Agriculture

Filière coton : Une production marginale

La production du coton au Burundi est à son point le plus bas de son histoire. Le rendement du coton ne cesse de chuter depuis 1993. La diminution des superficies cultivables, la faible mécanisation, les difficultés financières de la Compagnie de Gérance des Cotons (COGERCO) sont quelques-unes des causes

La COGERCO enregistre actuellement moins de 1000 tonnes de coton de graine. C’est une production que cette société n’avait jamais connue au cours de son existence, selon Gustave Majambere, directeur général de la Compagnie de Gérances des Cotons (COGERCO). En 1993, la production était estimée à 9 000 tonnes de coton graine.

Gustave Majambere indique que les causes de la faible production de coton sont multiples. Il s’agit de la diminution des superficies cultivables, de la faible mécanisation et des difficultés financières de la COGERCO. Selon lui, les superficies disponibles actuellement sont aux environs de 2000 hectares.  En 1961, les superficies réservées au coton  étaient à 11500 hectares.

La COGERCO enregistre actuellement moins de 1000 tonnes de coton graine.

Quelles sont les causes de la diminution des superficies réservées à la culture du coton ?

Parmi les causes de la diminution des superficies réservées à la culture du coton, figure la spoliation des superficies cotonnières par des personnes qui se sont illégalement attribuées des terres. D’autres terres ont été attribuées par les autorités qui en avaient les prérogatives mais, malheureusement ces superficies n’ont pas été utilisées pour les causes pour lesquelles elles avaient été demandées, révèle le directeur général de la COGERCO.

A cela,  s’ajoute la pression démographique qui a fait que certaines gens se sont emparées des réserves cotonnières. « La population a fortement augmenté. Cette augmentation devrait aller de pair avec la demande en termes de nourriture de la population. La superficie naguère allouée au coton a été par après utilisée pour la production des cultures vivrières qui sont directement consommables par la population.

Le directeur général de la COGERCO évoque également la faible mécanisation.  La COGERCO fait face au manque de tracteurs, outils incontournables dans la production du coton. Dans le temps, la COGERCO avait beaucoup de tracteurs et pouvait exploiter une superficie importante mais actuellement, cette société n’en dispose plus. Pour Gustave Majambere, même la petite superficie cotonnière qui est actuellement disponible n’est pas exploitée en entier faute de tracteurs. Donc pas de possibilités de labourer par mécanisation et le recours à la population qui utilise de la houe s’avéra nécessaire. M. Majambere indique que la population imposait de mettre à cote du coton d’autres cultures intercalaires. Ces cultures viennent diminuer la production du coton.

La diminution des recettes est venue amoindrir la production cotonnière. Le manque de crédits accordés aux cotonculteurs est un défi de taille. « Quand la COGERCO avait encore des moyens grâce à une production suffisante, elle obtenait des revenus suffisants.  Grâce à ces revenus, la société pouvait alors donner des crédits aux agriculteurs qui cherchaient des terres à louer. Actuellement, on n’a plus de revenus suffisants ; donc on ne peut plus donner de crédits aux agriculteurs et on ne peut pas alors avoir les terrains qui étaient obtenus par location.

La demande de l’Afritextile insatisfaite

La culture du coton a été introduite au Burundi en 1920 dans la région de l’Imbo. Dès lors, la pratique de la cotonculture s’est répandue rapidement et la production augmenta. Elle atteignit 8 813 tonnes en 1983. A partir de 1993, la production commença à chuter suite a la crise sociopolitique qu’a connue le Burundi. Selon Gustave Majambere, directeur général de la COGERCO, la production actuelle du coton oscille aux environs de 700 tonnes de coton graine pour en fin en tirer 330 tonnes de coton fibres. Selon Gustave Majambere, cette production ne satisfait pas la demande de l’Afritextile, qui est d’ailleurs le principal client de la COGERCO.

Pas d’exportations

Quelques années après son introduction, le coton a été la deuxième culture d’exportation après le café. Il rapportait aussi beaucoup de devises. Même après quelques années, il a continué à figurer parmi les 3 premières cultures d’exportation du pays alors que maintenant la COGERCO ne parvient même  pas à satisfaire la demande locale donc ne peut pas encore penser à l’exportation. Néanmoins, Majambere affirme que le coton burundais se classe parmi les cotons de meilleure qualité de part le monde.

700 FBu par kilo de coton

Actuellement, le prix du coton est de 700 FBu par kg. Entre 1960 et 2008, les cours du coton ont été multipliés par 33 (passant de 7 FBu/kg à 230 FBu/kg).

Les cotonculteurs venaient de passer deux ans sur une rémunération de 6 00F/kg, indique-t-il. Pour la campagne en cours, nous avons pris une décision d’augmenter encore le prix par kg pour passer de 600 FBu à 700 FBu/kg.

Des initiatives pour redynamiser la culture?

Selon M. Majambere, les initiatives sont là et nombreuses. Dans le cadre de la relance de la production du coton, le Gouvernement du Burundi a adopté la Stratégie nationale pour la redynamisation de la filière coton-textile-habillement. Cette stratégie envisage d’augmenter la production du coton avec comme objectif de couvrir les besoins de l’industrie textile locale, régionale  et internationale.  Mais cette stratégie n’est pas encore opérationnelle jusqu’à ce jour.

