Société

Fuite des cerveaux : une épine dans le pied du développement du pays

Le phénomène de la fuite des cerveaux pose problème au Burundi. Bon nombre de Burundais qui partent à l’étranger pour parachever leurs études supérieures ne reviennent pas pour servir leur pays natal. Cela constitue une épine dans le pied du développement du pays. Les conditions non favorables à l’épanouissement socioprofessionnel sont l’une des causes de ce fléau 

Parfois, ce sont des étudiants qui ont des bourses d’études à l’étranger et qui ne pensent pas à retourner dans leurs pays d’origine à la fin de leur formation ou ce sont des gens qui sont au pays et qui sont sollicités ailleurs pour leurs compétences et décident de s’expatrier, explique Dr Siméon Barumwete, ex-président du syndicat du personnel enseignant de l’Université du Burundi. Il signale d’abord que la fuite des cerveaux n’est pas un phénomène qui concerne seulement le Burundi. « Il est généralisé non seulement dans les pays africains, mais aussi dans le monde entier ».

En octobre 2020, lors d’une retraite des jeunes intellectuels burundais, le chef de l’Etat Evariste Ndayishimiye a déploré que de plus en plus jeunes partent à l’étranger pour poursuivre leurs études avec une bourse d’études du gouvernement mais qu’à la fin de leurs études, ils ne rentrent pas. Selon lui, cela constitue un manque à gagner pour le pays. Il a appelé les intellectuels burundais à rentrer au pays parce que le capital humain est l’un des piliers du développement durable.

L’épanouissement socioprofessionnel dont ils bénéficient lorsqu’ils sont à l’étranger les pousse à y rester.

Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce phénomène

Dr Barumwete évoque des raisons économiques. Quand le salaire n’est pas élevé dans un pays, les gens vont chercher là où les conditions sont meilleures. S’ils ont fait de bonnes études à l’étranger, ils sont compétitifs sur le marché du travail et ils sont sollicités. « L’épanouissement socioprofessionnel dont ils bénéficient lorsqu’ils sont à l’étranger les pousse à y rester. Quand quelqu’un part à l’étranger et qu’il préfère y rester au lieu de revenir dans son pays, la plupart des fois c’est parce qu’il trouve dans ces pays des conditions favorables à l’épanouissement professionnel et surtout des conditions financières qui sont très attrayantes et qui font qu’ils pourront faire plus d’économies », ajoute Dr Sylvain Pierre Nzeyimana, président du conseil national de l’Ordre des Médecins du Burundi.

L’environnement socioprofessionnel est également un autre facteur non moins important de la fuite des cerveaux. « Si la situation socio-politique n’est pas bonne dans le pays, s’il y a des violences, des guerres civiles, le népotisme, de la politisation très élevée de l’administration, les étudiants ne reviennent pas. Ils préfèrent demander asile », insiste Dr Barumwete.

L’atrophisation du marché du travail pousse aussi les Burundais qui partent à l’étranger à ne pas revenir. Les étudiants qui suivent des formations très pointues ne reviennent pas par crainte de manquer l’emploi. « Si vous êtes un ingénieur en chemin de fer ou en intelligence artificielle, vous vous demandez en quoi vous allez servir votre pays alors qu’en Europe, vous êtes très recherché. Au finish, vous préférez y rester »

Des pertes énormes pour le pays

L’impact négatif en termes de ressources humaines sont une réalité au Burundi. « Le capital humain est la première richesse. Une profession sans ressources humaines est pauvre. Quand le pays investit dans la formation d’un médecin et qu’à la fin de la formation, ce dernier ne revient pas. C’est une perte énorme pour le pays », précise le président du conseil national de l’Ordre des Médecins du Burundi. Il y a des secteurs qui souffrent toujours de manque de ressources humaines. Que ce soit dans le secteur de l’éducation ou celui de la santé. Par exemple, l’Université du Burundi se heurte à un déficit d’enseignants spécialistes dans les domaines techniques, note Dr Barumwete.

Un léger mieux dans le domaine de la santé

Selon Dr Sylvain Pierre Nzeyimana, actuellement, on constate qu’il y a de plus en plus des médecins spécialistes au pays grâce à une formation spécialisée qui est dispensée dans la faculté de Médecine à l’Université du Burundi. Il y a aussi plus d’opportunités pour les médecins burundais d’aller faire des études dans les pays africains, notamment l’Algérie, le Maroc, le Bénin, le Kenya, le Rwanda … Il ajoute que la coopération Sud-Sud fait que les étudiants reviennent dans leurs pays d’origine par rapport à la coopération sud-nord.

Un cadre d’épanouissement s’impose comme solution

Pour Siméon Barumwete, il faudrait créer un environnement idéal et un cadre d’épanouissement professionnel adéquat. Il faut également voir comment relever les salaires. «Il faut valoriser les compétences. Si on ne le fait pas, d’autres le feront et ils vont vous prendre vos ressources», insiste Dr Nzeyimana.

Siméon Barumwete propose de mettre en place un plan de formation et un diagnostic des compétences recherchées dans chaque domaine. « On pourra par exemple montrer dans quelles compétences le pays a besoin d’investir en 10 ans. Cela permettra de négocier avec les partenaires sur la manière d’offrir les bourses dans des compétences ciblées au lieu d’envoyer des gens pour qu’ils choisissent eux-mêmes leurs filières de formation. Si vous envoyez des gens faire des études de Droit alors qu’on forme sur place en droit, il n’y aurait pas une plus-value. Ce serait une perte ».

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A propos de l'auteur

Bruce Habarugira.

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