Santé

Industrie pharmaceutique, Une nouvelle réglementation appelée de tous les vœux

L’industrie pharmaceutique burundaise est confrontée à des défis multiformes. Ce sont entre autres la quasi-absence d’industries de fabrication des médicaments, le manque d’instituts de formation pharmaceutique spécialisé, la libre fixation des prix des produits pharmaceutiques, etc. Les professionnels de ce secteur réclament la mise en place d’une réglementation actualisée pour réguler ce domaine

Pierre claver Niyonizigiye, Directeur administratif de la Société Industrielle Pharmaceutique (SIPHAR) indique que son entreprise se heurte au problème d’électricité et d’accès au marché alors que son principal client est le gouvernement. L’autre problème évoqué c’est la compétence locale. Selon lui, comme l’Université du Burundi ne dispose pas de facultés de pharmacie industrielle, les employés sont des personnes étrangères, suite à l’indisponibilité de gens compétents au niveau local.

La production industrielle locale connait aussi des problèmes d’ordre conjoncturels comme l’accès aux devises sur le marché même si cela peut trouver des solutions dans le dialogue des parties prenantes. Il affirme qu’il n’y a pas de problèmes de consommation de médicaments produits localement, mais plutôt de canaux de distribution par rapport aux appels d’offre lancés par le gouvernement. « Aucun Burundais n’a refusé de consommer les médicaments produits localement parce que la qualité est vérifiée», rassure t-il.

L’achat des produits à l’étranger ne profite pas au pays

« Quand vous achetez un produit importé, vous payez un fournisseur extérieur, vous lui envoyez l’argent sur son compte. Après il ne paie pas l’impôt au pays, il n’emploie pas un personnel local, et le pays perd énormément. Quand le gouvernement achète un produit de l’extérieur pour 5 millions de dollars, il n’y a pas la contrepartie de l’impôt », déplore Niyonizigiye avant d’ajouter que «  pour les types de médicaments que nous produisons, je peux assurer sur la quantité ». Il précise que la capacité des machines de SIPHAR est actuellement sous utilisée parce qu’il n’y a pas de débouchés pour ses produits. L’industrie doit produire en quantité industrielle.

Justifications des achats à l’étranger

L’approvisionnement en médicaments et autres équipements connexes est confié au Central d’Achat des Médicaments Essentiels, de Dispositifs Médicaux, de produits et matériels de Laboratoire du Burundi (CAMEBU). Phn Julien Mpeteye, directeur technique du CAMEBU explique que les médicaments produits par SIPHAR sont des génériques, mais limités. Ce sont des antalgiques, des anti-inflammatoires, des antibiotiques, des sirops, des suspensions, des comprimés et des gélules. Ils ne produisent pas des sprays, des injectables, des suppositoires et vils. Ses produits représentent un petit pourcentage par rapport aux produits qui entrent. Il y a plus de 6000 molécules qui entrent au Burundi.

« Même si SIPHAR produit des médicaments, si la CAMEBU lance un appel d’offre, elle doit participer comme les autres soumissionnaires. Nous ouvrons les offres au niveau national et international. Après analyse des offres, on attribue les marchés aux gagnants. Si SIPHAR gagne tant mieux. Si elle est plus cher, on donne le marché au moins cher », indique Phn Mpeteye. Les produits sujets d’importation sont basés sur la liste générale des médicaments génériques essentiels, des dispositifs médicaux et produits de laboratoire. Mais les privés peuvent amener et les génériques essentiels et les spécialités qui ne sont pas sur la liste.

Retard dans les commandes

La commande est lancée une fois l’an. A partir du mois de décembre, on signe les lettres de  différents fournisseurs et la première livraison se fait quatre mois après la réception de la lettre de commande. Elle se fait en trois tranches. Pas de problème de budget au CAMEBU. Seulement, informe le directeur technique, des retards  peuvent être observés dans l’octroi des devises au niveau de la Banque centrale et par conséquent le fournisseur ne peut pas embarquer ses produits sans avoir vu l’argent en devises dans sa banque. Ainsi, la Banque centrale ayant toujours privilégié la CAMEBU, le rapport de fin juin de cette année dit que les clients sont servis jusqu’à 70% par rapport au mois de mars où le niveau de satisfaction était estimé autour de 30%.

La Mutuelle de la Fonction Publique (MFP), un client partiel

Phn Julien Mpeteye, direceteur technique de la CAMEBU : « Même si SIPHAR produit des médicaments, si la CAMEBU lance un appel d’offre, elle doit participer comme les autres soumissionnaires ».

Phn Mpeteye reconnait que la MFP a un problème de médicaments. Il fait savoir que lors de la journée portes-ouvertes à Ngozi, des recommandations avaient été émises pour que la CAMEBU puisse importer pour la Mutuelle. « Nous les avons approché. On a fait une réunion avec eux. Ils n’ont pas fait le feedback, mais ils sont venus acheter des médicaments pour quelques millions de FBu. Cependant, ils n’ont pas réagi aux principes. Ils devraient amener leur argent, le mettre sur notre compte et importer pour eux. Ce qu’ils n’ont pas fait », rassure t-il. Concilie Nibigira, directrice générale de la MFP se réserve de tout commentaire et révèle que cette question a été portée au niveau du ministère ayant la santé dans ses attributions.

