, les propriétaires des maisons longeant la rivière sont inquiétés par la saison pluviale qui risque d’emporter d’autres maisons. Ils expliquent que les dégâts seront énormes si les travaux de stabilisation des berges de ces rivières ne sont pas effectués dans les meilleurs délais.
Ils craignent de probables accidents: «Les élèves et les enseignants à cette école sont vraiment en danger. Si rien n’est fait, on court à la catastrophe», alerte un parent d’un élève qui fréquente cette école. Les infrastructures de la partie Sud de l’établissement sont les plus menacées. A ce niveau, le mur de protection est submergé par les eaux quand il pleut.
A la rivière Muha, les glissements de terrain sont aussi une réalité comme sur les rivières Mpimba et Kanyosha. Beaucoup d’arbres fixateurs ont été plantés sur les rives de cette rivière pour réduire les impacts négatifs de la destruction des berges de cette rivière. De plus, des gabions ont été mis en place pour freiner la pression de l’eau entre les quartiers Gatoke et Gasekebuye.
Même son de cloche pour la rivière Mutimbuzi qui a dévié de son lit, envahissant les localités environnantes. Les riverains sont dans une détresse innommable. Au quartier Uwinterekwa, zone Gihosha de la commune Ntahangwa, il y a quelques mois, en février, il y a eu un glissement de terrain dû à une fissure du sol liée à une occupation anarchique du sol. De plus, le sol est très fragile à cet endroit, car un glissement de terrain y est déjà survenu vers les années 60 et y a créé un ravin. On y cultivait même du riz. Certaines maisons se sont effondrées, d’autres présentent des fissures. Suite à cette étrange situation, certains ménages ont déjà vidé les lieux.
Les riverains se réjouissent de la réhabilitation des ponts sur la rivière Nyabagere
Pour le cas de la rivière Ntahangwa, les berges de cette rivière sont protégées à certains endroits, mais cela n’empêche pas qu’elles soient phagocytées par l’eau de pluie après un certain temps. C’est le cas des berges attenantes au quartier Kigobe sud de la zone Gihosha, à Nyakabiga ou au quartier Jabe de la zone Bwiza. Les crues de cette rivière ont déjà emporté quelques maisons. Les habitants du quartier du nord de la capitale se félicitent de la réhabilitation des ponts sur la rivière Nyabagere. Ils avaient jusque-là du mal à la traverser pendant la saison des pluies. Les berges s’élargissaient de jour en jour. Pour les habitants de la localité, les canalisations étaient étroites de sorte que les débordements entrainaient des inondations.
L’OPC1 Anicet Nibaruta , Directeur Général Adjoint de la Protection Civile et de la Gestion des Catastrophes fait savoir que la cause principale de ces inondations en Mairie de Bujumbura est le fait que cette dernière est traversée par des rivières qui proviennent des hautes montagnes qui la surplombent, dénudées et non aménagées. Les eaux de ruissellement coulent sur ces montagnes et emportent sur leur passage des masses de terre qui constituent des crues dans les lits de ces rivières. Ce qui cause souvent des inondations dans les basses terres environnantes de ces rivières.
L’activité humaine aggrave la situation
Ce cadre de la protection civile et de la gestion des catastrophes parle des constructions ne respectant aucune règle d’urbanisation s’observent dans la zone périphérique de la ville de Bujumbura et des eaux pluviales provenant de ces maisons qui se créent un passage et causent des inondations. Certaines personnes cultivent le long des rivières comme c’est le cas de la rivière Mutimbuzi et fragilisent ainsi leurs berges qui finissent par céder. Ceci s’ajoute à la mauvaise pratique des curages non encadrés à la recherche des matériaux de construction.
Les canaux d’évacuation des eaux de ruissellement qui ne sont plus adaptés au débit des pluies diluviennes et qui sont pour la plupart bouchés par des bouteilles en plastique et des déchets ménagers provoquant eux aussi des inondations. Cette situation est aggravée par la pression démographique et les effets des changements climatiques.
