On a tous entendu au moins une fois dans notre vie cette expression : « Kirundo, le grenier du pays » ou encore une variété de haricots appelé « Kirundo ». Toutes ces expressions utilisées pour qualifier cette province ne sont pas anodines. Dans cet article, on vous amène à la découverte d’une pratique de conservation de la récolte de grains de haricot sec qui est abondante dans cette région du Nord du pays
Malgré la sécheresse qui a frappé maintes fois la province de Kirundo, elle reste connue pour ses récoltes combien importantes, surtout quand il s’agit du haricot. La récolte de la saison culturale B bat son aile et les agriculteurs sont entrain de récolter les grains de haricot. Ainsi qui dit récolter beaucoup amène à imaginer comment conserver cette récolte. Pour les agriculteurs de la commune Busoni en province de Kirundo, conserver leur récolte de haricot n’est plus un casse-tête. La seule astuce utilisée par ces agriculteurs de cette région est l’utilisation d’une variété de terre trouvée dans les collines de cette commune : « Inginagina » ou « Igishonyi ». Facile à utiliser et à la portée de tous, les agriculteurs se réjouissent de l’efficacité de ces nouveaux insecticides naturels.

Les agriculteurs de la commune Busoni n’utilisent plus les insecticides chimiques pour protéger leurs récoltes de grains de haricots. Ils utilisent une variété de terre appelée « igishonyi » ou « inginagina ».
Une découverte de la veille
Autrefois, il existait de nombreuses méthodes de protection des produits locaux stockés, surtout les graines. On faisait recours aux méthodes traditionnelles telles que l’utilisation de certains matériaux naturels (plantes, minéraux, huile, cendres…). Ces méthodes n’étant pas à 100% efficaces, on a introduit des produits chimiques qui ont souvent fait oublier les méthodes ancestrales de protection des stocks.
C’est là où le DDT a commencé à séduire beaucoup d’agriculteurs. Le DDT (le Dichloro-Diphényle-Trichloroéthane) communément appelé « Kirorina » est un pesticide chimique organo-chloré incolore utilisé pour détruire les insectes porteurs de maladies ou destructeurs de récoltes. C’est donc un insecticide. Bien que ce produit soit interdit depuis des années en Amérique du Nord et en Europe, il est encore utilisé dans les pays en voie de développement dont le Burundi. Selon les agriculteurs de cette région, cette pesticide a été utilisé jusqu’il y a environ une dizaine d’années quand ils ont découvert cette nouvelle pratique de protéger leurs récoltes de haricots.
Une découverte née d’un besoin réel
Le DDT est un POP (polluant organique persistant) qui sert à éliminer les insectes destructeurs des cultures, mais il est transporté sur de longues distances par l’eau, loin des surfaces où il est épandu. Comme le DDT est liposoluble, il persiste dans les graisses animales et il s’accumule dans les organismes qui se situent en haut de la chaîne alimentaire. Ainsi, le DDT a pu être retrouvé chez de grands prédateurs comme les aigles, mais aussi dans le lait maternel.
Face au danger que présente cet insecticide, beaucoup d’agriculteurs ont commencé à en prendre conscience. Ils sont devenus réticents à son utilisation. Toutefois, il devrait y avoir une alternative. « Une autre contrainte qui se présentait était que cet insecticide chimique coûtait cher aux agriculteurs », indique un des administratifs à la base avec qui on s’est entretenu. Il fallait à tout prix chercher une autre un substituant vu que la récolte devrait passer plusieurs mois sans être écoulée. Cependant, quand on demande aux habitants de cette région, qui a (ont) découvert cette technique, ils n’ont pas de réponse très claire. Tout ce qu’ils savent, c’est qu’ils ont trouvé un excellent insecticide capable de protéger leurs récoltes de haricots des charançons pendant au moins une année ou voire plus.
Un insecticide facile à utiliser
Comme l’explique les habitants de Busoni, cet insecticide naturel est facile à préparer. Il faut juste repérer là où extraire cette variété de terre « inginagina » ou «igishonyi». Cela n’est pas un problème, vu qu’il existerait différentes collines renfermant ces terres. Ensuite, il faudra préparer cette terre en la mélangeant avec de l’eau de façon à faire une solution semblable à un yaourt. En étalant ensuite les grains de haricot sur une tente sous les rayons au soleil, ils appliquent cette solution (qui colle comme l’argile) sur les grains jusqu’à ce qu’il est une petite couche de cette solution sur les grains. Le reste est d’attendre que les grains soient complètement séchés et de les conserver dans les sacs. La technique est appelée « Guhungira » par les habitants de cette localité. A part que lors de la cuisson, les grains demanderont d’être bien lavés, certainement avec beaucoup d’eau, cet insecticide ne présenterait aucun autre danger selon les tenants de cette pratique. « Ça fait une dizaine d’années que j’utilise cette terre pour conserver bien ma récolte. Elle ne m’a jamais causé de problème. En plus il est durable », révèle une cultivatrice de la colline Burara, en commune de Busoni.
Cette technique serait aussi répandue dans les communes Bwambarangwe et Bugabira qui sont également de grands producteurs de haricots. Les autres agriculteurs des autres régions auraient eux aussi commencé à avoir vent de cette technique. Toutefois, elle semble méconnue du reste des régions du Burundi. Selon les défenseurs de l’agriculture biologique, il existerait d’autres types de pesticides naturels qui peuvent être utilisés dans la protection des grains de céréales. Pour les habitants de Busoni, leurs haricots sont sauvés d’office. Doit-on s’attendre à une autre découverte pour protéger la récolte des autres céréales ?
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