Editorial

Des coopératives pour doper l’économie ?

L’approche communautaire de création des coopératives est en vogue. Cependant, cette politique ne date pas d’hier. Le mouvement coopératif est bien connu au Burundi à la veille de l’indépendance. Le prince Louis Rwagasore, héro de l’indépendance en avait fait son cheval de bataille pour booster la production. Cependant, ce mouvement n’a pas fait long feu. Le programme est resté en mode veille jusqu’au lendemain de la crise socio-politique qu’a connue notre pays.

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Pour relever l’économie du pays, plusieurs ONG et d’autres partenaires techniques et financiers du gouvernement innovent avec des approches différentes en faveur du développement communautaire. Ainsi, les populations sont sensibilisées pour se regrouper dans des associations, puis des groupements PR coopératifs dont la fusion aboutira à des coopératives à part entière. L’organisation est très parfaite et les coopératives connaissent des succès sans précédent, surtout dans le secteur agropastoral.

Plus tard,  les politiques s’emparent de l’approche. Désormais, le mot d’ordre est lancé. Les populations doivent adhérer à des coopératives collinaires. Chaque coopérative doit bénéficier de 10 millions de FBu pour réaliser des projets de développement. Certains bénéficiaires  considèrent ces fonds comme une manne à partager équitablement entre les coopérateurs au lieu d’initier des projets de développement. D’autres deviennent réticents à intégrer les coopératives. Ils émettent des doutes sur l’intention cachée derrière le «gibier».

Les coopératives SANGWE ont été inaugurées à l’échelle nationale avec des cérémonies en grande pompe. Le budget général de l’Etat, exercice 2020-2021 prévoit des fonds pour appuyer les coopératives collinaires sous forme de prêts.  Il s’agit de la concrétisation de l’article 89 de la loi régissant les sociétés coopératives au Burundi. Ces dernières bénéficient d’une aide de la part de l’Etat sous forme d’assistance technique, de subventions, de prêts. A l’Assemblée Nationale, un débat houleux sur l’identification des bénéficiaires de ces appuis a eu lieu lors de la séance d’adoption du projet de loi portant fixation du budget général de l’Etat, exercice 2020-2021. Finalement, les députés adoptent ce projet de loi à l’unanimité malgré les inquiétudes soulevées.

Les échéances de remboursement sont relativement courtes. Les bénéficiaires doivent rembourser les fonds endéans deux ans. Le compte à rebours est lancé. Des projets (dans l’agriculture, l’élevage, le commerce des biens et  des services, etc.) ont été initiés en dépit des risques pouvant compromettre leur résultat.  Pire encore, la solvabilité des bénéficiaires n’est pas garantie. La loi susmentionnée prône la transparence dans la gestion des fonds. Elle exige la tenue d’un livre de caisse, d’un livre de banque et le classement des pièces justificatives des dépenses. Des pratiques qui ne sont pas à la portée de tous.

L’idée de création des coopératives communautaires n’est pas mauvaise en soi, mais elle est nécessite des mesures d’accompagnement. La réglementation à elle seule ne suffit pas. L’encadrement de proximité est plus que nécessaire pour suivre de près les activités de ces coopératives. Le développement communautaire suppose l’implication des bénéficiaires directs dans la conception des projets. Ces derniers apportent des solutions à des problèmes réels d’une communauté. Pourtant, cette étape cruciale n’est pas souvent tenue compte. En conséquence, la pérennité des projets communautaires est remise en cause.  Il n’est plus question de  projets «valises» ou importés mais plutôt d’associer les communautés locales pour qu’elles deviennent artisans de leur développement.

A propos de l'auteur

Benjamin Kuriyo.

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  • éditorial

    Sans transparence, pas de confiance

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    Dans une interview accordée au journal Burundi Eco, Albert G. Zeufack, directeur des opérations de la Banque Mondiale pour quatre pays africains, à savoir : la République Démocratique du Congo (RDC), l’Angola, le Burundi et São Tomé-et-Príncipe, en visite au Burundi à la mi-avril 2025, est revenu à plusieurs reprises sur un mot-clé : transparence. « Sans transparence, il ne peut pas y avoir de confiance », a-t-il affirmé. Selon lui, la transparence est essentielle à la mise en œuvre des visions claires formulées par le gouvernement pour conduire le pays vers un développement durable. Il rappelle d’ailleurs :« La transparence des données est fondamentale. »
  • Journal n° 657

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