Il reconnait que la rivière Ntahangwa allait causer des dégâts énormes aux infrastructures tant publiques que privées n’eut été le retraçage de ces rives et leur stabilisation. « Cette activité salvatrice pour ses riverains est menée dans le cadre du Projet de la Gestion Communautaire des Risques de Catastrophes liés aux Changements Climatiques avec l’appui financier du Fonds Mondial pour l’Environnement et du PNUD. Cette activité fait suite à l’aménagement des fosses antiérosives sur la rivière Ntahangwa en amont sur une distance de 1.000 Kilomètres par le même projet ».
Des travaux d’aménagement sont encore à faire
L’OPC1 Nibaruta soutient qu’il est prévu que ce lot soit fait avant la fin de l’an 2020. Il est souhaitable que ce genre de travail soit aussi fait en amont du Pont de la République sur le Boulevard Mwezi Gisabo où une école primaire est menacée par la destruction des berges de la rivière Ntahangwa avec une route complètement coupée à Mutanga Sud ainsi que des maisons d’habitation menacées.
Concernant les travaux de réhabilitation du pont cassé sur l’avenue Mutaga III à l’endroit communément appelé Kwa Vyisi, le Directeur Général Adjoint de la Protection Civile et de la Gestion des Catastrophes explique que ces travaux étaient aux arrêts, car l’entreprise EIS-EKA s’est révélée incapable de poursuivre les travaux. La Régie Militaire de Construction/RMC est à l’œuvre depuis le 17 octobre 2019 et devra remettre le résultat du travail dans un délai de trois mois.
Selon lui, le phénomène de ravinement est une nouvelle forme de menace. Tel est le cas du ravin Nyamanogo situé dans le quartier Mirango II de la zone Kamenge qui risque d’endommager les installations de la Regideso et qui a déjà envahi un grand terrain avec une progression spectaculaire et inquiétante qui mettra à mal les habitations riveraines.
Le ravin de Nyenzari situé dans Gihosha Rural a déjà emporté des dizaines de maisons d’habitation et menace d’autres. La population est retissante à l’évacuation des lieux, mais s’expose à un grand risque. Le collecteur de Mugoyi qui a été conçu et aménagé pour la protection du quartier Kajiji ne sert plus à cette fonction. Dès qu’il pleut, ce canal d’évacuation des eaux de pluie, est rempli de sable et de boue et l’aménagement inachevé des sites de Nkenga et Busoro aggrave cette situation. Des travaux d’aménagement sont encore à faire à ces endroits. Nibaruta demande au ministère ayant les travaux publics dans ses attributions d’inscrire dans son plan d’action la réalisation de ces activités.
Il sied de plaider pour la population de Gahahe qui est menacée par les eaux de pluie issues de l’aménagement d’un terrain à Gasenyi par des Députés. Le canal aménagé est arrêté à la sortie du site appartenant à ces Représentants du Peuple et à partir de cet endroit, l’eau envahit tout ce qui se trouve sur son passage. En effet, cette eau devrait être acheminée vers la rivière Gikoma.
Pour lui, l’administration doit sensibiliser la population pour ne plus jeter les bouteilles en plastique dans les canaux d’évacuation des eaux usées, s’assurer que les compagnies qui collectent les déchets ménagers font correctement leur travail et s’impliquer dans la réouverture des canaux bouchés.
Signalons que selon le projet intitulé : « Appui à la réduction des risques de catastrophes naturelles et à la résilience communautaire au Burundi (2019-2023)», plus de 13 millions USD sont alloués à la réduction des risques de catastrophes et au renforcement de la résilience des communautés. Ce projet a été lancé officiellement le 21 août 2019. Il touche sept provinces les plus affectées par les catastrophes naturelles, à savoir: Bubanza, Cibitoke, Bujumbura Mairie, Kirundo, Bujumbura, Rumonge et Muyinga.
De ce fait, le portefeuille du projet s’élève à 13 110 000 USD dont 6 millions USD de contribution du PNUD. A terme, le projet permettra de développer la culture du risque, d’accroître la préparation de la réponse aux urgences et de renforcer les capacités institutionnelles des mécanismes de coordination. Le projet va aider dans la cartographie les catastrophes spécifiques à chaque commune qui seront intégrés dans les plans de développement communaux.
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