Société

Une femme qui s’est imposée dans les ONGs grâce à une moto

Depuis le début de sa carrière professionnelle (bientôt 15 ans d’expériences), Mme Daphrose Niyuhire travaille toujours dans les organisations non gouvernementales parce qu’elle sait conduire une moto. Cette « deux roues » est devenue un gagne-pain pour sa famille. Nous l’avons rencontré au chef-lieu de la province Cankuzo

Au Burundi, c’est rare de voir une femme conduisant une moto. Même dans la capitale économique, dit-on, où il y a des gens civilisés. Mais Mme Niyuhire n’a pas loupé une seule seconde pour saisir l’opportunité qui lui était offerte et n’a pas hésité à affronter ce défi.

Daphrose Niyuhire a 40 ans. Elle est mariée et mère de 4 enfants. Elle travaille dans une Organisation Non Gouvernementale (ONG) basée dans la province de Cankuzo. Mercredi le 14 avril 2021, nous la rencontrons à 7h 30 du matin à son lieu de travail. Elle prépare sa moto pour se rendre dans la commune de Cendajuru. Elle révèle qu’elle a commencé à conduire une moto en 2004. A cette époque, Mme Niyuhire était encore célibataire. Je venais de terminer mes études puis une ONG qui était basée à Makamba a lancé un avis de recrutement.

Selon elle, le test de recrutement devrait se faire à Bujumbura. Pour être embauché, savoir conduire une moto était l’une des conditions exigées. « On a d’abord fait le test écrit.  Mais le lendemain, avant de passer l’interview (fixée à 14h), les candidats sélectionnés devraient montrer qu’ils savaient conduire une moto. « Le matin de cette journée, je me suis exercée pour la toute première fois à conduire une moto. C’était au terrain du petit séminaire de Kanyosha, dans la commune urbaine de Muha. Un ami m’y a aidé, juste deux heures », raconte Mme Niyuhire. Je n’avais pas la maîtrise, mais j’avais quelques notions. Lors du test, j’ai essayé parce que j’avais quelques notions, fait-elle savoir. Elle précise qu’elle a été la seule femme à être recrutée pour cet appel d’offre. « Du coup, nous avons commencé à travailler mais, pour nous qui ne maitrisaient pas la conduite à moto, on nous a donné une faveur d’un mois pour faire mieux. En deux semaines, je l’avais déjà maîtrisé ».

Daphrose Niyuhire a bientôt 15 ans d’expériences dans les ONGs parce qu’elle sait conduire une moto.

14 ans d’expériences

Depuis le début de sa carrière professionnelle, Mme Niyuhire travaille toujours dans les organisations non gouvernementales. Elle a déjà travaillé dans cinq ONGs et dans six provinces (Makamba, Rutana, Karusi, Kirundo, Cankuzo, Ruyigi).

Cette femme affirme avoir la chance d’être embauchée parce qu’elle sait conduire une moto. « Les organisations qui font le travail de terrain préfèrent recruter les gens qui savent conduire une moto. Avec les politiques d’équilibrer le genre, j’ai beaucoup de chances en tant que femme. Savoir conduire une moto me permet d’être embauchée facilement », indique Mme Niyuhire.

Elle est fière de travailler dans les communautés rurales. «Je me réjouis de servir les communautés rurales. Faire des animations éducatives dans les communautés, c’est la meilleure des choses à faire», explique-t-elle. Actuellement, je préfère les postes de terrain par rapport à celles de bureau ».

190 km par jour

Pour Daphrose Niyuhire, les premiers jours à moto était difficiles. «Parfois, je tombais mais, plus je persévérais, plus j’acquérais de l’expérience. Elle précise qu’elle pouvait parcourir 80 km ou plus par jour. « Je travaillais dans la commune Kayogoro, mais je résidais au chef-lieu de la province Makamba». Actuellement, à Cankuzo, Mme Niyuhire indique qu’elle peut parcourir 190 km par jour. Par exemple, si je vais à Butezi dans la province de Ruyigi, je dois faire un long trajet. Dans les communautés rurales, on est obligé de se rendre jusque dans les coins les plus reculés du pays.

Etre enceinte et conduire une moto, c’est parfois fatiguant

Daphrose Niyuhire reconnait que les accidents sont quelquefois inévitables. Elle se souvient toujours de l’accident qu’elle a fait dans la commune de Cendajuru. Je me suis cognée avec un motard. J’ai été admise à l’hôpital et j’ai passé plus d’un an avec un choc sur le bras.

Cette femme ajoute que c’est fatiguant de conduire une moto dans la période de grossesse. « Quelquefois, on a des malaises quand on est enceinte, mais on doit faire face à ce défi », indique-t-elle tout en ajoutant que quand cela lui arrive, elle le signale à ses chefs hiérarchiques. Et de préciser qu’elle prend toujours les congés prévus par le code du travail burundais.

Elle fait également face aux préjugés de la population. Parfois, certaines personnes me disent que ce n’est pas bon de conduire une moto étant une femme. « La communauté burundaise n’est pas habituée à voir les femmes conduisant les motos. Dans les campagnes, la population rurale est surprise de voir une femme conduire une moto. Les enfants et les vieux viennent s’attrouper autour de moi ». Néanmoins, elle révèle qu’elle s’entend très bien avec son mari. « Avant même notre mariage, il savait que je conduisais une moto et il m’a toujours soutenu ».

L’autre défi survient quand elle travaille dans d’autres provinces. « Souvent, je rentrais seulement les weekends. Je ne pouvais pas toujours déplacer ma famille, les enfants qui sont à l’école. C’est impossible de déménager.

Daphrose Niyuhire encourage les autres femmes qui se sentent incapables à affronter les  métiers difficiles. Elle les appelle à briser les complexes et à affronter les métiers jadis réservés aux hommes.

A propos de l'auteur

Bruce Habarugira.

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