Six coups d’état en Afrique en deux ans : au Mali, au Tchad, en Guinée Conakry et au Soudan. Une situation qui rappelle l’époque les décennies passées où la prise de pouvoir par l’intermédiaire d’un putsch était monnaie courante. Un phénomène qui constitue une épine dans le développement des pays concernés
Les chiffres alertent. L’Afrique aurait connu plus de 200 tentatives de coups d’Etat depuis la fin des années 1950. Le Burkina Faso, le Bénin, le Burundi, la Sierra Léone, le Niger, le Tchad, le Soudan, la Guinée Bissau et les îles Comores ont connu entre 7 et 18 coups d’Etat. Environ la moitié d’entre ces coups ont réussi, c’est-à-dire qu’ils ont duré plus de sept jours. Le Burkina Faso, en Afrique de l’Ouest, connait le plus grand nombre de tentatives réussis, avec sept et un seul échec. Sur les 11 coups d’Etat enregistrés dans le monde depuis 2017, tous sauf un, le Myanmar en février de cette année, ont eu lieu en Afrique. Un record qui fait froid au dos.

L’Afrique aurait connu plus de 200 tentatives de coups d’Etat depuis la fin des années 1950. Environ la moitié d’entre ces coups ont réussi. (Source : BBC)
Un phénomène qui ne date pas d’hier
Les coups d’Etat sont apparus en Afrique au lendemain des indépendances. . De Patrice Lumumba à Modibo Keita en passant par Kwame Nkrumah, ces coups d’Etat étaient d’abord dirigés contre les premiers pères des indépendances ou les pouvoirs qui incarnés davantage beaucoup plus de proximités avec les populations, explique Sylvestre Ntibantunganya, ancien président du Burundi. Cela paraissait comme une remise en cause de ce leadership vers une indépendance réelle tel que le voulait les pères des indépendances.
Cela a duré jusqu’à la fin des années 1980 quand le sommet France-Afrique de la Baule arrive. Le président François Mitterrand appelle les chefs d’Etat africains et leur dit: « Ecoutez, celui qui ne va revoir l’agenda de son pays dans le cadre du multipartisme politique avec des élections librement organisées (…), la France sera dans l’obligation de revoir la copie dans nos relations », commente président Ntibantunganya.
Après ce sommet de la Baule, il y a eu des changements qui n’ont pas tenu longtemps. Le cas illustratif est celui du Burundi. A peine le président Melchior Ndadaye est élu, il est assassiné. C’était en quelques sortes une négation par la voie du coup d’Etat de l’orientation démocratique que les pays s’étaient donnée, dit-il.
Depuis lors, tant bien que mal, les pays ont tenté d’organiser la gestion du pouvoir à travers des processus plus ou moins démocratiques. Mais avec les coups d’Etats qui rejaillissent en Afrique de l’Ouest, l’opinion craint la résurgence de cette période.
Des conséquences économiques
Globalement, l’Afrique a connu plus de coups d’État que tout autre continent. Ce qui inciterait à une conclusion que pour le moins qu’on puisse dire, le freinage du développement économique de l’Afrique est en partie lié aux incessantes crises politiques qui frappent la plupart de ses Etats car il ne saurait y avoir de décollage économique sans balisage politique. Une analyse qui n’est pas loin du commentaire du président Ntibantunganya : « Regardez les Etats qui ont pris des options électorales bien organisées dans la transparence. Ils ont bien réussi. C’est le cas du Ghana, des îles la Cap Vert, du Botswana, de la Tanzanie… Les pays africains ont connu les conditions préliminaires aux coups d’Etat, comme la pauvreté et les mauvaises performances économiques ». Tout en ajoutant qu’un coût d’Etat est un problème pour l’émergence d’un pays
« Le meilleur ennemi de l’investissement est le désordre », précise Président Ntibantunganya. Ces pays marqués par les coups d’Etats inspireraient moins la confiance aux investisseurs. Cette réalité fait ressortir que les coups d’Etat constituent un frein au développement économique. Ils n’ont pas certes un impact significatif sur le bien-être des populations dans le court terme, ce qui pourrait expliquer le soutien d’une certaine partie de la population aux mutineries. En réalité, le coût d’un coup d’Etat s’observe dans le long terme à travers une stagnation du niveau de vie et une paupérisation relativement élevée aux autres pays, selon Georges Vivien Houngbonon, économiste camerounais.
Il importe ainsi de signaler que les pays qui connaissent un coup d’Etat sont souvent soumis aux sanctions économiques et exclus des communautés économiques dont ils sont membres. Le cas récent est celui du Mali et de la Guinée Conakry.
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