L’infertilité reste un sujet tabou dans de nombreuses sociétés. Très souvent la femme est accusée à tort et à raison d’être inféconde. Ce qui est sûr est que ce phénomène touche à la fois les hommes et les femmes. Les scientifiques alertent sur la régression de la fécondité à l’échelle mondiale
L’infertilité est un phénomène social mal perçu par les communautés. En cas d’infertilité dans un couple, la femme est pointée du doigt. Mais en réalité, ce sont les tests qui donnent des résultats fiables. Pour la Première dame Angeline Ndayishimiye, la stigmatisation liée à l’infertilité dans la société burundaise est plus qu’une réalité. «…certains hommes et de belles familles jettent toujours le tort sur la femme dans un couple infertile, comme si l’homme était toujours à l’abri de cette pathologie», a-t-elle déploré lors d’un atelier de sensibilisation sur l’infertilité organisée le 14 avril 2021.
L’infertilité affecte aussi bien les hommes que les femmes de manière presque égale. Elle invite les hommes à accompagner leurs épouses lors des soins et examens gynécologiques pour partager cette douloureuse expérience que vivent les couples infertiles. Les femmes sont souvent tenues pour responsables des échecs en matière de santé génésique. « On part du principe que si un couple n’arrive pas à concevoir, la femme est responsable », déplore l’épidémiologiste américaine Shanna Swan dans son étude sur la fécondité.
Un sujet qui reste tabou ?
Pour la scientifique Shanna Swan, les autres crises sanitaires, notamment la pandémie de Covid-19 occupent les devants de la scène. Elle explique que les gens n’ont pas envie de parler de choses dont ils se sentent coupables. Les hommes ne veulent absolument pas envisager la possibilité d’être infertiles ou d’avoir un faible nombre de spermatozoïdes, car ils ont l’impression que cela porte atteinte à leur masculinité. C’est donc une sorte de zone secrète qu’ils essaient d’éviter, conclut-il.
Beaucoup de couples qui ont des problèmes de conception et qui ont recours à des programmes de procréation assistée ne le disent pas à leurs amis, c’est un peu caché. « Ils n’abordent pas non plus les problèmes liés aux menstruations ou à la sexualité, comme le manque de libido ou les dysfonctionnements érectiles », lit-on sur le site de la BBC. Ce sont tous des sujets embarrassants. Par contre, nuance-t-elle, les gens ne sont pas gênés de parler de leur diabète comme ils le font pour l’infertilité.

Une concentration très faible des spermatozoïdes se traduit par une plus grande difficulté à concevoir. On parle d’infertilité quand la grossesse n’arrive pas à terme alors que pour la stérilité, la conception n’a pas eu lieu.
L’infertilité n’est pas une fatalité
L’infécondité touche des millions de personnes en âge de procréer dans le monde et a une incidence sur leurs familles et leurs communautés. 48 millions de couples sont touchés par l’infécondité dans le monde, soit environ un couple sur quatre dans les pays en développement, fait savoir Xavier Crespin, nouveau représentant de l’OMS au Burundi. Il regrette le fait que l’infertilité reste encore un sujet tabou chargé de stigmatisation et portant très souvent un doigt accusateur sur la femme. Ce qui entrave encore plus la prise en charge. « L’Afrique est le continent le plus touché par l’infertilité, avec des difficultés de procréer affectant 15 à 30% des couples », alerte-t-il.
Les professionnels de santé évoquent les défis liés à la prise en charge des couples infertiles. Entre autres défis repris par nos confrères de la radio nationale: la majorité des couples font recours aux praticiens traditionnels, l’ignorance et les stéréotypes autour de l’infertilité, l’insuffisance du personnel pour prendre en charge l’infertilité, le manque d’une agence nationale pour l’assistance médicale à la procréation, la pauvreté au sein des familles, etc. Le Gouvernement à travers le ministère de la santé publique mené des actions pour réduire les cas d’infertilité. De ce fait, la fondation Merck a déjà financé la formation à l’étranger de cinq gynécologues et cinq laborantins. Il est prévu également la mise en place d’un centre pour la prise en charge des couples infertiles à l’hôpital Roi Khaled.
Le taux de fécondité mondial régresse
L’attention s’est souvent concentrée sur le système reproducteur des femmes. L’épidémiologiste américaine Shanna Swan brise le plafond de verre. Elle précise que les hommes sont également une source d’inquiétudes. Mme Swan souligne qu’en moyenne une femme de 20 ans aujourd’hui est moins fertile que sa grand-mère ne l’était à l’âge de 35 ans. Elle ajoute qu’en moyenne un homme d’aujourd’hui a la moitié du sperme que son grand-père avait au même âge, rapporte la BBC.
La compilation des résultats des études publiées sur la fécondité au cours des 40 dernières années a pu fournir des données sur le sperme. « Nous avons constaté que la concentration est passée de 99 millions de spermatozoïdes par millilitre en 1973 à 47 millions en 2011 ». Il s’agit d’une chute inquiétante. Ce chiffre de 47 millions est déjà faible et il va continuer à baisser. En dessous de 40 millions, nous arrivons à un point où il est de plus en plus difficile d’avoir un enfant de manière traditionnelle et nous devons nous tourner vers la reproduction assistée.
Pourquoi cette régression ?
Le chercheur attribue une grande partie de cette détérioration à des produits chimiques toxiques, notamment les phtalates-des substances synthétiques utilisées pour rendre les plastiques plus souples et difficiles à casser. « Le plastique et bon nombre de produits chimiques qui nous préoccupent et qui, selon moi, sont liés à ce déclin, ont commencé à être produits en grandes quantités dans le monde entier. Ce sont des produits chimiques fabriqués à partir du pétrole et de ses dérivés », a-t-elle répondu à nos confrères de la BBC.
La principale exposition à ces produits chimiques se fait par l’alimentation. « Lorsque les aliments entrent en contact avec le plastique, les phtalates contenus dans le plastique souple pénètrent dans les aliments et, de là, nous atteignent ». explique-t-elle. Cela peut se produire lorsque les aliments sont transformés ou même avant, dans l’emballage, lorsque les aliments sont stockés dans des récipients, ou lorsque les aliments sont consommés. Pour riposter, le chercheur conseille d’éliminer le plastique de nos cuisines pour utiliser des récipients en verre, en céramique ou métal.
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