Lors de la retraite organisée en août 2020, pour réfléchir sur les voies et moyens de redynamiser le secteur, des alternatives ont été proposées, entre autres un financement propre du gouvernement mobilisant 8 747 400 000 FBu en faveur de la COGERCO afin qu’elle produise 6000 tonnes de coton par an sur 3000 hectares. Le Conseil des ministres tenu mercredi le 09 décembre2020, à Bujumbura a fait remarquer que s’il est question de financement, celui-ci portera sur le développement de la culture du coton. « Il ne s’agit pas de financer la COGERCO, mais plutôt de trouver les voies et moyens d’accroître la production du coton », lit-on dans le communiqué de presse sanctionnant ce conseil des ministres.

En outre, le gouvernement a signé, en mai 2020, un mémorandum d’entente avec la société Afritextile pour redynamiser la filière coton. Dans le même conseil des ministres du mercredi 09 décembre 2020, il a été précisé que cette société n’a pas encore honoré ses engagements. Il a donc été demandé de continuer la voie du partenariat avec cette société qui va développer la culture du coton sur des terres que lui aura concédé l’Etat. Les modalités de ce partenariat seront à définir.

En 2020, la COGERCO a recouvré 250 hectares de superficies qui étaient spoliées.

250 hectares de superficies cotonnières recouvrées

La COGERCO est également à la recherche des terres. Aujourd’hui, le gouvernement est aussi engagé à redonner à la Cogerco les terres qui ont été spoliées par des particuliers. Cela afin qu’on puisse encore avoir une production suffisante. Cette année, nous avons recouvré 250 hectares dont 50 hectares en commune Rugombo et 200 hectares en commune Buganda.

Le projet Cotton Victoria pour redynamiser la culture du coton

Dans sa l’objectif de redynamiser la culture du coton, la COGERCO est à la recherche des partenaires. Actuellement, nous collaborons avec l’Agence Brésilienne de Coopération (ABC). Cette agence collabore avec la COGERCO à travers le projet Cotton Victoria. Ce projet réunit le Burundi, la Tanzanie et le Kenya. La coopération brésilienne s’est donnée comme objectif de développer la culture du coton dans ces trois pays. Le projet cible surtout l’amélioration du potentiel semencier dans tous ses aspects et l’amélioration des méthodes culturales. A la fin du projet, le Burundi sera capable de maîtriser toute la chaine de production des semences de très haute qualité.

Une autre initiative est la recherche des financements. Le gouvernement, à travers son mécanisme d’appui à la production de contrats sous forme de partenariats publics-privés, est en train de voir comment des investisseurs potentiels pourraient investir dans la production du coton et dans sa transformation. C’est une alternative de financement qui peut contribuer beaucoup à la redynamisation ou la relance et  de la filière coton du Burundi. Depuis l’année 2020, la COGERCO en collaboration avec l’ANACOOP est en train de fournir beaucoup d’efforts dans la restructuration et le renforcement des capacités des cotonculteurs, indique M. Majambere. Les résultats sont déjà palpables. Nous avons vu naître une quarantaine de coopératives de cotonculteurs et bientôt nous allons signer des contrats avec ces coopératives, des contrats d’exploitation des réserves cotonnières que nous allons mettre à leur disposition.

Dans ce secteur, les partenariats visent à augmenter la production du coton étant donné que les pays de la  sous-région ont pris de décision de bannir à  jamais les friperies (habits de seconde main).

Au Burundi, le coton se cultive dans les régions de basse altitude. Actuellement, il est cultivé dans la région de l’Imbo, précisément dans les provinces de Cibitoke et Bubanza. Dans le temps, il y avait des espaces réservés à la culture du coton depuis Cibitoke jusqu’à Makamba. Le coton est également cultivé dans la région du Moso (provinces de Rutana et de Ruyigi). « Nous avons commencé à faire des essais d’adaptabilité dans les dépressions du Nord de Bugesera et de Buyogoma dans le cadre de l’extension de la culture du coton vers d’autres régions », fait savoir le DG de la COGERCO.

A propos de l'auteur

Bruce Habarugira.

Le contenu des commentaires ne doit pas contrevenir aux lois et réglementations en vigueur.
La rédaction se réserve le droit de ne pas publier les commentaires enfreignant ces règles et les règles de bonne conduite.



éditorial

Sans transparence, pas de confiance

Sans transparence, pas de confiance

Dans une interview accordée au journal Burundi Eco, Albert G. Zeufack, directeur des opérations de la Banque Mondiale pour quatre pays africains, à savoir : la République Démocratique du Congo (RDC), l’Angola, le Burundi et São Tomé-et-Príncipe, en visite au Burundi à la mi-avril 2025, est revenu à plusieurs reprises sur un mot-clé : transparence. « Sans transparence, il ne peut pas y avoir de confiance », a-t-il affirmé. Selon lui, la transparence est essentielle à la mise en œuvre des visions claires formulées par le gouvernement pour conduire le pays vers un développement durable. Il rappelle d’ailleurs :« La transparence des données est fondamentale. »

    Abonnez-vous à notre bulletin

    Journal n° 657

    Dossiers Pédagogiques

    Facebook


  • éditorial

    Sans transparence, pas de confiance

    Sans transparence, pas de confiance

    Dans une interview accordée au journal Burundi Eco, Albert G. Zeufack, directeur des opérations de la Banque Mondiale pour quatre pays africains, à savoir : la République Démocratique du Congo (RDC), l’Angola, le Burundi et São Tomé-et-Príncipe, en visite au Burundi à la mi-avril 2025, est revenu à plusieurs reprises sur un mot-clé : transparence. « Sans transparence, il ne peut pas y avoir de confiance », a-t-il affirmé. Selon lui, la transparence est essentielle à la mise en œuvre des visions claires formulées par le gouvernement pour conduire le pays vers un développement durable. Il rappelle d’ailleurs :« La transparence des données est fondamentale. »
  • Journal n° 657

  • Dossiers Pédagogiques