Justification de la chéreté des médicaments

Au niveau de la CAMEBU, Phn Mpeteye indique que les prix sont très bas parce que la marge bénéficiaire appliquée est de 16%. Mais chez les privés, ils peuvent appliquer une marge bénéficiaire de 200%. Les matières premières ont monté de prix. Le taux de change des devises a aussi varié. S’il n’y a pas de réglementation au niveau des prix, la réglementation se fera lorsque l’Autorité Burundaise de Régulation en Médicaments et en Aliments (ABREMA) sera signé par le Président de la République. Mais jusqu’aujourd’hui, il y a une discordance très grande au niveau des prix des médicaments sur le marché.

Prix pharmacie de la Mutuelle, prix pharmacie privée

Les prix appliqués par les pharmacies de la MFP diffèrent des prix des pharmacies privées. Phn Mpeteye donne des explications à ce sujet. La mutuelle a fixé les prix à partir du mois de janvier 2018. Il y a un livre des prix des médicaments remboursables qui contient, plus de 1200 produits remboursables, spécialités et génériques. Maintenant le prix est fixe, il n’est pas révisable. Entretemps, il y a changement des prix au niveau du marché international, la mutuelle ne s’ajuste pas. Le prix reste fixe. Quand le malade vient, on lui prescrit le médicament. Le pharmacien titulaire de la pharmacie privée qui a signé un accord avec la mutuelle trouve que le prix qu’il a actualisé chez lui est disconcordant avec le prix de la mutuelle. Il y a une différence parce qu’il a eu le médicament trop cher au niveau du grossiste et ne peut pas le donner au prix de la mutuelle parce qu’il va perdre. Et le pharmacien refuse le médicament aux patients. Il ne va pas donner le médicament  parce que la mutuelle ne va pas le rembourser au prix réel. Et les pharmaciens disent il n’y a pas de médicaments alors qu’il y en a. Dans ce cas, on dit au patient la vérité et il accepte de payer 100% parce que la mutuelle n’accepte pas de payer les suppléments. Il faut que la mutuelle puisse s’entendre avec ses partenaires.

Une nouvelle réglementation des produits médicaux s’impose

La réglementation en vigueur aujourd’hui date de 1980 (décret No100/130 du 20 septembre 1980 portant organisation de l’exercice de la pharmacie). La nouvelle réglementation viendrait orienter les importations : le profil de l’importateur,  l’origine des médicaments (Chez les fabricants, chez les groupeurs ou bien chez les grossistes) et le prix des produits médicaux dans les pharmacies.

Les autorités de la réglementation devraient suivre chez les grossistes que les prix qu’ils devraient appliquer à l’entrée sont restées les mêmes. Ils  devront suivre les médicaments dans les détails. Quelle marge les détaillants ont-ils pris sur chaque produit ? L’autorité doit suivre les effets désirables et indésirables des médicaments qui sont envoyés dans les districts et les formations sanitaires. C’est ce qu’on appelle la pharmacovigilance. S’il y a beaucoup d’effets indésirables au niveau de tel produit, les autorités de réglementation devront être saisies pour enlever le médicament du marché.

Effets de la fermeture de l’Office National Pharmaceutique (ONAPHA)

La SIPHAR est née en 2003 après la fermeture de l’ONAPHA. Celui-ci était arrivé à un chiffre d’affaires de 1,6 milliards de FBu. Elle produisait la quinine, le paracétamol, l’ampicilline, l’amicilline et beaucoup de suspensions de sirop. Aujourd’hui on les importe. Phn Julien Mpeteye décrit les raisons de la fermeture de l’ONAPHA. Membre du conseil d’administration de l’ONAPHA de l’époque. Phn Mpeteye fait savoir que le ministre de la Santé publique d’alors décida unilatéralement d’exiger à l’ONAPHA de produire des textes d’autorisation de mise sur le marché des produits qui étaient déjà sur le marché depuis 1976. L’ONAPHA ne pouvait pas le faire immédiatement.

Il fut une entreprise publique avec des certificats d’analyse. L’ONAPHA ne le  fit pas et le ministre de la Santé décida de ne plus donner le marché à l’ONAPHA alors que 90% des marchés de cette industrie pharmaceutique provenaient du gouvernement. C’est ainsi que l’ONAPHA est tombé en faillite. SIPHAR naquit immédiatement et  reprit le marché.

« SIPHAR ne peut pas satisfaire le marché de l’ONAPHA », déclare Phn Mpeteye. Par exemple, pour la quinine, tous les Burundais avaient besoin seulement de 4 tonnes de poudre qui venaient d’une usine des allemands en RDCongo. Elle avait des antibiotiques essentiels, des sirops et des suspensions essentiels et SIPHAR a repris les même catégories parce qu’elle savait que le marché était déjà là. Il conseille à SIPHAR de chercher les fonds nécessaires pour investir, revoir leur prix par rapport aux autres investisseurs pour pouvoir concourir.

Pour en sortir, Phn Mpeteye suggère au gouvernement d’attirer les investisseurs pour qu’ils amènent les fonds en leur montrant ce qu’ils vont gagner (exonération des matières premières, la TVA, leur donner des terrains à moins cher et une période de grâce pour le paiement de l’impôt.

A propos de l'auteur

Bonith Bigirindavyi.

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